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4 mars 2007

Le printemps d'Émile Goudeau

Pour hâter le retour du Printemps*

Voici revenir le Printemps,
Qui chasse les Frimas moroses.
J’ouvre mon cœur à deux battants
Au Roi-Soleil, père des Roses.
Je guette l’horizon vermeil,
Et faites-y de longues pauses,
Mon beau Soleil !

Déjà les oiseaux querelleurs
Sur les rameaux boivent les sèves.
Écoutons les merles siffleurs !
Les forêts s’emplissent de rêves.
Je veux me mettre à l’unisson:
Entrez chez moi, jeune Chanson ;
Faites sonner les heures brèves,
Douce Chanson !

Déjà fleurissent les lilas
En lourdes grappes violettes.
Les charmeuses à falbalas
Jettent au zéphyr leurs voilettes :
Prenez le chemin le plus court,
Entrez chez moi, Seigneur Amour,
Rois des femmes et des athlètes,
Ô bel Amour !

Émile Goudeau (1849-1906)    * majuscules respectées


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4 mars 2007

Le printemps de Victor Hugo

Printemps

C'est la jeunesse et le matin.
Vois donc, ô ma belle farouche,
Partout des perles : dans le thym,
Dans les roses, et dans ta bouche.

L'infini n'a rien d'effrayant ;
L'azur sourit à la chaumière
Et la terre est heureuse, ayant
Confiance dans la lumière.

Quand le soir vient, le soir profond,
Les fleurs se ferment sous les branches ;
Ces petites âmes s'en vont
Au fond de leurs alcôves blanches.

Elles s'endorment, et la nuit
A beau tomber noire et glacée,
Tout ce monde des fleurs qui luit
Et qui ne vit que de rosée,

L'oeillet, le jasmin, le genêt,
Le trèfle incarnat qu'avril dore,
Est tranquille, car il connaît
L'exactitude de l'aurore.

Victor Hugo (1802-1885) ("Les chansons des rues et des bois" 1865)

Puisque mai tout en fleurs dans les prés nous réclame

Puisque mai tout en fleurs dans les prés nous réclame,
Viens ! ne te lasse pas de mêler à ton âme
La campagne, les bois, les ombrages charmants,
Les larges clairs de lune au bord des flots dormants,
Le sentier qui finit où le chemin commence,
Et l'air et le printemps et l'horizon immense,
L'horizon que ce monde attache humble et joyeux
Comme une lèvre au bas de la robe des cieux !
Viens ! et que le regard des pudiques étoiles
Qui tombe sur la terre à travers tant de voiles,
Que l'arbre pénétré de parfums et de chants,
Que le souffle embrasé de midi dans les champs,
Et l'ombre et le soleil et l'onde et la verdure,
Et le rayonnement de toute la nature
Fassent épanouir, comme une double fleur,
La beauté sur ton front et l'amour dans ton coeur !

Victor Hugo ("Les chants du crépuscule")


Spectacle rassurant

Tout est lumière, tout est joie.
L'araignée au pied diligent
Attache aux tulipes de soie
Les rondes dentelles d'argent.

La frissonnante libellule
Mire les globes de ses yeux
Dans l'étang splendide où pullule
Tout un monde mystérieux.

La rose semble, rajeunie,
S'accoupler au bouton vermeil
L'oiseau chante plein d'harmonie
Dans les rameaux pleins de soleil.

Sous les bois, où tout bruit s'émousse,
Le faon craintif joue en rêvant :
Dans les verts écrins de la mousse,
Luit le scarabée, or vivant.

La lune au jour est tiède et pâle
Comme un joyeux convalescent ;
Tendre, elle ouvre ses yeux d'opale
D'où la douceur du ciel descend !

Tout vit et se pose avec grâce,
Le rayon sur le seuil ouvert,
L'ombre qui fuit sur l'eau qui passe,
Le ciel bleu sur le coteau vert !

La plaine brille, heureuse et pure;
Le bois jase ; l'herbe fleurit.
- Homme ! ne crains rien ! la nature
Sait le grand secret, et sourit.

Victor Hugo ("Les Rayons et les Ombres", 1840)


L'hirondelle au printemps

L'hirondelle au printemps cherche les vieilles tours,
Débris où n'est plus l'homme, où la vie est toujours ;
La fauvette en avril cherche, ô ma bien-aimée,
La forêt sombre et fraîche et l'épaisse ramée,
La mousse, et, dans les nœuds des branches, les doux toits
Qu'en se superposant font les feuilles des bois.
Ainsi fait l'oiseau. Nous, nous cherchons, dans la ville,
Le coin désert, l'abri solitaire et tranquille,
Le seuil qui n'a pas d'yeux obliques et méchants,
La rue où les volets sont fermés ; dans les champs,
Nous cherchons le sentier du pâtre et du poète ;
Dans les bois, la clairière inconnue et muette
Où le silence éteint les bruits lointains et sourds.
L'oiseau cache son nid, nous cachons nos amours.

Victor Hugo ("Les contemplations")


4 mars 2007

Le printemps d'Alphonse de Lamartine

Le moulin au printemps

Le chaume et la mousse
Verdissent les toits ;
La colombe y glousse,
L'hirondelle y boit ;

Le bras d'un platane
Et le lierre épais
Couvrent la cabane
D'une ombre de paix.

La rosée en pluie
Brille à tout rameau ;
Le rayon essuie
La poussière d'eau ;

Le vent qui secoue
Les vergers flottants,
Fait sur notre joue
Neiger le printemps.

Alphonse de Lamartine


4 mars 2007

Le printemps de Phileas Lebesgue

Pâquerette

Pâquerette, pâquerette,
Il y a des gouttes d’eau
Sur ta collerette
Et tu plies un peu le dos…
Pâquerette, pâquerette,
Le beau soleil printanier
Viendra-t-il les essuyer ?

Pâquerette, pâquerette,
Qui souris près du sentier,
Je te le souhaite…

Pâquerette, pâquerette,
Il y a sur ton cœur d’or
Un frelon en fête ;
Tant il est ivre qu’il dort !
Pâquerette, pâquerette,
L’aile du vent printanier
Va-t-elle le balayer ?

Pâquerette, pâquerette,
Qui rêves près du sentier,
Je te le souhaite.

Philéas Lebesgue (1869-1958)


4 mars 2007

Le printemps de Pierre Menanteau

Pierre Menanteau  (1895-1992), est un auteur de contes et un poète. Il a publié de nombreux recueils et des anthologies de poésie française, pour les enfants en particulier.

Renouveau

Du mois d’avril au mois de mai
La terre se fait plus gentille.
Un joli temps de jeune fille,
tire l’aiguille, prend le dé.

Parfois un bel arc irisé
Pavoise l’averse qui brille.
Du mois d’avril au mois de mai
La terre se fait plus gentille.

La violette est dans le pré.
Dans la clairière, la jonquille
Sous l’arbre en espoir de famille
On entend le merle chanter
Du mois d’avril au mois de mai

Pierre Menanteau


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4 mars 2007

Le printemps de Gérard de Nerval

Avril

Déjà les beaux jours, la poussière,
Un ciel d'azur et de lumière,
Les murs enflammés, les longs soirs ;
Et rien de vert : à peine encore
Un reflet rougeâtre décore
Les grands arbres aux rameaux noirs !      

Ce beau temps me pèse et m'ennuie.
Ce n'est qu'après des jours de pluie
Que doit surgir, en un tableau,
Le printemps verdissant et rose,
Comme une nymphe fraîche éclose
Qui, souriante, sort de l'eau.   

Gérard de Nerval (1808-1855) ("Odelettes")


4 mars 2007

Le printemps de Charles d'Orléans

Le Printemps (parfois titré Rondeau)

Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie                  
Et s'est vêtu de broderies,
De soleil luisant, clair et beau

Il n'y a bête, ni oiseau
Qu'en son langage ne chante ou crie
Le temps a laissé son manteau
De vent de froidure et de pluie

Rivières, fontaines et ruisseaux
Portent en livrée jolie
Gouttes d'argent, d'orfèvrerie
Chacun s'habille de nouveau

Charles d'Orléans (1391-1465) ("Rondeaux", poèmes écrits vers l'année 1450)

texte d'origine, en ancien français :

Le Printemps

Le temps a laissié son manteau
de vent, de froidure et  de pluye, 
Et s'est vestu de brouderie
De soleil luyant, cler et beau.
Il n'y a beste, ne oyseau,
Qu'en son jargon ne chante ou crie :
Le temps a laissié son manteau!

Rivière, fontaine et ruisseau 
Portent, en livrée jolie,
Gouttes d'argent, d'orfavrerie,
Chascun s'abille de nouveau:
Le temps a laissié son  manteau

Charles d'Orléans ("Rondeaux")


Autre poésie du même auteur sur le thème du retour du printemps :

Montrez bien, Printemps gracieux

Montrez bien, Printemps gracieux,
De quel métier vous savez vous servir,
Car Hiver se fait seul ennuyeux,
Et vous le faites réjouir.
Aussitôt qu'il vous voit venir,
Lui et sa méchante retenue
Sont contraints et prêt de fuir
À votre joyeuse venue.

Hiver rend champs et arbres vieux,
Leurs barbes de neige blanchir,
Et est si froid, sale et pluvieux
Qu'après le feu vient croupir ;
On ne peut hors des toits sortir
Comme un oiseau qui se mue.
Mais vous faites tout rajeunir
À votre joyeuse venue.

Hiver fuit le soleil dans les cieux
Du manteau des nues couvrir ;
Or maintenant, loué soit Dieux,
Vous êtes venu éclaircir
Toutes choses à embellir.
Hiver a sa peine perdue,
Car l'an nouveau l'a fait bannir
À votre joyeuse venue.

Charles d'Orléans ("Rondeaux")

texte original :

Bien moustrez, Printemps gracieux

Bien moustrez, Printemps gracieux,
De quel mestier savez servir,
Car Yver fait cueurs ennuieux,
Et vous les faictes resjouir.
Si tost comme il vous voit venir,
Lui et sa meschant retenue
Sont contrains et prestz de fuir
A vostre joyeuse venue.
Yver fait champs et arbres vieulx,
Leurs barbes de neige blanchir,
Et est si froit, ort et pluieux
Qu'emprés le feu couvient croupir ;
On ne peut hors des huis yssir
Comme un oisel qui est en mue.
Mais vous faittes tout rajeunir
A vostre joyeuse venue.
Yver fait le souleil es cieulx
Du mantel des nues couvrir :
Or maintenant, loué soit Dieux,
Vous estes venu esclersir
Toutes choses et embellir.
Yver a sa peine perdue,
Car l'an nouvel l'a fait bannir
A vostre joyeuse venue.

Charles d'Orléans


Et puis ce poème , pour un peu plus tard :

Ballade du premier jour de mai

Trop longtemps vous vois sommeillier,
Monsieur, en deuil et déplaisir.
Veuilliez vous ce jour éveiller !
Allons au bois le mai cueillir
Pour la coutume maintenir !
Nous orrons des oyseaux le glay 1                         
Dont ils font les bois retentir
Ce premier jour du mois de mai.

Le Dieu d'Amour est coutumier
À ce jour de fête tenir
Pour amoureux cœurs festoyer
Qui désirent le servir.
Pour ce fait les arbres couvrir
De fleurs et les champs de vert gai
Pour la fête plus embellir
Ce premier jour du mois de mai.

Bien sais, mon cœur, que faux danger
Vous fait maintes peines souffrir,
Car il vous fait trop éloigner
Celle qui est votre désir.
Mieux conseiller je ne vous sais
Pour votre douleur amoindrir
Ce premier jour du mois de mai.

Ma dame, mon seul souvenir
En cent jours je n’aurai loisir
De vous raconter tout au vrai
Le mal qui tient mon coeur martyr
Ce premier jour du mois de mai ...

Charles d'Orléans ("Rondeaux")

texte original :

Balade (orthographe de l'ancien français pour "ballade")

Trop longtemps vous voy sommeillier,
Mon cueur, en dueil et desplaisir;
Vueilliez vous ce jour esveillier,
Alons au bois le May cueillir,
Pour la coustume maintenir.
Nous orrons des oyseaulx le glay,
Dont ilz font les bois retentir,
Ce premier jour du mois de May,
Le Dieu d'amours est coustumier,
A ce jour, de feste tenir,
Pour amoureux cueurs festier
Qui desirent de le servir;
Pour ce, fait les arbres couvrir
De fleurs, et les champs de vert gay;
Pour la feste plus embellir,
Ce premier jour du mois de May.
Bien scay, mon cueur, que faulx Dangier
Vous fait mainte paine souffrir;
Car il vous fait trop eslongner
Celle qui est vostre desir;
Pourtant vous fault esbat querir;
Mieux conseiller, je ne vous scay,
Pour vostre doleur amendrir,
Ce premier jour du mois de May.

L'envoy

Ma Dame, mon seul souvenir,
En cent jours n'auroye loisir
De vous raconter, tout au vray,
Le mal qui tient mon cueur martir,
Ce premier jour du mois de May.

Charles d'Orléans



4 mars 2007

Le printemps d'Henri Pourrat

Écrivain prolifique et poète, Henri Pourrat (1887-1959), est l'auteur de Gaspard des montagnes (1931) et de l'oeuvre monumentale Le Trésor des contes (édité en 1961). Il a obtenu le Prix Goncourt en 1941, pour Vent de mars.

Au royaume du vert

Le beau temps est venu,
Aussi la violette.
Le vent d'avril ronfle dans l'arbre nu
Et le soleil vous étourdit la tête.
Ce soleil et ce vent volent sur les chemins
Par toute la montagne,
Et des nuages blancs arrivés de Limagne (1)
Traînent vite leur ombre au-dessus des campagnes,
Tous à la queue-leu-leu dans le bleu du matin.
Ouvre tout grand, ouvre dans les chambrettes,
Qu'on voie le vent gonfler les rideaux de coton.
Et puis ie sors. Passe-moi mon bâton
La fleur éclôt, c'est la fête aux fleurettes,
L'herbe verdoie, c'est la fête à l'herbette,
Fête du vert de par tout le canton,
Au pré pour le mouton,
Au ciel pour l'alouette,
Faisons-nous tous de fête,
Verduron, verdurette,
Et verduron, don don.

(1) La région où a vécu l'auteur
Henri Pourrat


4 mars 2007

Le printemps de Jacques Prévert

Jacques Prévert (1900-1977), poète surréaliste à ses débuts, ami entre-autres de Raymond Queneau, s'éloignera de ce mouvement pour une poésie "populaire", frondeuse, parfois très caustique à l'endroit des corps constitués : l'Armée, l'Église, les institutions ...
Une grande partie de son œuvre poétique, en prose ou en vers libres, est accessible aux plus jeunes, avec des textes pleins d'humour et d'humanité, petites saynètes du quotidien.
Jacques Prévert est très présent dans les cahiers de récitation ("Paroles" - 1945, est un des recueils de poésie les plus vendus et les plus traduits) ... voir la catégorie PRINT POÈTES 2008 : L'AUTRE (France)

Voici le long poème qui ouvre le recueil Grand bal du printemps.
Présenté dans son intégralité, nous en avons différencié (couleurs) trois passages, qui bien que consécutifs dans le texte original, peuvent constituer pour la classe, trois poèmes différents, chacun ayant sa cohérence.

Grand bal du printemps (1)

Dans les eaux brèves de l'aurore
où les nouvelles lunes et les derniers soleils

A tour de rôle
viennent se baigner

Une minute de printemps
dure souvent plus longtemps
qu'une heure de décembre
une semaine d'octobre
une année de juillet
un mois de février

Nomades de toujours et d'après et d'avant
le souvenir du cœur
et la mémoire du sang
voyagent sans papiers et sans calendriers
complètement étrangers
à la Nation du Temps.

Chaque année
chaque nouvelle saison souhaite la fête à la ville
et chacune en son temps chacune à sa manière
l’hiver après l’automne l’automne après l’été

Mais on dirait
que le Printemps
lui
ne souhaite à Paris que son anniversaire
la fête de sa jeunesse délivrée de tous liens

Et Paris
qui n’aime guère dans le fond les grandes fêtes officielles
les grandes insolations et commémorations
ni les sanglots trop longs
et qui ne participe qu’avec la plus souveraine
indifférence à ces grandes réjouissances
quand on présente devant l’Arc de Triomphe
les armes à la souffrance
et
que le soleil astique les cuivres pour rendre sur
l’Esplanade
la fanfare plus martiale

Paris est fou de joie
quand arrive le Printemps
C’est son enfant naturel
son préféré
et Paris écrit son nom sur les murs
Grand Bal de Printemps comme un cœur sur un arbre
sur la pierre c’est gravé

Printemps de l’école primaire
toujours premier en classe
à parler des vacances
toujours prêt à rompre la glace
mais jamais à rompre des lances

Grand Bal de Printemps
la musique de son nom
à toutes les lèvres est suspendue
Comme un jardin perdu qu’on vient de retrouver
encore plus beau qu’avant
Et encore plus vivant

Grand Bal de Printemps
Cet air court les ruisseaux et les rues de la ville
c’est le refrain du sang de ses veines populaires
le sang de ses plus vraies artères


Printemps (1)

Toutes ses promesses sont des fêtes
la nuit la belle étoile
pour lui et ceux qui couchent dehors
se fait plus belle encore

Et ce n’est pas sa faute
si les ponts sont trop chers
la vie toujours plus dure
le bonheur plus précaire

Toutes ses promesses sont des fêtes
Il n’est pas responsable du reste.

(1) Le poème n'a pas de titre dans le recueil, le titre général proposé, "Grand bal du printemps", est celui du recueil.
(2) "Printemps" n'est pas un intertitre, mais un vers de ce poème.

Jacques Prévert ("Grand bal du printemps" - La Guilde du Livre, Lausanne 1951)
Également publié dans les Oeuvres complètes de Jacques Prévert, tome 1 -  éditions Gallimard, La Pléiade ; et disponible en édition de poche Folio/Gallimard, 1976, suivi de "Charmes de Londres".


4 mars 2007

Le printemps de Pierre Reverdy

Sur un petit air

Le coeur vole vole vole
Dans les tourbillons du vent
Le coeur vole vole vole
Dans les rayons du printemps.

Le coeur vole vole vole
Dans la cage des amants
Le coeur vole vole vole
Dans l'orage et les tourments.

Puis se pose pose pose
Se pose bien sagement
Puis se pose pose pose
Entre les bras d'un enfant.

(Pierre Reverdy.1889-1960)


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