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lieu commun
4 janvier 2009

Poètes d'OUTRE-MER - Grande-Comore

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Comores : Grande Comore 

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carte_Grande_Comore

L'archipel des Comores comprend des possessions françaises (voir Mayotte à la page précédente) et des états indépendants. Parmi ces derniers, Grande Comore (Ngazidja, en shingazidja, capitale Moroni) appartient à la République Fédérale Islamique des Comores, appelée maintenant aussi Union des Comores, mais elle possède un statut d'autonomie. Comme il s'agit de la plus importante île de l'archipel, on l'appelle parfois Comore(s), ce qui peut prêter à confusion. Terre longtemps colonisée par la France (sous protectorat puis faisant partie de Madagascar), elle a donné à la langue arabe, à la langue shingazidja, et particulièrement à la francophonie, des écrivains, romanciers et poètes.

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Salim Hatubou   est né en 1972 en Grande-Comore, mais comme de nombreux auteurs et artistes d'Outre-Mer, il s'exile en métropole dès l'enfance, à Marseille, pour y suivre des études, et s'y installe. Poète, nouvelliste, et conteur ("Les Contes de ma grand-mère", 1994), il retourne régulièrement dans son île natale et participe, ici et ailleurs, à des festivals de contes et à diverses manifestations culturelles.

Un court extrait de son ouvrage bilingue français-anglais "Comores Zanzibar, Comoros Zanzibar", avec ce passage en français et la dernière partie en anglais :

Comores / Zanzibar (extrait)

Je t’ai vu inquiet, mon enfant.
J’ai demandé à la mer de te bercer, mon enfant.
Et, silencieusement, je déposais au creux de ton oreille
l’histoire de ces côtes, les côtes de l’île de mon enfance,
Zanzibar.
D’Ungudja, ma mère, j’entends Ba Hussein
inviter les djinns bantus de Pemba à la danse.
Il dit : Nyumba Yagwa, la maison s’est écroulée.
Ntende je we ? Que puis-je faire ?
Potea Ufunguo. La clef est perdue.
Alors, mon enfant, rebâtis la maison,
cherche la clef, ouvre, entre et installe-toi.
J’entends les pas de nos pères :
de Zanzibar, ils s’en vont.
J’entends les pas de nos mères :
de Majunga, ils s’en vont.
J’entends les pas des miens
à Marseille, ils marchent. Pour Ibrahim.
Djoumoi n'est pas Comorien. Il est Zanzibari.
Ali n'est pas Comorien. Il est Malgache.
Kamal n'est pas Comorien. Il est Réunionnais.
Salma n'est pas Comorienne. Elle est Française.
Serions-nous, ma mère, le peuple de la négation ?

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Djoumoi is not Comorian. He is a Zanzibari.
Ali is not Comorian. He is a Malagasy.
Kamal is not Comorian. He is from Reunion.
Salma is neither a Comorian. She is French.
Mother, shall we remain people denied of their existence ?

Salim Hatubou (extrait de "Comores Zanzibar, Comoros Zanzibar" (bilingue français-anglais), photographies de Jean-Pierre Vallorani, préfaces de Ken Loach et d'Alain Mabanckou, éditions Françoise Truffaut, 2007) - Cet ouvrage a obtenu le prix Diamant (Belgique).

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Mahamoud M’Saidié   est présenté ainsi par l'éditeur les Éditions Du Cygne pour son dernier recueil en date, "Autodafés" (2010) :
Docteur en littérature comparée (Université Paris 13), Mahamoud M’Saidié est né à M’dé Bambao, aux Comores *. Il vit à Paris depuis 1987. Il a enseigné le français dans plusieurs collèges en région parisienne. Il a obtenu le 2e Prix du concours de la poésie organisé par la Médiathèque de Nanterre, 2002-2003. (* village de Grande-Comore).

Nous trouvons ici (recueil "Autodafés"), une poésie au service de l'engagement, engagement contre la pauvreté, la faim, la corruption et toutes les formes d'injustice qui rongent nos sociétés. Autodafés accorde aussi, dans sa poésie, une place considérable à différents sujets : l'amour, les déceptions sentimentales, les rêves déchus et la nostalgie du natal, les Comores... le paradis perdu.

La marée (extrait du recueil et titre proposé)

La marée nous revient avec une écume de sang
Dans la sagacité des flux et des reflux
transparaît la douleur des algues
On y voit aussi les plaies des coraux
le désespoir des varechs
Leur puanteur habite la comète de nos rêves éveillés
Un silence d'angoisse s'installe dans les
entrailles de cette mer qui s'en va
L'acier de sa souffrance nous monte à
la gorge revisite le palais
La mer
Elle était notre souffle d'or notre ville à
la paupière d'eau douce
L'antidote contre les nuits d'hypnose

Mahamoud M’Saidié (extrait de "Chants d'Opale", éditions Encres Vives, 2009)

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Le signe de l'eau  

Femme, ils m'ont demandé mon vrai nom
De naissance.
Dis-leur que mon épine dorsale est brune,
Bien tonifiée par le sel.
Dis-leur que j'ai les clés de toutes les portes
Des lagons, et que l"odeur de mes entrailles
Est celle du corail parfumé par les abysses.

Femme, dis-leur que ma vie porte les écailles
De l'eau et que ma prunelle a pris la couleur
Des coulées de lave.
Femme, femme, dis-leur que la douleur de l'eau
Est inscrite dans mes veines charriées.

Mahamoud M’Saidié ("Le Mur du Calvaire", éditions L'Harmattan, 2001 et 2003)

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Une gerbe de songes (extrait du recueil et titre proposé)

Elle voudrait une gerbe de songes pour sa mémoire transie
Un logis pour mettre son souffle au chaud
Elle voudrait des poèmes de la pluie pour irriguer les plantes grasses de son destin
Des colliers de parfums en guise d’amour
Elle voudrait une pierraille luisante pour apothéoser son apparence
Des poumons d’or pour mieux suivre toutes les cohortes des saisons
Voici l’oeil secret de la femme-monde

Mahamoud M’Saidié (extrait de "Une gerbe de songes", éditions Hélices, 2009)

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Soeuf Elbadawi est né en 1970 à Moroni. Il quitte comme tant d'autres son île natale pour ses études universitaires en métropole. C'est un hommede radio, de médias, de production musicale et cinématographique, également nouvelliste, dramaturge et poète ("Une rose entre les dents, un poème pour ma mère, 2008).
Soeuf Elbadawi a écrit ce recueil pour rendre hommage à sa mère disparue :

Une rose entre les dents
(extrait)

... ce dernier voyage
elle tenait à le mener seule contre l'attente
   
en demandant une dernière fois son chemin
dans la dignité des matins de roses ...

Soeuf Elbadawi ("Un poème pour ma mère / Une rose entre les dents", Komedit éditions, Moroni, 2008)



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