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15 mai 2009

Marc ALYN, Paul ARÈNE Théodore de BANVILLE - PRINT POÈTES 11 : PAYSAGES en français

Marc Alyn est né en 1937. Il est romancier (Le Déplacement, 1964) et poète (une vingtaine de recueils, dont Le Temps des autres, prix Max Jacob 1957 ; Les Alphabets de Feu, Grand Prix de Poésie de l'Académie Française, 1994).
Il est aussi critique d'art, essayiste (Le Piéton de Venise, "roman contemporain", prix Henri-de-Régnier 2005 de l'Académie française) et auteur d'un "opéra-verbe" (Le Grand Labyrinthe, 1971).

"Je crois en l'homme simplement
pour sa résistance à la nuit ..."

 
(Marc Alyn)
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Un printemps tout neuf

Un arbre sourit de toutes ses fleurs.
Des ramiers s'en vont, à deux, vers le fleuve.
Le coucou vivant au bois donne l'heure :
Voici le printemps dans sa robe neuve !

Quel joli printemps aux yeux de pervenche,
Aux lèvres de rose, aux doigts de lilas !
La vie sur l'hiver a pris sa revanche
Et danse en chantant un alléluia.

Marc Alyn

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Bulletin de santé (extrait)

[...]
Ma tour d’ivoire c’est la rue
où se pressent des inconnus
guidés chacun par leur misère
chacun la sienne pas de jaloux !

Je ne suis pas un alchimiste
Je ne transforme rien en rien
simplement je suis mon chemin
semant des graines dans les ruines

Toutes ces pierres sous mes pas
me sont précieuses et nécessaires
je suis riche de cette terre
qu’un jour de pluie on me donna

Je n'ai pas besoin des nuages
pour alimenter ma chanson !
Mon cœur est plein de ciel
mon regard de chants d'oiseaux

Je crois en l'homme simplement
pour sa résistance à la nuit
...

Marc Alyn ("Liberté de voir" - éditions Terre de Feu - et dans 'Poèmes à dire" choisis par Daniel Gélin - Seghers, 1974)



Paul Arène, ou Paul-Auguste Arène, (1843-1896) est un poète de langue provençale et française, contemporain et proche d'Alphonse Daudet (il aurait participé à l'écriture des Lettres de mon moulin) et de François Coppée (poète présent sur le blog dans la catégorie "Hiver"). Il préside le Félibrige de Paris en 1879 (mouvement littéraire créé par Frédéric Mistral en 1854 pour favoriser et organiser la sauvegarde et la promotion de la langue d’oc).

Si le poème qui suit célèbre la fin de l'automne et l'hiver à Chaville, en région parisienne, c'est la Provence de Sisteron qu'il décrit préférentiellement dans ses nouvelles, poèmes et romans.

Le texte présenté ici, et celui qui suit, sont tirés de l'édition originale du livre, édition posthume de ses Œuvres complètes :

Paysage

L'automne à Chaville est superbe ;
Le bois par place est resté vert ;
Ailleurs, tournant au vent d'hiver
Les feuilles s'abattent sur l'herbe ;
Mais les grands chênes fiers encor,
Gardent leur parure tenace,
Et, sentant que le froid menace
S'habillent de cinabre et d'or.
Qu'importe si le ciel est sombre,
Quand on a la claire forêt,
Son feuillage ardent qui paraît
Plus radieux au sein de l'ombre
Nous garde en ses rameaux vermeils,
Dans ses feuilles d'or pur baignées,
Et de longs rayons imprégnées,
Le souvenir des vieux soleils.

Deux pages plus loin dans ce même recueil, un autre poème est une déclinaison de celui-ci, sous un autre titre et sans doute dans les mêmes lieux. Paul Arène nous donne ainsi le choix :

Chronique d'automne (début du texte)

Il fait bleu ! le temps est superbe ;
 
Pour se promener en rêvant.
 
Averse pourpre dans le vent,
 
Les feuilles s'abattent sur l'herbe ;
 
Mais les grands chênes fiers encor,
 
Gardent leur parure tenace,
 
Et, sentant que le froid menace
 
S'habillent de cinabre et d'or.
 

 
Qu'importe si le ciel est sombre,
 
Quand on a les bois familiers ?
 
Le couvert rouillé des halliers,
 
Plus radieux au sein de l'ombre,
 
Garde avec des tons de velours,
 
Dans ses branches d'or pur baignées,
 
Et de longs rayons imprégnées,
Un vague reflet des beaux jours.

Or, j'allais, songeant à ces choses,
Loin de la grand'ville et cherchant,
Sur quelque pente, au coin d'un champ,
Fatigué des apothéoses,
L'apothéose du couchant.

[...]

* "Le souvenir des vieux hivers" : cette variante qu'on peut rencontrer, n'est pas semble-t-il de la main de Paul Arène.

Paul Arène, écrit en 1883 -  ("Poésies de Paul Arène", chapitre "Tableaux parisiens et paysages", préface d'Armand Silvestre, éditions Lemerre, 1900 et "Œuvres Complètes", aux Éditions Culture Provençale et Méridionale)



Théodore de Banville (1823-1891) est un poète parnassien.

À la Forêt de Fontainebleau (passage)

[...]

N'est-ce pas, n'est-ce pas que vous étiez vivant,
Noir feuillage, immobile et triste sous le vent,
Comme une mer qu'un dieu rend docile à ses chaînes ?
Et vous, colosses fiers, arbres noueux, grands chênes,
Rien n'agitait vos fronts, par le temps centuplés !
Pourtant vos bras tordus et vos muscles gonflés,
Ces poses de lutteurs affamés de carnage
Que vous conserviez, même à cette heure où tout nage
Dans la vive lumière et l'atmosphère en feu,
Laissaient voir qu'autrefois, sous ce ciel vaste et bleu,
Vous aviez dû combattre, ô géants centenaires !
Au milieu des Titans vaincus par les tonnerres.

Et vous, rochers sans fin, suspendus et croulants,
Sur qui l'oiseau sautille, et qui, depuis mille ans,
Gardez, sans être las, vos effroyables poses,
La mousse et le lichen et les bruyères roses
Ont beau vivre sur vous comme un jardin en fleur,
Ne devine-t-on pas dans quelle âpre douleur
Un volcan souterrain, contre le jour qu'il brave,
Jadis vous a vomis avec un flot de lave !

[...]

 

Théodore de Banville (recueil "Le sang de la coupe", publié dans "Le Sang de la coupe. Trente-six Ballades joyeuses. Le Baiser", éditions Lemerre, 1890)

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L'Hiver

Au bois de Boulogne, l'Hiver,
La terre a son manteau de neige.
Mille Iris, qui tendent leur piège,
Y passent comme un vif éclair.

Toutes, sous le ciel gris et clair,
Nous chantent le même solfège ;
Au bois de Boulogne, l'Hiver,
La terre a son manteau de neige.

Toutes les blancheurs de la chair
Y passent, radieux cortège ;
Les Antiopes de Corrège
S'habillent de martre et de vair
Au bois de Boulogne, l'Hiver.

Théodore de Banville (recueil "Les Cariatides", éditions Lemerre, 1877)



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