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1 novembre 2009

Joquel, Khoury-Ghata - PP12 - ENFANCES - TEXTES EN FRANÇAIS

- Patrick Joquel -

Patrick Joquel, né en 1959, est un romancier pour la jeunesse et poète contemporain, qui dit lui-même porter plusieurs casquettes :
"... Casquette d’Auteur : poèmes, romans, albums, pédagogie de la poésie, anthologies poétiques... Casquette d’Enseignant : professeur des écoles dans les Alpes Maritimes, actuellement sur un poste itinérant... Casquette de randonneur : arpenteur des hauts sentiers du Mercantour ou d’ailleurs... Casquette de Petit Critique : j’aime croquer en quelques lignes mes lectures ... "(source : http://lignesdecritures.org/-Patrick-Joquel-.html)
Deux recueils de poésies parmi d'autres recueils :
Le classique "Que sais tu des rêves du lézard" (éditions Magnard, 2004), et une nouveauté : "Un bleu formidable" (Editions le Chat qui tousse), en 2011, qui rassemble des haïkus, illustrés de Johan Troïanowski.
On citera aussi un outil, guide pédagogique pratique : "Poésie maternelle" (Magnard, 2007) sans oublier "Poésie Cycles 2 et 3", (Magnard, 2001).
Et puis un site, le sien, pour faire plus ample connaissance avec cet auteur multiforme : http://www.patrick-joquel.com/

  • Sur le site de Patrick Joquel, les trois premières strophes d'un poème sans titre, tirés du recueil "Croquer l'orange", aux éditions Pluie d'étoiles (2008), et toujours illustré par Johan Troïanowski

Croquer l'orange (titre proposé - c'est celui du recueil)

1

À bord de ton croissant

tu as croqué l’orange

Un lent soleil couchant

Tu es doux comme un ange

Tu as dix doigts plumes

Tu caresses les nuages

les comètes

les orages

Tout ce qui s’allume

quand s’obscurcit la planète

2

Avec sa pelle en plastique

elle prend du sable

et le lance

loin dans la mer

Très loin

Un peu plus tard

elle remplit le seau d’eau

puis le vide

sur la plage

Tu le sais

tu en as fait autant

si loin que tu ne t’en souviens plus

Une autre vie

Aujourd’hui

tu n’as plus ni seau ni pelle

mais tu regardes encore la mer

3

Tu vis

sur un filin d’écume

Funambule

aux muscles salés

tu déambules

Ton corps sablé

croque à tous les bleus

(...)

Patrick Joquel ("Croquer l'orange" - Pluie d'étoiles - 2008)

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Le nénuphar 
(titre proposé)

Le nénuphar
Quelle histoire
A dit Grellule
A Libenouille
Le nénuvers
Flotte à l’emphar

Patrick Joquel

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J'aime le rouge (titre proposé)
 
" J'aime le rouge"
chuchote la fraise à la cerise.
" J'aime le rouge"
dit la cerise à la framboise.
"Moi aussi mais avec du noir"
 répond la coccinelle.
 "Le noir éclaire un peu plus les mystères"
murmure en s'envolant un zygène.*

* le zygène est un insecte, un papillon lde nuit, dont il existe en France de nombreuses espèces, amateurs exclusifs de différentes plantes

 

Patrick Joquel

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des passages d'un long poème, où à l'occasion d'une balade pédestre, "un peu de notre enfance surgit en nous" :

Cinqueterre, un territoire signé des hommes (extraits - titre proposé)

(...)

On arpente un territoire abrupt
 
De la ligne de crête à celle du ressac
la terre
vieille peau rêche
s’est plissée
 
Les torrents
comme autant de traits d’union balafrent les pentes
on regarde avec effroi les traces de leurs morsures
on imagine leur furie
 
C’est pourtant là
sur les lèvres de ces oueds que des hommes ont niché des villages dont la rue principale se jette à la mer
 
Aux heures où le travail se désaltère en terrasse
un verre de blanc à la main
le regard se perd dans les mouvants horizons bleus qu’un cargo parfois souligne
et
reposées devant les portes colorées des maisons les barques voient fleurir sur leur bois peint le sel oublié de la dernière pêche
 
Comment choisit-on d’habiter l’inhabitable et pourquoi
?
 
La question reste en suspens tandis qu’on marche entre ciel et mer et d’un clocher à l’autre sur ces adrets sculptés au burin des restanques
 
La vigne bourgeonne un léger vert
sous les oliviers le paysan vient de rouler ses filets
 
On arpente ici un territoire signé des hommes
 
*
L’agave cloue le sentier à la falaise
 
Debout
on voudrait nous aussi écarter les bras
s’élever
s’envoler
tellement fort tellement léger
comme on aimerait
 
On avance ainsi chaussé de loisirs sur ces sentiers rocailleux cherchant à surprendre une ombre
 
On vient ici comme en échappée
portable éteint
 
On se repose en marchant
 
Que vient-on chercher au juste ?
 
Sur ces chemins aussi caillouteux que leurs passés on s’en va tout gonflé de silence et nos pas rebondissement d’un mot à l’autre
 
Ici vont des chemins de labeur
de femmes chargées de foin
de paniers d’olives
de hottes de vendanges
 
Ces chemins dallés aux murs fleuris nous emmènent
chemins usés par les sabots
le pied glisse
 
Et la mer
toujours
suspendue aux branches
comme pour mieux river les hommes à leurs jardins ou bien pour tenter d’en attirer quelques uns
au large
 
Hommes de terres
Hommes de vents
 
*
Le vent écume un goéland
son cri arrache un lambeau de chair au silence
il dessale un vieux paysage
 
Ressac
écume
un peu de notre enfance surgit en nous
silence et nostalgie apaisent des douleurs de vieux genoux
on joue avec la vague à mouiller deux doigts de pieds
on glane
coquilles vides
bouts de verre
petits cailloux polis
 
On oublie la rumeur de la route
le cri du train
on se nettoie les yeux de ses bureaux
de ses écrans
de ses graphiques
nul ne peut indexer aux cours des bourses internationales
nos émotions
 
Tant de beauté pour une coquille
 
On se laisse juste prendre
on se dit que ces couleurs roulées

sur la grève
avec leurs bruits d’horloge
sont intemporelles
 
Chaque vague a sa lumière
sa courbe
son fracas
son soupir

(...)

printemps 2003 entre Rio Maggiore et Sestri Levante ;
et bien sûr à mon balcon de Mouans Sartoux.(PJ)

Patrick Joquel (revue blog "Le Capital des mots" décembre 2007) - source : http://www.le-capital-des-mots.fr/

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Il pleut sur la ville (titre proposé)
 
Il pleut sur la ville

des mots que je n'aime pas

Je les jette au caniveau

l'eau les dissout

Un mérou les fumera

dans sa pipe

un soir au fond

de sa grotte marine

Il pleut sur la ville

      des mots

que je n'aime pas

Patrick Joquel

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Que sais-tu des rêves du lézard ?(titre proposé)livre_r_ves_l_zard

Tu ne regardes pas
la couleur des autos
tu choisis de compter
les fleurs du potager d'en face

Tu n'écoutes pas
le bavardage des moteurs
tu préfères chercher
le petit lézard du balcon
celui que le citronnier a couvé
tout l'hiver
dans son pot

Patrick Joquel ("Que sais-tu des rêves du lézard ?" - éditions Magnard , 2004)

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Un silencieux brochet (titre proposé)

Un beau soir de juillet
un silencieux brochet
de son métier lassé
raccrocha son dentier

Devenu non violent
il partit au Tibet
se nourrir de sorbet

A l'automne suivant
il revint en volant
pour ouvrir un glacier
sur un fond de graviers

Patrick Joquel ("Tant de secrets" - éditions Gros Textes, 2005)

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L'igloo (titre proposé)

Je vis caché

dans un trou
tout au fond
de mon igloo
J'attends
un peu de soleil
un petit
clin d'oeil
du ciel
Je guette
avec gourmandise
un amour
sur la banquise

Patrick Joquel ("Demain les hippocampes" - éditions Solos, 1998)

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Pas seul au monde (titre proposé)

Tu suis des yeux
la flèche rouge de ta boussole
Loin là-bas
au delà de la montagne
un éléphant de mer t'attend
Tu vois
tu n'es pas seul au monde

Patrick Joquel ("Le bruit d'un brin de bambou" - éditions Gros Textes, 1999-2003)

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Le soleil(titre proposé)

Ce matin
Dans le bol bleu du ciel
Le soleil trempe un dernier croissant
Puis
Sans se presser
Ouvre la terre
Et
Lit le journal
Des fleurs et des insectes

Patrick Joquel

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Question (titre proposé)

Tu m'expliques
Orion
Rigel et Bételgeuse
La dérive des continents
Le lent cheminement de l'homme
et la danse des atomes
Mais
tu ne me dis pas
où j'étais
avant de venir au monde

Patrick Joquel ("Perché sur ton planisphère" - éditions lo Païs, encres de Zaü)



- Vénus Khoury-Ghata -

Vénus Khoury-Ghata est une poète, journaliste (son premier métier) et romancière libanaise francophone, née en 1937 à Baabda, près de Beyrouth. Elle vit à Paris depuis 1972. Déjà lauréate du Prix Guillaume Apollinaire (pour "Les ombres et leurs cris" en 1979), du Prix Mallarmé ("Un faux-pas du soleil, 1982), du Prix Jules Supervielle ("Anthologie personnelle, 1997), du Grand prix de poésie de l’Académie française, du Grand prix Guillevic de poésie de Saint-Malo, et du Grand Prix de Poésie de la Société des Gens de Lettres pour l'ensemble de son œuvre, elle vient d'obtenir Le Prix Goncourt de la poésie 2011, également pour l'ensemble de son œuvre.

Quelques ouvrages parmi une quarantaine de titres :

  • romans : La Maestra (Actes Sud, 1996, prix Antigona) - Sept pierres pour la femme adultère, roman, Mercure de France, 2007 - La Maison aux orties, Actes Sud, 2006 - La fille qui marchait dans le désert (roman), Mercure de France, 2010 - Privilège des morts, roman, Balland, 2001 - Une maison au bord des larmes, roman, Balland, 1998, Babel 2005
  • poésie : À quoi sert la neige ?, poèmes pour enfants, Le Cherche Midi, 2009 - Les Obscurcis, Mercure de France, 2008 - Six poèmes nomades, avec Diane de Bournazel, Al Manar, 2005 - Compassion des pierres, La Différence, 2001 - Où vont les arbres, Mercure de France, 2011

"La langue française me tient lieu de pays"

Elle a écrit le poème À Yasmine pour sa fille. On en trouve deux versions, celle ci semble être le texte original, qu'on trouve dans l'ouvrage référencé, auquel a participé l'auteur ...

À Yasmine

Tu es mon point du jour
mon île colorée en bleu
ma clairière odorante

tu es ma neige volée
mon pétale unique
mon faune bricoleur

tu es ma robe de caresses
mon foulard de tendresse
ma ceinture de baisers

tes gestes moulin à vent
tes cils épis de blé
et le rire se pétrit dans la cuve de ta bouche
tu es mon pain joufflu
ma lisse
un nid

Vénus Khoury-Ghata - source de ce texte vérifié : le livre qui fait suite au Colloque de même titre, "Des femmes et de l'écriture: le bassin méditerranéen" - auteurs : Carmen Boustani, Edmond Jouve, Vénus Khoury-Ghata, éditions Khartala, 2006.

Voici la version modifiée, mais prudence, les deux textes sont en cours de vérification :

À Yasmine *

Tu es mon point du jour
mon île colorée en bleu
ma clairière odorante

Tu es ma neige volée
mon pétale unique
mon faune apprivoisé

Tu es ma robe de caresses
mon foulard de tendresse
ma ceinture de baisers

Tes cils épis de blé
Tes gestes moulin à vent
et l'on pétrit le rire
Dans la cuve de ta bouche

Tu es mon pain dodu
mon nid

Vénus Khoury-Ghata ("Qui parle au nom du jasmin ?", Les Editeurs Français Réunis, 1980, et dans "Anthologie personnelle " - Actes Sud, 1999)

* Yasmine Ghata, née en 1975, est aujourd'hui romancière  ("Muettes", roman, aux éditions Fayard en 2010 - "Le Târ de mon père" Fayard 2007 - "La nuit des Calligraphes, 2004).

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La Basse enfance (extrait)

Ne tournez pas les pages à l’envers
disait ma mère
les mots inversés ont le vertige
l’encre perturbée caille comme un mauvais lait

Les livres que nous feuilletions venaient de la forêt qui nous regardait lire du cri de l’écorce qui se prolongeait sous la peau des pages
Nous lisions dans l’obscurité d’août
quand le cosmos se débarrassait de son excédent d’étoiles

quand la nuit faute de marge se dilatait jusqu’à la nuit.

Vénus Khoury-Ghata ("Anthologie personnelle " - Actes Sud, 1999)

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Ma mère au tronc creux

Ma mère au tronc creux
Aux mains qui se ramifient dans la terre
Ma mère rapiéçait le feu

Mon père chargé de porter le silence
Était devenu pilier

Et la guerre lâchait ses chevaux à nos portes
La mer dans nos lits hennissait

Il y a pleins d'océans vides à louer ...

Vénus Khoury-Ghata

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Source des textes de Vénus Khoury-Ghata reproduits ci-dessous : http://www.printempsdespoetes.com/

La voie lactée ...

La voie lactée mène à l'école
Les enfants l'empruntent soir et matin
Les tabliers au passage frôlent une étoile dormante
Qui crie dans son sommeil
Et jette des étincelles
La Grande Ourse rêve d'une couette
La Petite Ourse rêve d'un jardin
Et de trèfles à quatre feuilles
Le temps est à la somnolence et à la paresse
L'instituteur dort en marchant
Les élèves sont en papier

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À quoi sert l'école ?

À enfermer entre les mêmes murs livres et enfants

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À chaque chose son temps et sa couleur

À chaque chose son temps et sa couleur
Dit le peintre
Et il ajoute une aile jaune à l'écureuil
Le cyprès qu'il peint en noir
Fait des grimaces derrière son dos
La vache est très contente
Elle aime le nuage rose dessiné sur son dos

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À quoi sert un nuage ?

À fondre en pluie dés qu'on l'essore de travers

Vénus Khoury-Ghata ("À quoi sert la neige" - Le cherche midi éditeur - Recueil sélectionné pour le prix poésie jeunesse 2010 Lire et Faire Lire)



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