LANGUE ESPAGNOLE (Europe) - Espagne
Paysages d'Europe
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Espagne
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José Agustín Goytisolo (1928-1999) est un écrivain, traducteur et poète de Catalogne, de langue castillane (espagnol) et catalane.
Poète humaniste, engagé, nombre de ses textes sont chantés par Paco Ibáñez, (l'album 2004 s'intitule Paco Ibáñez canta a José Agustín Goytisolo). Source : Wikipedia.
"Triste es el territorio de la ausencia".
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José Agustín Goytisolo rend ici hommage au poète Antonio Machado (voir ci-dessous) :
Homenage en Collioure
Aquí, junto a la línea
divisoria, este día
veintidós de febrero,
yo no he venido para
llorar sobre tu muerte,
sino que alzo mi vaso
y brindo por tu claro
camino, y por que siga
tu palabra encendida,
como una estrella, sobre
nosotros ¿nos recuerdas? [...]
José Agustín Goytisolo
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Hommage à Collioure
Ici, près de la ligne
frontière, ce vingt-deux février,
je ne suis pas venu
pleurer sur ta mort,
mais lever mon verre
et célébrer* ton clair
chemin, que ta parole
continue à briller,
comme une étoile, sur
nous ; te souviens-tu de nous ? [...]
(adaptation en français : lieucommun) - * brindar, littéralement "trinquer", a été traduit par "célébrer"
José Agustín Goytisolo
Antonio Machado (1875-1939) est un poète espagnol de la Génération de 98, mouvement "Moderniste"
initié par le poète espagnol Rubén Darío. C'est d'ailleurs après sa
rencontre avec Rubén Darío et d'autres poètes comme Verlaine et Paul
Fort, que Machado publie son premier livre de poésies en 1903 : Soledades (Solitudes).
Il
soutient par ses écrits la jeune République Espagnole de 1936, mais La
Guerre civile d'Espagne se termine en 1939 par la victoire des
Nationalistes et la dictature du Général Franco. Contraint de s'exiler
en France, comme des milliers de ses compatriotes, c'est à Collioure
(Pyrénées-Orientales), qu'il meurt, à "trois pas" de la frontière. Là se
trouve sa tombe. (voir ci-dessus, "l'hommage" de Goytisolo).
Machado dort à Collioure
Trois pas suffirent hors d'Espagne
Et le ciel pour lui se fît lourd
Il s'assit dans cette campagne
Et ferma les yeux pour toujours.
Louis Aragon (extrait de "Les poètes") - Texte mis en musique et chanté par Jean Ferrat
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La plaza
La plaza tiene una torre,
la torre tiene un balcón,
el balcón tiene una dama
la dama tiene una flor.
Antonio Machado
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La place
La place a une tour,
la tour a un balcon,
le balcon a une dame,
la dame a une fleur.
(adaptation en français : lieucommun)
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La primavera
La primavera ha venido
nadie sabe cómo ha sido.
Ha despertado la rama
el almendro ha florecido.
En el campo se escuchaba
el gri del grillo.
La primavera ha venido
nadie sabe cómo ha sido.
Antonio Machado
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Le printemps
Le printemps est arrivé
personne ne sait comment.
Il a réveillé les branches
l'amandier a fleuri.
Dans les champs on écoutait
le gri-gri du grillon.
Le printemps est arrivé
personne ne sait comment.
(adaptation en français : lieucommun)
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D'autres poèmes de l'auteur :
Tout passe et tout demeure
Tout passe et tout demeure
mais nous, nous devons passer
passer en traçant des chemins
des chemins sur la mer.
Voyageur, c'est la trace de tes pas
qui est le chemin, et rien d'autre ;
voyageur, il n'y a pas de chemin,
tu fais le chemin en marchant.
...
C'est en marchant que tu fais le chemin
et si tu regardes en arrière
tu vois le sentier
que jamais tu ne fouleras à nouveau.
Voyageur ! Il n'y a pas de chemins
Rien que des sillages sur la mer.
Antonio Machado ("Proverbes et Chansons" - XIV)
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Todo pasa y todo queda (court extrait)
Todo pasa y todo queda,
pero lo nuestro es pasar,
pasar haciendo caminos,
caminos sobre el mar.
...
Caminante son tus huellas
el camino y nada más ;
caminante, no hay camino
se hace camino al andar.
Al andar se hace camino
y al volver la vista atrás
se ve la senda que nunca
se ha de volver a pisar.
Caminante no hay camino
sino estelas en la * mar ...
(adaptation en français : lieucommun)
Antonio Machado ("Proverbios y Cantares" - XIV) - * "mar" peut être masculin ou féminin en espagnol, certaines versions de ce texte peuvent être différentes.
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Un autre passage du même long poème :
Yo amo los mundos sutiles*
Nunca perseguí la gloria
ni dejar en la memoria
de los hombres mi canción ;
yo amo los mundos sutiles,
ingrávidos y gentiles
como pompas de jabón.
Me gusta verlos pintarse
de sol y grana, volar
bajo el cielo azul, temblar
súbitamente y quebrarse.
Antonio Machado ("Proverbes et Chansons" - XIV)
* sutiles : subtils, délicats, fragiles ...
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J'aime les mondes fragiles* (titre proposé)
Je n'ai jamais recherché la gloire
Ni voulu laisser ma chanson
dans la mémoire des hommes ;
Mais j'aime les mondes fragiles,
légers et gracieux
Comme bulles de savon.
J'aime les voir se colorer
de soleil et de pourpre, voler
sous le ciel bleu, trembler
tout-à-coup, et éclater.
(adaptation en français : lieucommun) - * sutiles : subtils, délicats, fragiles ...
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Le soleil est une boule de feu
Le soleil est une boule de feu,
La lune est un disque violet.
Une blanche palombe se pose
Au sommet du cyprès centenaire.
Les parterres de myrtes semblent
fanés et couverts de poussière.
Le jardin et le calme de l'après-midi ! ...
L'eau chante à la fontaine de marbre.
(adaptation en français : lieucommun)
Antonio Machado
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El sol es un globo de fuego
El sol es un globo de fuego,
la luna es un disco morado.
Una blanca paloma se posa
en el alto ciprés centenario.
Los cuadros de mirtos parecen
de marchito velludo empolvado.
¡El jardín y la tarde tranquila!...
Suena el agua en la fuente de mármol.
Antonio Machado
José Ángel Valente est né en 1929. Il a vécu en Grande-Bretagne et en Suisse. Il a reçu le Prix National de Poésie, en 1993.
"Il appartient par son âge à ce qu'il est convenu d'appeler la génération de l'après-guerre civile – la troisième, pour être précis ; autrement dit cette génération de poètes qui publient leurs premiers livres dans les année 50 au moment où naissent les "novisimos", les "tout nouveaux”, qui arrivent à maturité aujourd'hui. C'est dire sa position charnière dans le panorama de la poésie espagnole de ce siècle." Jacques Ancet, Le nouveau dictionnaires des auteurs, Robert Laffont, 1994.
"José Ángel Valente, un des grands poètes du siècle, mystique, mystique de l'immanence, héritier de la tradition espagnole, nous conduit en ces chemins de l'indicible, il nous rapproche du vide, du rien (...), il ouvre ces chambres d'une interminable clarté voilée." (Gaspard Hons, Espace de Libertés, N°205, novembre 1992) - source : la site des éditions Corti, où sont publiés une partie de ses ouvrages : http://www.jose-corti.fr
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Le sud (titre proposé)
LE SUD comme une longue,
une lente démolition.
Le naufrage solaire des corniches
sous l’ombre pourrissante du jasmin.
Rigueur obscure de la lumière.
L’air s’écroule du haut de l’air
qui dissout enfin la pierre en poussière.
Ombre de qui, demandes-tu,
dans les ruelles humides de sel.
Il n’y a personne.
La nuit garde d’aveugles
ruines éteintes, les moisissures
d’un éclat noyé de lune.
La nuit.
Le sud.
José Ángel Valente (extrait de l'anthologie bilingue "Fragmentos rotos, Fragments brisés", traduction de Jacques Ancet, publications de L’Ambassade d’Espagne en France - Andrès Sánchez Robayna, 2007)
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EL SUR como una larga,
lenta demolición.
El naufragio solar de las cornisas
bajo la putrefacta sombra del jazmín.
Rigor oscuro de la luz.
Se desmorona el aire desde el aire
que disuelve la piedra en polvo al fin.
Sombra de quién, preguntas,
en las callejas húmedas de sal.
No hay nadie.
La noche guarda ciegas,
apagadas ruinas, mohos
de sumergida luz lunar.
La noche.
El sur.
José Ángel Valente ("Fragmentos rotos, Fragments brisés", traduction de Jacques Ancet, Ambassade d’Espagne en France - Andrès Sánchez Robayna, 2007) - Recueil original : "Al dios del lugar" *(1989) - *Au dieu du lieu" (mais le recueil a été publié en français sous le titre "Au dieu sans nom", édirions Corti, 1992)
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Canard d’hiver
Pour Antonio
Par-dessus l’eau gelée
le canardeau glissait.
Par-dessus l’eau très dure,
canardeau de lagune.
Dessus le froid de l’eau
sifflait le canardeau.
Sifflant et sifflant il glissait,
et au lieu de pleurer, sifflait.
traduction respectée à deux virgules près (les deux dernières ne sont pas dans la traduction originale) .
José Ángel Valente ("Fragmentos rotos, Fragments brisés") - Recueil original : "Breve son" *(1968) - *Chanson brève
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Pato de invierno
Para Antonio
Por encima del agua helada
el patito se resbalaba.
Por encima del agua dura,
el patito de la laguna.
Por encima del agua fría,
el patito silba que silba.
Silba que silba se resbalaba
y en vez de llorar silbaba.
José Ángel Valente ("Fragmentos rotos, Fragments brisés") - Recueil original : "Breve son" *(1968) - *Chanson brève
Federico García Lorca (1898-1936) est un
poète et auteur de pièces de théâtre espagnol. Il a été l'ami de Luis
Buñuel (cinéaste) et de Salvador Dalí.
Il est mort fusillé au début de la Guerre civile par les troupes rebelles du général Franco.
Le Romancero Gitano (1928) est son recueil de poèmes le plus connu.
"Toutes les choses ont leur mystère, la poésie c'est le mystère de toutes les choses".
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Verde que te quiero verde. Vert, que je t’aime vert.
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Paisaje
La tarde equivocada
se vistÍo de frio.
Detrás de los cristales,
turbios, todos los niños,
ven convertirse en pájaros
un árbol amarillo.
La tarde está tendida
a lo largo del rÍo,
y un rubor de manzana
tiembla en los tejadillos.
Federico García Lorca
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traduction d'André Belamich
Paysage
Par mégarde le soir
S'est habillé de froid.
Derrière les carreaux
Brouillés, tous les enfants
Voient un bel arbre jaune
Se changer en oiseaux.
Le soir s'est allongé
Le long de la rivière.
Et sur les toits frissonne
Une rougeur de pomme.
Federico Garcia Lorca ("Poésies", 1921-1927 - traduction André Belamich)
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Traduction du titre seulement pour la musique de la langue : Orange et citron
Naranja y limón (1)
Naranja y limón
¡Ay de la niña
del mal amor!
Limón y naranja
¡Ay de la niña
de la niña blanca!
Limón
(Cómo brillaba el sol).
Naranja
(En las chinas del agua).
Federico García Lorca
Traduction du titre seulement pour la musique de la langue : Orange et citron
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Agua, ¿dónde vas ?
Agua, ¿dónde vas ?
Riendo voy por el río
a las orillas del mar.
Mar, ¿a dónde vas ?
Río arriba voy buscando
fuente donde descansar.
Chopo, y tú ¿qué harás ?
No quiero decirte nada
yo… ¡temblar!
¿Qué deseo, qué no deseo,
por el río, por el mar ?
¡Cuatro pájaros sin rumbo
en el alto chopo están!
Federico García Lorca
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Eau, où vas-tu ?
Eau, où vas-tu ?
Je vais riant par la rivière
jusqu'aux rivages de la mer.
Mer, où vas-tu ?
Par la rivière je cherche
une fontaine où me reposer.
Peuplier, et toi, qu'est-ce que tu fais ?
Je ne veux rien te dire
moi ... je tremble !
Ce que j'espère, ce que je ne voudrais pas,
par la rivière, par la mer ?
Quatre oiseaux perdus
Sont sur le haut peuplier !
Federico García Lorca
(libre adaptation en français : lieucommun)
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Août
Contrastes de pêche et de sucre,
et le soleil dans l'après-midi
comme le noyau dans un fruit.
L'épi de maïs garde intact
son rire jaune et dur.
Août.
Les enfants mangent
le pain brun et la délicieuse lune.
Federico García Lorca
(libre adaptation en français : lieucommun)
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Agosto
Contraponientes de melocotón y azucar,
y el sol dentro de la tarde,
come el hueso en una fruta.
La panocha guarda intacta
su risa amarilla y dura.
Agosto.
Los niños comen
pan moreno y rica luna.
Federico García Lorca
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Paysage
Le champ d’oliviers
s’ouvre et se ferme
comme un éventail.
Sur l’olivier,
un ciel écroulé
et une pluie obscure
d’étoiles froides.
Au bord de la rivière
tremblent jonc et pénombre.
L’air gris se froisse.
Les oliviers sont lourds de cris :
une troupe
d’oiseaux captifs,
qui remuent leurs très longues
queues dans l’obscurité.
Federico García Lorca (Poème de la séguidille gitane dans "Poèmes du Cante Jondo" - Gallimard 1966)
(Traduction proposée par Lieucommun)
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Paisaje
El campo de olivos
se abre y se cierra
como un abanico.
Sobre el olivar
hay un cielo hundido
y una lluvia oscura
de luceros fríos.
Tiembla junco y penumbra
a la orilla del río.
Se riza el aire gris.
Los olivos
están cargados
de gritos.
Una bandada
de pájaros cautivos,
que mueven sus larguísimas
colas en lo sombrío.
Federico García Lorca (Poema de la seguidilla gitana en "Poemas del Cante Jondo" 1966)
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Papillon du ciel
Papillon du ciel
comme tu es beau,
papillon du ciel
couleur or et vert.
Lumière des lampes,
papillon du ciel,
reste là, reste là !
Tu ne t'arrêtes pas,
Tu ne veux pas t'arrêter.
Papillon du ciel
couleur or et vert.
Lumière des lampes,
papillon du ciel,
reste là, reste là !
reste là !
Papillon, tu es là ?
Federico García Lorca
(Traduction et adaptation proposées par Lieucommun)
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Mariposa
Mariposa del aire,
qué hermosa eres,
mariposa del aire
dorada y verde.
Luz del candil,
mariposa del aire,
¡quédate ahí, ahí, ahí!
No te quieres parar,
pararte no quieres.
Mariposa del aire
dorada y verde.
Luz de candil,
mariposa del aire,
¡quédate ahí, ahí, ahí !
¡Quédate ahí!
Mariposa, ¿estás ahí?
Federico García Lorca (Extrait de la pièce de théâtre "la savetière prodigieuse" ["La zapatera prodigiosa"] )
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La guitare
Commencent les lamentations
de la guitare.
les coupes de l'aube se brisent.
Commencent les lamentations
de la guitare.
Il est inutile
de la faire taire.
Il est impossible
de la faire taire.
C'est une plainte monotone,
comme la plainte de l'eau,
comme la plainte du vent
sur la neige.
Il est impossible
de la faire taire.
Elle pleure sur des choses
lointaines.
Sable du Sud brûlant
qui veut des camélias blancs.
Elle pleure la flèche sans but,
le soir sans lendemain,
et le premier oiseau mort
sur la branche.
Oh guitare !
Coeur blessé à mort
par cinq épées.
Federico García Lorca
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La guitarra
Empieza el llanto
de la guitarra.
Se rompen las copas
de la madrugada.
Empieza el llanto
de la guitarra.
Es inútil callarla.
Es imposible
callarla.
Llora monótona
como llora el agua,
como llora el viento
sobre la nevada
Es imposible
callarla,
Llora por cosas
lejanas.
Arena del Sur caliente
que pide camelias blancas.
Llora flecha sin blanco,
la tarde sin mañana,
y el primer pájaro muerto
sobre la rama
¡ Oh guitarra !
Corazón malherido
por cinco espadas.
Federico García Lorca (Poema del cante jondo - 1921).
Traduction proposée par Lieucommun
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Romance somnambule (deux premières strophes)
Vert, que je t’aime vert.
Le vent vert. Les vertes branches.
Le bateau sur la mer
et le cheval dans la montagne.
Avec l’ombre à la ceinture,
elle rêve à son balcon
verte chair, cheveux verts,
les yeux d’argent glacé.
Vert que je t’aime vert.
Sous la lune gitane
les choses la regardent
et elle, elle ne peut pas les regarder.
Vert que je t’aime vert.
De grandes étoiles de givre,
viennent avec le poisson d’ombre
qui ouvre le chemin de l’aube.
Le figuier frotte son vent
avec la lime de ses branches,
et la colline, chat sauvage
hérisse ses dures agaves .
Mais qui viendra ? Et d’où … ?
Elle est toujours à son balcon
verte chair, chevelure verte,
rêvant de la mer amère.
Federico García Lorca
(Traduction proposée par Lieucommun)
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Romance sonámbulo
Verde que te quiero verde.
Verde viento. Verdes ramas.
El barco sobre la mar
y el caballo en la montaña.
Con la sombra en la cintura
ella sueña en su baranda,
verde carne, pelo verde,
con ojos de fría plata.
Verde que te quiero verde.
Bajo la luna gitana,
las cosas la están mirando
y ella no puede mirarlas.
Verde que te quiero verde.
Grandes estrellas de escarcha
vienen con el pez de sombra
que abre el camino del alba.
La higuera frota su viento
con la lija de sus ramas,
y el monte, gato garduño,
eriza sus pitas agrias.
¿Pero quién vendra? ¿Y por dónde...?
Ella sigue en su baranda,
Verde came, pelo verde,
soñando en la mar amarga.
Federico García Lorca ("Romancero Gitano" - 1928)