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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de GERARD BIALESTOWSKI

- Gérard Bialestowski  -

Gérard Bialestowski (1946-2007), enseignant et auteur pour la jeunesse, a quitté définitivement l'écriture en 2007.
Parmi les ouvrages qu'il a laissés : La Vélocomotive (1986),  Le Prince du château fou (1992), La taupe et la taupe (1996),  Ma langue au tigre (2002), et les recueils cités ci-dessous.

livre_Bialestowski_pieuvreL'oiseau rare

Sur un banc devant la gare
du Nord
j'ai trouvé un oiseau rare
pas un ara en or
un oiseau de parade
ou de paradis
mais un oiseau de Paris
un pi un pi
un pigeon pardi

Gérard Bialestowski ("La pieuvre bricole et autres poèmes" - Milan - Poche cadet, 2000)

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Les rennes

allons enfants de la toundra
voir passer le roi des rennes
il nous apprendra la polka
que l'on danse en Alaska
quand sept jours font une semaine

Gérard Bialestowski (dans le recueil de poèmes de divers auteurs, réunis par Jean-Hugues Malineau, illustrations de Sylvie Selig : "Il était une fois... les animaux" - éditions Messidor La Farandole, 1978)

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le mille-pattes

Même au singulier
je suis au pluriel,
ça épate,
ça épate !
et tandis qu'on s'étonne
je me pelotonne,
ou me carapate
dans le peuplier
ou sous l'arc en ciel,
même au singulier
je suis au pluriel !
 

Gérard Bialestowski ("Au bout de mon râteau" avec des illustrations de Frédéric Rébéna - éditions Albin Michel Jeunesse, 1978)

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La pomme de terre

Quand il fait très froid
à Noël
quand ça exagèle
la pomme de terre
met sa robe décembre
et la tête sous la cendre
alors je me décide
je la pique au bide
je la croque au sel
je lui fais la peau
sans dire un mot
la pomme de s'taire
se mange en silence
même chichécho

Gérard Bialestowski ("Au bout de mon râteau")

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Au chien !

À moi !
À toi !
Aboie !

Tais-toi
toutou têtu !
C'est la l'ouah !

Gérard Bialestowski ("Au bout de mon râteau")

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour d'ALAIN BOSQUET

- Alain Bosquet -

Alain Bosquet  (1919-1998) est le pseudonyme d'Anatole Bisk. C'est un écrivain et poète français d'origine russe.

Le cheval chante

Le cheval chante.
Le hibou miaule.
L'âne gazouille.
Le ruisseau hennit.

- C'est bien, mon enfant : joue avec les mots.

- Le triangle est rond.
La neige est chaude.
Le soleil est bleu.
La maison voyage.

- Tu as de la chance :

les mots sont amicaux
et généreux.

- Le poisson plane.
La baleine court.
La fourchette a des oreilles.
Le train se gratte.

- Je t'avais prévenu :
maintenant les mots te mordent.


Alain Bosquet ("Le cheval applaudit" - Enfance heureuse, éditions Ouvrières, 1977)

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La trompe de l'éléphant

La trompe de l'éléphant,
c'est pour ramasser les pistaches :
pas besoin de se baisser.

Le cou de la girafe,
c'est pour brouter les astres :
pas besoin de voler.

La peau du caméléon,
verte, bleue, mauve, blanche,
selon sa volonté,
c'est pour se cacher des animaux voraces :
pas besoin de fuir.

La carapace de la tortue,
c'est pour dormir à l'intérieur,
même l'hiver :
pas besoin de maison.

Le poème du poète,
c'est pour dire tout cela
et mille et mille et mille autres choses :
pas besoin de comprendre.

Alain Bosquet ("Le cheval applaudit" - Enfance heureuse, éditions Ouvrières, 1977)

logo_cr_ation_po_tiqueLe... c'est ... (c'est pour) ...

En s'inspirant librement de la structure de ce joli poème réaliste d'Alain Bosquet,  jouons avec les particularités des animaux en glissant un peu vers le fabuleux, le facétieux, l'invraisemblable. On obtiendra certainement quelques sourires :
La trompe de l'éléphant, c'est pour que les singes fassent de la balançoire.
La poche du kangourou, c'est pour ranger son pyjama.

Les dents du requin  c'est ... / La langue du serpent ... / Les griffes du chat / La bosse du chameau /Les plumes du paon, etc.

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1 avril 2008

PP 09 : l'humour d'ANDRÉ BRETON - Surréalisme et Cadavre exquis

- André Breton et le Surréalisme -

po_sie_Andr__Breton_portrait

<< portrait du poète par Victor Brauner (1934) - André Breton (1896-1966) définit ainsi le mouvement surréaliste : "Automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée ". (Manifeste du surréalisme de 1924).

Même s'il n'est pas directement le créateur du cadavre exquis, Breton est l'un des inspirateurs et des pratiquants de cette forme de création surréaliste "classique", très représentative de l'esprit du mouvement et qu'il définit plus bas.

André Breton est l'inventeur d'une autre forme de création littéraire surréaliste : l'écriture automatique.
"Écrivez vite sans sujet préconçu, assez vite pour ne pas retenir et ne pas être tenté de vous relire. La première phrase viendra toute seule, tant il est vrai qu'à chaque seconde il est une phrase étrangère à notre pensée consciente qui ne demande qu'à s'extérioriser. ". (A. Breton - Manifeste du Surréalisme - 1924).

Il est l'auteur de l’Anthologie de l’Humour noir (écrit en 1940, édité en 1945, 1950 et 1966, avec des modifications de contenu, et réédité au Livre de Poche). D'autres oeuvres : Nadja (1928), Les Vases communicants (1932), L'Amour fou (1937).

po_me_Andr__Breton_Ile<< Île

André Breton

Île est un poème-titre, ou un titre-poème, constitué de ce seul mot qui apparaît pleine page en vertical, comme sur l'image, dans le recueil "Clair de terre" (1923, réédition 1978 en Poésie-Gallimard).

Dans  La poésie (Armand Colin éditeur, 1988), Jean-Louis Joubert explique : "Ce n'est pas tellement le mot en lui-même que sa situation dans un poème qui possède une valeur poétique. Rien n'empêche qu'un poème soit composé d'un seul mot. C'est le cas du poème "Île" [...] Mais le choix d'un corps de caractères géants, leur recherche typographique, la disposition du mot verticale et de bas en haut, arrache "Île" à la langue commune pour en faire un mot-objet mystérieux [...] "

logo_cr_ation_po_tique Poème objet :

Pour les élèves, le sens de ce poème objet d'André Breton n'apparaît pas évident.

On peut proposer à la classe un exercice dérivé plus abordable, parent du calligramme. L'élève choisit un mot objet qui lui plaît et le représente pour en exprimer sa perception personnelle (par graphisme, typo ordinateur, collage, peinture, modelage, sculpture...) en deux ou trois dimensions en jouant sur les formes, tailles, couleurs  des caractères, et leur disposition (les lettres ne seront pas forcément alignées et de même format).

  • Variantes :
  1. Même démarche avec une courte phrase, un haïku.  Illustrer éventuellement l'environnement de l'écrit. 
  2. Proposer aux élèves d'élémentaire le dessin du mot dans une forme qui le représente.

Exemples à venir avec d'autres auteurs, voir le sommaire de la création poétique en haut de page.

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Le Cadavre exquis

À l'initiative de Jacques Prévert, Marcel Duhamel et Yves Tanguy et avec André Breton, c'est l'un des exercices de création spontanée auquel se sont livrés les surréalistes. André Breton le définit ainsi dans son "Dictionnaire abrégé du surréalisme" :
"jeu de papier plié qui consiste à faire composer une phrase ou un dessin par plusieurs personnes, sans qu’aucune d’elles puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes".
L’exemple qui a donné son nom au jeu, tient dans la première phrase obtenue de cette manière : "Le cadavre/exquis/boira/le vin/nouveau".
L'exercice s'appliquera au texte, au dessin, et plus tard au cinéma, et connaît actuellement une nouvelle évolution  avec Internet.

logo_cr_ation_po_tique Le "Cadavre exquis" (sous sa forme écrite)
Principe : Le matériel : une feuille A4 pliée en autant de parties que d'intervenants, de manière à empêcher la lecture directe des éléments, mais à permettre une lecture (linéaire) de la production finale une fois dépliée.

Le jeu du Cadavre exquis suppose une maîtrise par les élèves de la structure de la phrase.
On décidera du type de phrase à créer, suivant le niveau de difficulté souhaité :
Phrase déclarative minimale
Sujet + Verbe ou phrase simple S+V+ Complément(s).

1.   Le groupe nominal sujet est singulier ou pluriel et le groupe verbal s'accordera en conséquence.

  • groupe sujet minimal, avec nom seul ou déterminant + nom  ex : Anna*,  l'oiseau - mon vélo
  • enrichi d'un qualificatif, ex : l'oiseau bleu - mon vieux vélo
  • d'un complément du nom, ex : un ballon de rugby - la table à repasser
  • ou d'un ensemble, ex : un vieux ballon de rugby en bois* (encourager déjà le décalage interne du groupe)

2.   Le groupe verbal sera conjugué au singulier ou au pluriel, selon le choix précédent.

  • Le verbe sera un verbe d'action, non pronominal, conjugué à la voix active, au passé ou au futur simple de préférence, plutôt qu'au présent.
  • Les verbes les plus intéressants sont les verbes transitifs (trouver - manger - regarder) qu'on peut ou qu'on doit faire suivre d'un groupe COD et d'un ou de plusieurs groupes Compléments Circonstanciels  (temps, lieu, manière...). Les verbes intransitifs (dormir,  seront bannis

3.   Le groupe complément

  • Le COD qui suit le verbe transitif direct est un groupe nominal qui peut être enrichi, comme le groupe nominal sujet, et par conséquent interchangeable :

ex : l'oiseau bleu / construira / la pluie de novembre ou la pluie de novembre / construira / l'oiseau bleu 

  • Les groupes Compléments Circonstanciels  (temps, lieu, manière, conséquence, cause, but...). Il peut y en avoir plusieurs, à se répartir dans le groupe de travail selon le nombre d'élèves.

ex : l'oiseau bleu / construira / la pluie de novembre /  à Noël / parce qu'il* (elle) a perdu ses clés

* l'accord en genre et en nombre et les corrections se feront collectivemant dans la phrase définitive retenue.

La forme poétique de la création apparaîtra avec le choix des productions (retenir les plus amusantes, les plus originales, les plus étonnantes ...)
On pourra proposer l'association des phrases créées, pour une mise en texte.

  • Variantes :
  1. Cadavre exquis minimum : Comme l'ont pratiqué les surréalistes, on peut scinder en unités minimum sur le schéma simple GS + V + COD, en séparant le nom de l'adjectif (le cadavre/exquis/ boira/le vin/nouveau)
  2. Le dialogue surréaliste : Pratiqué par les surréalistes, il consiste à construire séparément (deux  intervenants seulement ici) un dialogue question-réponse sur le modèle "Qu'est-ce que .../c'est..." exemple surréaliste : "Qu'est-ce que la volupté de vivre / C'est une bille dans la main d'un écolier"). Au niveau collège ou lycée, un troisième intervenant pourrait ajouter une formule commençant par "puisque ... ex : "Qu'est-ce qu'un arc-en-ciel après la pluie ?/c'est un parking de supermarché désert,/puisqu'on a fermé les fenêtres." (essai Lieucommun). Il faudra certainement intervenir à postériori pour produire des phrases grammaticalement correctes.
  3. On pourra inventer d'autres constructions : "Si les oiseaux ont des ailes/c'est parce qu'il n'y a plus de sable dans le désert". D'autres modèles sont possibles avec même si..., pourtant...etc.

"Cadavre exquis" en arts plastiques  

Cadavre_exquis_dessin_3Reprenons la définition d'André Breton : "jeu de papier plié qui consiste à faire composer [une phrase ou] un dessin par plusieurs personnes, sans qu’aucune d’elles puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes"...

<< Cadavre exquis vertical sur le thème de la maison bizarre. On repérera les pliures (expérience du groupe MSA).

 Principe : La feuille, format A2, A3 ou A4 suivant le projet, sera pliée en 3 ou en 4 parties égales. Le thème général est proposé, par exemple, pour rester dans le domaine qui nous intéresse : monstres,  véhicules bizarres, construction étonnantes... On précisera éventuellement s'il s'agit de créer un objet "unique" (exemple ci-contre) ou pluriel, au final. Le sujet pourra être libre. (l'exemple n°1  est une création récente empruntée au site ex-bones.com )

cadavre_exquis_dessin_exemple_1Le pliage sera horizontal si le thème  s'y prête, mais il est  en général vertical. Un personnage bizarre, par exemple, peut associer trois créations différentes : une pour la tête, une pour le "tronc" et les bras (ou ce qui en tient lieu s'il y en a) et une troisième pour les membres inférieurs.

Consignes de réalisation : produire, pour le premier intervenant, un dessin en prolongeant les tracés de manière qu'ils apparaissent un peu au-delà de la pliure, sans dévoiler la réalisation. Le deuxième élève devra utiliser cette arrivée de tracé comme départ pour sa propre production graphique, sans avoir pris connaissance de la précédente. Idem pour les intervenants suivants. Le dernier tient compte simplement du fait qu'il termine l'œuvre collective.

cadavre_exquis_collage_BretonOn obtiendra une fois la feuille dépliée une réalisation qui pourra faire l'objet d'un travail de mise en couleurs, surfaces, collages... Le passage d'une partie à l'autre, toujours difficile, pourra aussi  être repris pour la cohérence de l'ensemble, si c'est le but recherché.

NB : Les élèves travaillant sur un même projet seront séparés les uns des autres, pour ne pas avoir à se cacher des regards pendant la réalisation.

  • Variantes : Le collage de papiers déchirés ou découpés se prête parfaitement à l'exercice (le modèle n°2 est un collage créé par André Breton, Jacqueline Lamba  et Yves Tanguy en 1938) . 

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de MAURICE CARÊME

- Maurice Carême -

Merci à la Fondation Maurice Carême

À la suite du message reçu signalant de nombreuses erreurs, les textes ont été corrigés dans cette page (*les corrections sont signalées)

Maurice Carême, instituteur belge (1899-1978) est présent dans chaque cahier de poésie des élèves de France et de Navarre (et de Belgique bien sûr), et ses textes se baladent un peu partout sur le blog. Explorez les catégories !

Avez-vous vu ?

Avez-vous vu le dromadaire
Dont les pieds ne touchent pas terre ?

Avez-vous vu le léopard
Qui aime loger dans les gares ?

Avez-vous vu le vieux lion
Qui joue si bien du violon ?

Avez-vous vu le kangourou
Qui chante et n'a jamais le sou ?

Avez-vous vu l'hippopotame
Qui minaude comme une femme ?

Avez-vous vu le perroquet
Lançant très haut son bilboquet ?

Avez-vous vu la poule au pot
Voler en rassemblant ses os?

Mais moi, m'avez-vous bien vu, moi,
Que personne jamais ne croit ?

Maurice Carême

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Fantaisie

L'homme habitait un quart de pomme ;
La femme, un huitième de poire.
Leur vieille cousine Opportune
Vaquait dans une demi-prune.
Il y avait monsieur Léon
Qui débordait d'un gros citron
Et sa soeur, madame Émérence,
Qui emplissait toute une orange.
Quant à moi, chétive fillette,
Je tenais dans une noisette
Et, comme je n'étais pas grosse,
Il arrivait, les jours de fête,
Que je m'y déplace en carrosse.

Maurice Carême

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Mon petit chat

J’ai un petit chat,
Petit comme ça.
Je l’appelle Orange.

Je ne sais pourquoi
Jamais il ne mange
Ni souris ni rat.

C’est un chat étrange
Aimant le nougat
Et le chocolat.

Mais c’est pour cela,
Dit tante Solange,
Qu’il ne grandit pas !

Maurice Carême ("La lanterne magique" - éditions Ouvrières, 1947)

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L’ogre

J’ai mangé un œuf
Deux langues de bœuf
Trois rôtis de mouton
Quatre gros jambons
Cinq rognons de veau
Six couples d’oiseaux
Sept immenses tartes
Huit filets de carpe
Neuf kilos de pain
Et j’ai encore faim
Peut-être ce soir
Vais-je encore devoir
Manger mes deux mains
Pour avoir enfin
Le ventre bien plein.

Maurice Carême ("L'Arlequin" -  éditions Fernand Nathan, 1970)
Voir aussi les comptines numériques plus bas.

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Trois escargots

J'ai rencontré trois escargots
Qui s'en allaient cartable au dos
Et dans le pré trois limaçons
Qui disaient par cœur leur leçon.
Puis dans un champ, quatre lézards
Qui écrivaient un long devoir.
Où peut se trouver leur école ?
Au milieu des avoines folles ?
Et leur maître est-il ce corbeau
Que je vois dessiner là-haut
De belles lettres au tableau ?

Maurice Carême

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Un poème pour mémoriser une règle d'orthographe en s'amusant :

Le hibou

Caillou, genou, chou, pou, joujou, bijou,
Répetait sans fin le petit hibou .

Joujou, bijou, pou, chou, caillou, genou
Non, se disait-il, non, ce n' est pas tout.

Il y en a sept pourtant, sept en tout :
Bijou, caillou, pou, genou, chou, joujou.

Ce n' est ni bambou, ni clou, ni filou
Quel est donc le septième ? Et le hibou,

La patte appuyée au creux de sa joue,
Se cachait de honte à l'ombre du houx.

Et il se désolait, si fatigué
Par tous ses
* devoirs de jeune écolier

Qu' il oubliait, en regardant le ciel
Entre les branches épaisses du houx
**

Que son nom, oui, son propre nom, hibou,
Prenait, lui aussi, un X au pluriel.

Maurice Carême / corrections :  "des devoirs" (faute de frappe) remplacé par "ses devoirs - ** dernière strophe détachée

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Ce qui est comique

Savez-vous ce qui est comique ?
Une oie qui joue de la musique,
Un pou qui parle du Mexique,
Un bœuf retournant l'as de pique,
Un clown qui n'est pas dans un cirque,
Un âne chantant
tout *  un cantique,
Un loir champion olympique.
Mais ce qui est le plus comique,
C'est d'entendre un petit moustique
Répéter son arithmétique.

Maurice Carême / correction :  *suppression de "tout"

logo_cr_ation_po_tique "Savez-vous ce qui est comique...?"

Imaginer encore (les rimes en ique sont nombreuses), ce qui peut être comique.

Construire d'autres poèmes avec ce qui est amusant (rimes simples encore plus nombreuses) ; ce qui est drôle, et puis toujours avec humour, ce qui est agaçant, énervant, insupportable, étonnant, possible ou impossible, incroyable, inadmissible, etc.

Ici encore on pourrait imaginer un genre de Cadavre exquis (voir André Breton plus haut) en deux étapes pour les vers du poème (dans l'exemple, la séparation est indiquée par / ), en respectant la  rime dans la seconde partie du vers  (avec les élèves plus grands on peut même décider du nombre de syllabes de chaque partie). On gardera le maximum de productions correctes en réorganisant peut-être le poème et on imaginera collectivement la chute, si chute il y a ("Mais ce qui est le plus agaçant... c'est ...")

ex : Ici, avec "Ce qui est agaçant", on a essayé d'imaginer, sans savoir quel serait le sujet, des situations en rapport avec le thème. Dans la consigne, si on ne décide pas du singulier ou du pluriel (ça laisse plus de champ), on accordera grammaticalement lors de la mise au point, dans chaque doublette de Cadavre exquis ou en grand groupe  :

Un kangourou / qui vous fait perdre votre temps
Une tortue  / qui ne se lave pas les dents
Une fleur fanée  / qui prend son bain en chantant ...

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Deux petits éléphants

C’était deux éléphants
Deux petits éléphants tout blancs.

Lorsqu’ils mangeaient de la tomate
Ils devenaient tout écarlates.

Dégustaient-ils un peu d’oseille,
On les retrouvait vert bouteille.

Suçaient-ils une mirabelle,
Ils passaient au jaune de miel.

On leur donnait alors du lait,
Ils redevenaient d’un blanc frais
*.

Mais on les gava, près d’Angkor,
Pour le mariage d’un raja,

D’un grand** sachet de poudre d’or.
Et ils brillèrent, ce jour-là,

D’un tel éclat que plus jamais,
Même en buvant des seaux de lait,
***

Ils ne redevinrent tout blancs,
Ces jolis petits éléphants.

Maurice Carême ("Pomme de reinette" - Fondation Maurice Carême, 1962) / corrections : * ce vers remplace le vers erroné :  "ils devenaient d'un blanc tout frais" ** le mot "grand" avait été oublié - *** il faut une virgule en fin de vers.

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L'heure du crime

Minuit. Voici l'heure du crime.
Sortant d'une chambre voisine,
Un homme surgit dans le noir.

Il ôte ses souliers,
S'approche de l'armoire
Sur la pointe des pieds
Et saisit un couteau
Dont l'acier luit, bien aiguisé.

Puis, masquant ses yeux de fouine
Avec un pan de son manteau,
Il pénètre dans la cuisine
Et, d'un seul coup, comme un bourreau
Avant que ne crie la victime,
Ouvre le cœur d'un artichaut.

Maurice Carême ("Au clair de la lune" - éditions Hachette, Le Livre de Poche jeunesse, 2003)

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de BLAISE CENDRARS

- Blaise Cendrars -

Blaise Cendrars (1887-1961), poète suisse, puis français, "fut le poète de la Fête et de l'Aventure" (JP Rosnay).

Nous ne voulons pas être tristes

Nous ne voulons pas être tristes
C'est trop facile
C'est trop bête
C'est trop commode
On en a trop souvent l'occasion
C'est pas malin
Tout le monde est triste
Nous ne voulons plus être tristes.

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Rire

Je ris
Je ris
Nous rions
Plus rien ne compte
Sauf ce rire que nous aimons
Il faut savoir être bête et content.

Blaise Cendrars ("Sud-américaines", 1924  et "Poésies complètes" - Denoël, 2001)

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livre_Cendrars_oiseau_bleu

L’oiseau bleu

Mon oiseau bleu a le ventre tout bleu
Sa tête est d’un vert mordoré
Il a une tache noire sous la gorge
Ses ailes sont bleues avec des touffes de petites plumes jaune doré
Au bout de la queue il y a des traces de vermillon
Son dos est zébré de noir et de vert
Il a le bec noir, les pattes incarnat et deux petits yeux de jais
Il adore faire trempette, se nourrit de bananes et pousse un cri
Qui ressemble au sifflement d’un petit jet de vapeur
On le nomme le septicolore.


Blaise Cendrars (première parution dans le recueil "Feuilles de route", Au Sans Pareil, 1924 / puis aux éditions Denoël, 1970 / et ce poème constitue le texte de "L'oiseau bleu" - Rue du Monde, collection "Petits Géants", 2001, illustrations de Nathalie Novi - voir image ci-dessus)

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1 avril 2008

PP 09 : L'humour d'ANNE-MARIE CHAPOUTON

- Anne-Marie Chapouton -

Anne-Marie Chapouton (1939-2000) est une auteure de poésies, de contes, d'ouvrages pédagogiques et de romans pour les enfants et la jeunesse ("Poèmes petits", "1, 2, 3, comptines à compter", "La vache Amélie", " Méthode de lecture CP-CE1", etc).

Deux poèmes dans deux recueils différents d'Anne-marie Chapouton, pour le même animal, la tortue :

Tortue  (sans titre, ce titre est proposé par le blog) 

Tortue, je t'observe.
Tu restes tapie
sous ta carapace,
puis, timidement,
tu sors ta tête.
Et tu attends
que les fruits mûrs
tombent tranquillement
sous l'arbre fruitier.
Tu es gourmande !
Le sais-tu, tortue ?

Anne-Marie Chapouton (Mon ABC en comptines - Père Castor - Flammarion, 1999)

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Quand on est tortue

Quand on est tortue,
On peut rentrer la tête
Sous sa carapace
Quand vient la pluie.

Alors on peut rêver
À l'abri,
Et repartir
À petits pas
Jusqu'à l'herbe prochaine
Qu'on atteindra
Ce soir...
Demain...
Ou même un peu plus tard...

Pas de problème
De retard !
Quand on est tortue,
On a toujours le temps
De vivre lentement !

Anne-Marie Chapouton ("Comptines pour les enfants bavards" - Père Castor, Flammarion)

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La pluie

Gouttelette
rondelette
tombée
sur mon nez
piquelette
sur ma tête
voici mon amie
la pluie
chansonnette
doucelette
trottinant
chante la pluie
dans le vent.

Anne Marie Chapouton

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Rêve 4 (c'est sous ce titre qu'il apparaît dans le recueil, il y a 3 autres poèmes-rêves qui précèdent)

J'ai vu
trois châteaux
se promenant
lalaire
se promenant
dans les airs

puis je n'ai
plus rien vu
lalaire
plus rien vu
car ils étaient
redescendus

Anne-Marie Chapouton ("Poèmes petits" - Delagrave, 1999)

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1 avril 2008

PP 09 : l'humour de JACQUES CHARPENTREAU

- Jacques Charpentreau -

Jacques Charpentreau (né en 1928), est un poète français. Il est l'auteur d'anthologies, aux éditions Ouvrières, qui ont fait connaître beaucoup de poètes pour la jeunesse, et il a publié de nombreux recueils. Quelques-unes de ses poésies sont présentes sur le blog. 

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Dans son recueil "Poèmes pour peigner la girafe", Jacques Charpentreau présente avec fantaisie et humour des poèmes  à base d'expressions communes.  Il y en a 20 en tout dans ce beau livre grand format illustré par Florence Koenig. En voici quelques uns.

Les beaux métiers (expression : peigner la girafe)

Certains veulent être marins,
D'autres ramasseurs de bruyère,
Explorateurs de souterrains,
Perceurs de trous dans le gruyère,

Cosmonautes, ou, pourquoi pas,
Goûteurs de tartes à la crème,
De chocolat et de babas :
Les beaux métiers sont ceux qu'on aime.

L'un veut nourrir un petit faon,
Apprendre aux singes l'orthographe,
Un autre bercer l'éléphant...
Moi, je veux peigner la girafe !

Jacques Charpentreau ("Poèmes pour peigner la girafe" - Éditions Gautier-Languereau, 1996)

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La chevauchée (expression : monter sur ses grands chevaux)

Certains, quand ils sont en colère,
Crient, trépignent, cassent des verres...
Moi, je n'ai pas tous ces défauts :
Je monte sur mes grands chevaux.

Et je galope, et je voltige,
Bride abattue, jusqu'au vertige
Des étincelles sous leurs fers,
Mes chevaux vont un train d'enfer.

Je parcours ainsi l'univers,
Monts, forêts, campagnes, déserts...
Quand mes chevaux sont fatigués,
Je rentre à l'écurie calmé.

Jacques Charpentreau ("Poèmes pour peigner la girafe" - Éditions Gautier-Languereau, 1996)

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La clé des champs (expression : prendre la clé des champs)

On a perdu la clé des champs!
Les arbres, libres, se promènent,
Le chêne marche en trébuchant,
Le sapin boit à la fontaine.

Les buissons jouent à chat perché,
Les vaches dans les airs s'envolent,
La rivière monte au clocher
Et les collines cabriolent.

J'ai retrouvé la clé des champs
Volée par la pie qui jacasse.
Et ce soir au soleil couchant
J'aurai tout remis à sa place.

Jacques Charpentreau ("Poèmes pour peigner la girafe" - Éditions Gautier-Languereau, 1996)

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La lessive (expression : laver son linge sale en famille)

Chaque semaine, mes parents,
Cinq tantes, dix oncles, vingt nièces,
Cent cousins, des petits, des grands,
Se pressent dans la même pièce.

Dans la machine, ils introduisent
Mille corsages et chemises,
Cent mille slips et pyjamas,
Un million de paires de draps.

Nylon, dentelles ou guenilles,
Chaque semaine nous avons
Cette habitude : nous lavons
Notre linge sale en famille.

Jacques Charpentreau ("Poèmes pour peigner la girafe" - Éditions Gautier-Languereau, 1996)

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L'île des rêves (expression : nager dans ses vêtements)

Il a mis le veston du père,
Les chaussures de la maman
Et le pantalon du grand frère
Il nage dans ses vêtements.

Il nage, il nage à perdre haleine.
Il croise des poissons volants,
Des thons, des dauphins, des baleines...
Que de monde, dans l'océan!

Écume blanche et coquillages,
Il nage depuis si longtemps
Qu'il aborde enfin au rivage
Du pays des rêves d'enfants.

Jacques Charpentreau ("Poèmes pour peigner la girafe" - Éditions Gautier-Languereau, 1996)

logo_cr_ation_po_tique Avec les expressions populaires :

On cherchera toutes les expressions populaires imagées possibles (dictionnaires, recueils). À l'exemple de Jacques Charpentreau, mais sans livrer aux élèves tout l'éventail poétique (le livre sera intéressant à présenter après coup), on construira une poésie, racontant une petite histoire si possible tordue.
Expressions imagées : rire sous cape, manger au lance-pierres, sauter un repas, dévorer un livre, dormir debout, le silence est d'or (la parole est d'argent, mais...), tomber des nues ...

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La réunion de famille

Ma tante Agathe
Vient des Carpates
À quatre pattes

Mon oncle André
Vient de Niamey
À cloche-pied

Mon frère Tchou
Vient de Moscou
Sur les genoux

Ma sœur Loulou
Vient de Padoue
À pas de loup

Grand-mère Ursule
Vient d’Ashtabule
Sur les rotules
Grand-père Armand
Vient de Ceylan
En sautillant

Ma nièce Ada
Vient de Java
À petits pas

Mon neveu Jean
Vient d’Abidjan
Clopin-clopant

Oncle Firmin
Vient de Pékin
Sur les deux mains

Mais tante Henriette
Vient à la fête
En bicyclette

Jacques Charpentreau (dans son anthologie "La nouvelle Guirlande de Julie"- éditions Ouvrières,1976)

logo_cr_ation_po_tique Avec les prénoms:

En s'inspirant du poème ci-dessus, associer les prénoms de la classe à des noms de lieux (villes, pays) connus des élèves, à diverses activités ou occupations, ou encore comme dans l'exemple 3, imaginer un texte sur un thème (cadeaux, collections ...) 

Exemple 1 :

Mes projets de voyage 

Je partirai au Sahara sur mon chameau* avec Emma
Je visiterai l'Australie en kangourou avec Lucie,
etc.
* D'accord,  il n'y a pas de chameaux mais des dromadaires au Sahara, mais bon, pour une fois ...

Exemple 2 :

Le métier de mes amis

Dimitri découpe les confettis
Mariam tricote des bananes
etc.

Exemple 3 :

Le Père Noël bizarre
(bien entendu, c'est lui qui raconte)

J'ai cueilli des radis pour Annie
des rideaux et des radeaux pour Anna

J'ai trouvé un pantin persan pour Marie
un tapis percé pour Myriam.

J'ai acheté un lapin de Noël pour Ali
un sapin de soleil pour Célia

J'ai cherché les étoiles pour des prunes
mais j'ai décroché la lune
pour toi ...

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Le laveur de carreaux

Suspendu comme une araignée
Au bout de son fil argenté
Le laveur de carreaux descend
Du haut de la tour. En passant,
Il dit bonjour aux habitants :

30 Le monsieur du trentième étage
Qui ne mange que du fromage.

29 Celui de l’étage au-dessous
Qui n'aime que la soupe aux choux.

28 Les gens qui viennent de Pluton
Et marchent les pieds au plafond

27 Le baryton de l’opéra
Qui se fait des oeufs sur le plat.

26 Ceux qui ont semé du gazon
Pour rendre plus gai leur béton.

25 Ceux qui élèvent des lapins
Sur l’herbe d’un salon de jardin.

24 Ceux qui ont mis dans leur baignoire
Un bébé phoque blanc et noir.

23 Le chat qui vit seul, noir et blanc,
(Il a dû louer l’appartement).

22 Le vieil Auvergnat à moustaches
Qui che regarde dans la glache.

21 Le militaire en permission
Qui compte ses décorations.

20 La foule du vingtième étage
C'est la réception d'un mariage.

19 La receveuse de la poste
Qui ne grignote que des toasts.

18 L’académicien nostalgique
Qui s'amuse au train électrique.

17 L'élève de Napoléon
Qui range ses soldats de plomb.

16 Le collectionneur de timbales
Qui joue du violon à pédales.

15 Un abbé qui fait du trapèze
Sur un bâton entre deux chaises.

14 L’amateur de scie musicale
Qui coupe l’Internationale

13 Le passionné d’exploration
Qui chasse le tigre au salon

12 Deux bustes de marbre au nez grec
Qui contemplent un jeu d’échecs.

11Un athlète en maillot de corps
Qui s'est allongé et qui dort .

10 La dame du dixième étage
Qui garde un sapajou en cage.

9 Plus bas une belle famille
Les parents et quatorze filles.

8 Des campeurs chantant à mi-voix
En rond autour d’un feu de bois


7 Un grand polytechnicien morne
Qui ne porte que son bicorne.

6 Un peu plus bas un éléphant
Prisonnier dans l’appartement.

5 Un couple se bat au cinquième
À coup de tartes à la crème.

4 La petite fille aux yeux bleus
Qui a les yeux verts quand il pleut.

3 La jeune fille du piano,
Qui se tricote un allegro.

2 La dentiste qui vient d’extraire
Une redoutable molaire.

1 Le petit garçon du premier
Qui fourre ses doigts dans son nez.

0 Tout est vide au rez-de-chaussée
La concierge est dans l’escalier.

On voit les secrets de la ville
Quand on descend au bout d’un fil.

Jacques Charpentreau ("La ville enchantée" - éditions de l'École, 1976)

logo_cr_ation_po_tique Poèmes à la manière de "Le Laveur de carreaux" 

La structure répétitive de ce texte découpé en paires de vers rimés suscite des expériences intéressantes. Par exemple ici :
http://alain.digiovanni.free.fr/print1.htm

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Le batteur-mixeur

Mixe mixe rage
pour faire du fromage

Mixe mixe à l'aise
pour la mayonnaise

Mixe mixe au net
pour la vinaigrette

Mixe mixe reine
pour faire de la crème

Mixe mixe tout
pour la pâte à choux

Mais pour faire une omelette
je la bats à la fourchette.

Jacques Charpentreau ("La ville enchantée" - éditions de l'École, 1976) - Ce texte, récité, existe aussi en livret-CD ("Poèmes de la ville enchantée Vol 1" - Benjamins Media, 2000) avec d'autres poèmes de l'auteur.

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La soupe de la sorcière

Dans son chaudron la sorcière
Avait mis quatre vipères
Quatre crapauds pustuleux
Quatre poils de barbe-bleue
Quatre rats, quatre souris
Quatre cruches d’eau croupies
Pour donner un peu de goût
Elle ajouta quatre clous

Sur le feu pendant quatre heures
Ça chauffait dans la vapeur
Elle tourne sa tambouille
Et touille et touille et ratatouille
Quand on put passer à table
Hélas c’était immangeable
La sorcière par malheur
Avait oublié le beurre

Jacques Charpentreau

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Une poésie-comptine avec les notes de la gamme (voir aussi plus haut les COMPTINES)

Au bois de Panama

Chaque jour à midi,
do, ré, mi,
Au bois de Panama
ré, mi, fa,
En sortant de l'école,
mi, fa, sol,
Sur un grand acacia,
fa, sol, la,
Sans cesse et sans souci,
sol, la, si,
Chante un petit oiseau,
do, ré, mi, fa, sol, la, si, do !

Jacques Charpentreau ("Poésie en jeu" - éditions Ouvrières, 1981)

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Panne d'imagination

Que voulez-vous que je vous dise ?
Moi, je ne sais pas inventer.
Je vous propose, sans surprise,
Quelques vieilles banalités:
L'arbre à chansons qui chaque été
Fredonne pour vous dans la brise,
L'auto à vent, l'avion à thé,
Le stylo spécial pour dictées
Qui sait écrire sans sottises
(Ou cent sottises entêtées),
Le sèche-océan breveté
Pour vous baigner à votre guise
(L'eau sèche est bonne à la santé),
La chaise en noyaux de cerises,
La Tour Eiffel à tricoter,
Le chauffage de la banquise,
Le prie-dieu pour Mont-de-Piété,
Un manège à chevaux de frise,
Du beurre à l'électricité,
Le soleil couchant en chemise,
La bicyclette à barboter,
Un diplôme de gourmandise,
Le cordonnier du Chat botté,
La bouée chantante de Venise...
Moi, je ne sais pas inventer.

Que voulez-vous que je vous dise ?
Moi, je ne sais pas raconter,
Au lieu d'écrire des sottises,
Je dis ce que j'ai constaté,
Car il suffit de regarder:
Le kangourou prend sa valise,
Sa pipe, sa corde à sauter,
Il part pour l'Université
Apprendre à parler le kirghize,
Ca peut servir en société
Autant qu'un bon piano-forte.
Il rencontre près de l'église
Une puce bien cravatée
Qui lui déclare : Je t'avise
Que je bondis, en vérité,
Plus haut que toi et ta valise.
Quand le kangourou, irrité,
Sauta comme un furieux en crise,
La puce, avec vivacité
Sur son bout de nez s'étant mise,
N'eut pas de mal à ressauter
Plus haut que lui. Quelle suprise !
Mais vois, vous l'aviez deviné,
Que voulez-vous que je vous dise ?
Moi, je ne sais pas inventer.

Jacques Charpentreau (autre anthologie : "La poésie comme elle s'écrit" - éditions Ouvrières, 1979)

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Le mille-pattes

Chez le plus grand chausseur se fournit le mille-pattes,
Un excellent client : cinq cent paires de souliers,
Des blancs, des bleus, des noirs, des chaussures disparates.
Hélas il n'a pas pu en trouver pour tous ses pieds,
Car il restait quatre cent quatre-ving-dix-neuf paires.
En allant chez sa belle, il pleure et se désespère,
Le mille-pattes qui boite, boite, boite, boite ...

Jacques Charpentreau ("La poésie dans tous ses états" - éditions Ouvrières, 1984)

 

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La mer s'est retirée

La mer s’est retirée,
Qui la ramènera ?
La mer s’est démontée,
Qui l’a remontera ?
La mer s’est emportée,
Qui la rapportera ?
La mer est déchaînée,
Qui la rattachera ?
Un enfant qui joue sur la plage
Avec un collier de coquillages.

Jacques Charpentreau (encore une anthologie : "Poèmes d'aujourd'hui pour les enfants de maintenant" - éditions Ouvrières, 1958)

logo_cr_ation_po_tique À la manière de "La mer s'est retirée, qui..." :
Des productions d'élèves ici à partir de ce poème et d'autres poèmes (copier-coller l'adresse):

http://www.ac-nancy-metz.fr/petitspoetes/HTML/SALLESDEJEUX/JEUALAMA.html

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Suppositions

Si la Tour Eiffel montait
Moins haut le bout de son nez,
Si l'Arc de Triomphe était
Un peu moins lourd à porter,
Si l'Opéra se pliait,
Si la Seine se roulait,
Si les ponts se dégonflaient,
Si tous les gens se tassaient
Un peu plus dans le métro,
Si l'on retirait des rues
Les guéridons des bistrots,
Les obèses, les ventrus,
Les porteurs de grands chapeaux,
Si l'on ôtait les autos,
Si l'on rasait les barbus,
Si l'on comptait les kilos
À deux cents grammes pas plus,
Si Montmartre se tassait,
Si les trop gros maigrissaient,
Si les tours rapetissaient,
Si le Louvre s'envolait,
Si l'on rentrait les oreilles,
Avec des SI on mettrait
Paris dans une bouteille.

Jacques Charpentreau ("Mots et merveilles" - Éditions SGPP, 1981)

logo_cr_ation_po_tique À la manière de "Si la Tour Eiffel..." :
Beaucoup d'autres poèmes sont construits sur ce modèle, voir le sommaire. Des exemples de création poétique à partir de ce texte ici, dans une classe de 5e (fichier pdf, copier-coller l'adresse) :

http://www.ac-nice.fr/college-dufy/file/DOC_FORMULAIRES/Printemps_poetes_08.pdf

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -- - - - - - - -  - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -- - - - - - - -

Dans son recueil "POÉSIE EN JEU", Jacques Charpentreau propose différents types de textes poétiques. On trouvera déjà plus haut dans cette catégorie, au paragrahe "JEUX", d'autres amusements littéraires et poétiques de divers auteurs.

- Devinettes - (réponses en lecture inversée)

Devinette 1

J'ai des dents, mais ne mange rien
J'ai dos, manche, et n'ai pas d'habit.
Je tiens, je pique, je conduis,
En bas, en haut, je vais, je viens.
Qui suis-je ?

réponse (ettehcruof al)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Devinette 2

Je passe
J'efface
La trace
Je recrée
L'espace
Qui suis-je ?

réponse (emmog al)

Jacques Charpentreau ("Poésie en jeu" - éditions Ouvrières, 1981)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

- Acrostiche - 

Prénom

Je viens de perdre mon prénom
Au bord d'une page nouvelle,
Ce plaisantin, ce vagabond
Qui se sauve quand je l'appelle.
Un lecteur peut-il le chercher
Et me dire où il s'est caché ?
Saurez-vous me le retrouver ?

Jacques Charpentreau ("Poésie en jeu" - éditions Ouvrières, 1981)

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- Jeux de mots -

Le blé

Au plus fort de l'été,
Dans la chaleur de midi,
J'épie,
Disait le blé.

Le fermier
L'estima
Coupable.

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

L'épouvantail

L'épouvantail
Se levant tôt
Met son chandail
Dans les champs d'aulx*.

* Un ail > des aulx

Jacques Charpentreau ("Poésie en jeu" - éditions Ouvrières, 1981)

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1 avril 2008

PP 09 : L'humour de MALCOM DE CHAZAL

- Malcolm de Chazal -

Malcolm de Chazal (1902-1981), écrivain, essayiste, poète surréaliste et peintre, a vécu sur l'Île Maurice où il est né.
Les poèmes en forme d'aphorismes du recueil "Sens magique", sont de courts textes imagés et surréalistes. En voici un aperçu  :

La vitre (titre proposé)

La vitre
Ne sait
Par
Quel côté
Se regarder
Pour se reconnaître.

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

L'eau (titre proposé)

L'eau dit à la vague :
"Tu me bois.
-Comment le pourrais-je ?
Reprit la vague,
Je suis ta bouche."

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

L'auto (titre proposé)

L'auto
N'atteindra
Jamais
La vitesse
de la route.

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Les animaux (titre proposé)

Tous les animaux
Sourient
Quand
Ils boivent.

Malcolm de Chazal ("Sens magique" 1957 - dans Oeuvres, tome 14, éditions Léo Scheer, 2004)

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour d'ANDRÉE CHEDID

livre_Chedid_f_tes_et_lubies

- Andrée Chedid -

Andrée Chedid ( pas d'accent sur le "e"")  est une poétesse française aux racines multiples. 
Née en 1920 en Égypte (Le Caire) de parents libanais, elle vit au Liban de 1942 à 1946 puis vient s'installer en France (où elle avait séjourné enfant) et adopte la nationalité française.  
Auteure de nombreux romans, récits, pièces de théâtre, recueils de poésies, ainsi que des contes et comptines pour les enfants, elle écrit aussi des textes de chansons pour son petit-fils Matthieu Chedid ("M"), le fils de Louis Chedid.

Le rire

Le rire
Pour rire
Quitta les hommes
Ce fut navrant
Fallait voir comme
Mais le rire
Bonhomme
Regagna son "home"
Riant riant
De voir comment
Un homme sans rire
N'est plus un homme

Andrée Chedid ("Le Cœur et le temps" - éditions de l'École des Loisirs, 1976) - et sur le site du Printemps des Poètes

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 

L’anniversaire

J’ai neuf ans
Salut les vétérans !
J’aime l’élan
Mais pas les caïmans

J’ai neuf ans
Salut les descendants ! 
J’aime Laurent
Un peu plus que maman

Andrée Chedid

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -         

Le caillou

Le caillou
Passe-partout
Sans froufrou
Sans bagout
Est jaloux, très jaloux
De Nicéphore, le Pou
Ce casse-cou
Vent-debout
Qui court le guilledou !

Andrée Chedid ("Le Cœur et le temps" - éditions de l'École des Loisirs, 1976)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

La cervelle de papa

La sardine a des arêtes,
Papa n'en a pas !

Papa, lui, a un squelette,
Que la sardine n'a pas !

La machine a des ailes,
Papa n'en a pas !

Papa, lui, a de la cervelle,
Il dit que la machine, pas !

Andrée Chedid ("Fêtes et lubies" - éditions Guy Levis et l'École des Loisirs, chanterimes, 1979)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -   

Histoire de cou

Un jour, le kangourou
Se fit gourou
Pour se monter le cou
Et la girafe
Dut faire gaffe
De peur de tomber
En carafe !

Andrée Chedid

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

La fringale

Holà ! Holà !
Tous, garez-vous !
Les durs les doux
Les secs les mous
Holà ! Holà !
Je donne le signal :
Voilà que Dame Noix
A sa FRINGALE !

Les petits gâteaux
Font le gros dos
Les Cochonailles
De peur, défaillent
Les Confitures
Se claquemurent
Tous les Anchois
Sont aux abois

Mais rien rien Rien
Ne résistera
À la FRINGALE
De Dame Noix !

Andrée Chedid ("Le Cœur et le temps" - éditions de l'École des Loisirs, 1976)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -         

La fourmi et la cigale

"Fini, fini !"
Dit la fourmi.
"Au diable la parcimonie ! Dès aujourd’hui
Je convie
Toutes cigales affranchies
A me chanter leurs mélodies,
Et nous fêterons, en compagnie,
La vie qui bouge,
La vie qui fuit !"

"Holà, holà !"
Fit la cigale
Poussant un cri très vertical.
"Pour moi, adieu le carnaval !
L’hiver, l’hiver m’a tant appris,
Et le souci tant rétrécie,
Que j’ai rangé toutes mes rêveries
Pour m’établir
En Bourgeoisie !"

Andrée Chedid

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -         

L'éponge

Une éponge
Songe
Songe
Songe aux songes
D'une éponge
Qui songe

Andrée Chedid ("Fêtes et lubies" - éditions Guy Levis et l'École des Loisirs, chanterimes, 1979)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -   

La chèvre magique

La chèvre magique
A des tiques
Dans l'oreille gauche
Dans l'oreille droite
Et tic et tac
Et gratte et gratte
La chèvre magique
Se détraque

Andrée Chedid

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

L'onomatopée

Lolo, nono,
Mama, topée !
C'est pas possible
A prononcer !

Glou-glou, tic-tac
Do-do, pé-pé,
Tout ça
C''est de l'O
NOMATOPÉE !

Lolo, nono
Mama, topée !
Un mot
A vous rendre toqué !

Cui-cui, chut-chut
Boum-Boum, yé-yé
Voilà des O
NOMATOPÉE ! *

Lolo, nono
Mama, topée!
Pourquoi vouloir
Tout compliquer !

Andrée Chedid    [* écrit sans S]

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de PAUL CLAUDEL

- Paul Claudel -

Paul Claudel (1868-1955) est connu pour ses pièces de théâtre ("Le soulier de satin") et son oeuvre poétique, marquée par sa foi catholique. Il a été aussi diplomate.
On trouvera ci-dessous quelques textes moins attendus.

La maison du marchand de sable (extrait)

Petit bout, le monde est parti.
On a roulé les tapis.

Moi aussi, parti, hélas !
Mais je sais ce qui se passe.

J'ai dans l'oreille un cricri
Qui me conte ce qu'on lui dit.

J'ai vendu au marchand de sable
Ce château considérable.

On a fermé les volets.
Entrez, Madame ! s'il vous plaît !

Entrez, Madame la souris !
Serviteur, Monsieur le rat gris !

Grigna grigno grigna gris !
Il fait bon, il fait noir et gris.

Personne pour nous déranger.
Allons voir le garde-manger.

On m'a parlé d'une tartine
Là-dedans qui se ratatine.

La lune coule un oeil d'or
À travers le corridor.

Il y a un bonhomme gris
Qui taquine le rat gris.

[...]

Dans sa boutique l'araignée
Tourne son moulin à café.

Quelqu'un tire la sonnette.
Bonjour donc, Mam'zelle Annette !

Ma robe est trouée par derrière.
C'est-i vous la couturière ?

Si vous me la raccomodez,
Aussitôt je vous paierai,

Je vous réglerai la note
Avec une petite crotte.

[...]

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Paul Claudel a été en poste d'ambassadeur au Japon de 1921 à 1927. Les  courts poèmes qui suivent s'apparentent à des haïkus ou des tankas japonais. Certains se retrouvent dans le recueil Dodoitzu et l’escargot alpiniste (Gallimard, 1945), réédité en 2005 sous ce même titre dans la collection Enfance en Poésie (Gallimard).
Ceux-ci ont été empruntés à l'adresse (fichier PDF) :
http://dspace.wul.waseda.ac.jp/dspace/bitstream/2065/493/11/Honbun-3749-09.pdf

Obscurité

Votre voix, je l’entends bien ; mais
Votre silhouette, je ne la vois :
Vous êtes comme dans un trou
Le grillon !

- - - - - - - - - - - - - - -

Coucou

On vous entend bien
Vous voir pas moyen
Ainsi dans son trou
Le grillon
Coucou !

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Ma figure dans le puits

Pas moyen que je me l’ôte
Ma figure dans le puits
Pas moyen que je me l’ôte
Et que j’en mette une autre
Et si l’on me trouve jolie
Tant pis ! c’est pas ma faute !

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livre_Claudel_escargotTénacité

Escargot,
Tout doux, tout doux, va, monte
Le Fuji !

L’escargot alpiniste

L’escargot à l’escalade
Sac au dos s’est mis en campagne
L’escargot à l’escalade
Va digérer la montagne !

Paul Claudel ("Dodoitzu et l’escargot alpiniste", 1945 et Enfance en Poésie  - Gallimard, 2005)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Cent phrases pour éventails

"Qui m'aurait permis de résister à la tentation, là-bas partout ambiante, de la calligraphie ?"

La dernière version originale en 1927 de cette oeuvre de Paul Claudel (avant la réédition en 1942 et celle de 1996 en Poésie-Gallimard) est composée de "trois accordéons de papier, qu'on feuillette de droite à gauche, réunis dans un emboîtage. Elle reproduit cent soixante-douze phrases manuscrites, et des idéogrammes calligraphiés par Ikuma Arishima, et porte pour la première fois le titre de "Cent phrases pour éventails". Deux poèmes (sans titre), haïkus au sens large (voir la catégorie du blog consacrée aux haîkus), choisis pour l'image :

Accroupi
près
du
bocal
Monsieur le Chat
les yeux à demi fermés
dit :
Je n’aime pas
le poisson

- - - - - - - - - - -

Dans
la lune
morte
Il y a
un lapin
vivant !

Paul Claudel ("Cent phrases pour éventails", Gallimard 1942 et Poésie- Gallimard, 1996)

logo_cr_ation_po_tiquePoème court

Voir la catégorie haïkus

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