L'hiver de Maurice Carême
Merci à la Fondation Maurice Carême
Maurice Carême annonce l'hiver avec cette "dernière pomme" :
La dernière pomme
Vais-je tomber, ne pas tomber ?
Se disait la dernière pomme.
J'ai résisté aux vents d'automne,
Aux pluies, aux premières gelées :
- Il ne faut pas que j abandonne
Mon fidèle ami, le verdier.
Vais-je tomber, ne pas tomber ?
Il y va de mon cœur de pomme.
Je suis d'or rouge et de miel jaune
Comme une lune à son lever
Et j'éclaire tout le pommier.
Non, non, verdier, je me cramponne,
J'attendrai l'hiver pour tomber.
Maurice Carême
Il a neigé
Il a neigé dans l'aube rose
Si doucement neigé,
Que le chaton croit rêver.
C'est à peine s'il ose
Marcher.
Il a neigé dans l'aube rose,
Si doucement neigé,
Que les choses
Semblent avoir changé.
Et le chaton noir n'ose
S'aventurer dans le verger,
Se sentant soudain étranger
À cette blancheur où se posent,
Comme pour le narguer,
Des moineaux effrontés.
Maurice Carême
Le givre (ponctuation provisoire, en attente de vérification)
Mon dieu comme ils sont beaux
Les tremblants animaux
Que le givre a fait naître
La nuit sur ma fenêtre !
Ils broutent des fougères
dans un bois plein d'étoiles,
Et l'on voit la lumière
À travers leur corps pâles.
Il y a un chevreuil
Qui me connaît déjà ;
Il soulève pour moi
Son front d'entre les feuilles,
Et quand il me regarde,
Ses grands yeux sont si doux
Que je sens mon cœur battre
Et trembler mes genoux.
Laissez-moi, ô décembre !
Ce chevreuil merveilleux.
Je resterai sans feu
Dans ma petite chambre.
Maurice Carême