À l'école avec Raymond Queneau
Raymond Queneau (1903-1976) est un poète surréaliste (exclu de ce mouvement en 1930), co-fondateur de l' Oulipo (Ouvroir de Littérature Potentielle).
Il est l'auteur de Cent mille milliards de Poèmes, en 1961. Ce livre-objet est présenté ainsi par son auteur : « Ce petit ouvrage permet à tout un chacun de composer à volonté cent mille milliards de sonnets, tous réguliers bien entendu. C’est somme toute une sorte de machine à fabriquer des poèmes, mais en nombre limité ; il est vrai que ce nombre, quoique limité, fournit de la lecture pour près de deux cents millions d’années (en lisant vingt-quatre heures sur vingt-quatre) ».
Cet ouvrage est réédité (Gallimard -1982). On peut en avoir un aperçu actif ICI.
Raymond Queneau est aussi l'auteur de Zazie dans le métro (porté à l'écran en 1960 par Louis Malle), et d' Exercices de style (1947).
L’écolier
J’écrirai le jeudi* j'écrirai le dimanche*
quand je n'irai pas à l'école
j'écrirai des nouvelles j'écrirai des romans
et même des paraboles
je parlerai de mon village je parlerai de mes parents
de mes aïeux de mes aïeules
je décrirai les prés je décrirai les champs
les broutilles et les bestioles
puis je voyagerai j'irai jusqu'en Iran
au Tibet ou bien au Népal
et ce qui est beaucoup plus intéressant
du côté de Sirius ou d'Algol
où tout me paraîtra tellement étonnant
que revenu dans mon école
je mettrai l'orthographe mélancoliquement
Raymond Queneau ("Battre la campagne" - 1968)
* À l'école de Raymond Queneau, les écoliers se reposaient deux jours, le jeudi et le dimanche. Ce n'est que depuis 1972 que l'expression "la semaine des quatre jeudis" est devenue obsolète. On parle maintenant de la semaine de quatre jours, qu'il est question de généraliser ...peut-être. Les rythmes scolaires ? c'est une autre histoire ...
Un enfant a dit
Un enfant a dit
je sais des poèmes
un enfant a dit
chsais des poésies
Un enfant a dit
mon cœur est plein d'elles
un enfant a dit
par coeur ça suffit
Un enfant a dit
ils en savent des choses
un enfant a dit
et tout par écrit
Si l'poète pouvait
s'enfuir à tir-d'aile
les enfants voudraient
partir avec lui
Raymond Queneau ("L'Instant fatal")