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lieu commun

7 avril 2007

Lise Mathieu - Le bonheur ne dort que d'un oeil

Le bonheur ne dort que d'un oeil, c'est le titre du recueil de poésies de Lise Mathieu (née en 1943), prix Max-Pol Fouchet 2006 (Éditions Le Castor Astral - L'Atelier Imaginaire).

Elle se présente ainsi dans sa lettre à Guy Rouquet, fondateur du Prix MP Fouchet :
" Je peux rester plusieurs jours sans écrire, et je me sens alors un peu moins moi-même, enfermée dehors, avec les pigeons du balcon. [...] Ecrire, c'est rattraper ces petits riens qui se carapatent comme des billets de mercure et s'en vont faire les malins sitôt hors de portée.[...] Je n'écris pas comme je respire .[...] La poésie rouvre comme une blessure l'énigme d'être au monde et le mystère d'être soi, et me permet cependant de vivre un peu plus, un peu mieux, un peu plus libre.[...] "livre_lise_mathieu

Jean Métellus écrit en préface : "Ce n'est pas sans un frémissement ni un certain éblouissement qu'on entre dans l'univers de Lise Mathieu ..."

et sur la quatrième de couverture :
Le bonheur ne dort que d'un œil est un livre vif et chaleureux, aux phrases dépouillées comme des constats :
La substance des rêves
Scintille au ras de l'herbe.

Il nous révèle une poésie préoccupée d'intériorité, mais aussi habitée par les saisons, les éclosions, le passage des comètes et les feux éteints des anciens hommes. Écrits à l'encre du ciel et des collines, ces poèmes nouent un dialogue avec l'eau, les éléments, les odeurs de terre et d'eau, le parfum des feuilles mortes. Les mots de Lise Mathieu tissent l'espérance et la mélancolie, une joie profonde et le sentiment de la mort, le déchirement du temps qui passe et la bouleversante légèreté d'être. Ce livre est aussi tonique qu'une marche en forêt et reposant comme une fin de promenade ...


Matin de printemps

Les yeux fermés
Couchée sur le dos
Devant la fenêtre
Je coule dans la rivière du temps

Flocons de soleil

Douleurs d'enfance
Douceur d'abeilles

Tout est né d'aujourd'hui
Un cœur immense s'appuie
Contre le mur de ma chambre

Lise Mathieu ("Le bonheur ne dort que d'un oeil" - partie 2 : "J'ai traversé les saisons")


L'idée du bonheur

Sur la colline d'en face
À peine lisibles
Trois vaches bougent
Leurs dos blancs
Dans la simplicité du champ

La nuit va tomber

Un ciel rouge
Un ciel
Difficile à comprendre
Semble dire

Maintenant

Lise Mathieu ("Le bonheur ne dort que d'un oeil" - partie 3 : "L'idée du bonheur")

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6 avril 2007

L'hippopotame - Bernard Dimey

POÈME À LA DEMANDE

Vous trouverez ci-dessous les  les textes des poèmes à la demande déjà trouvés

L'hippopotame, de Bernard Dimey (voir la catégorie ICI) illustré par Yvette Cathiard.

Dimey_silhouetteL'hippopotame

J'ai de l'hippopotame à peu près la rondeur,
Mais je ne vais dans l'eau que par inadvertance.
Je suis devenu sage et je crains les voyeurs,
Alors je m'engloutis sous les herbes et je pense.

L'hippopotame est doux mais son cuir est trop dur,
Son oeil est trop petit, sa narine est trop large.
Quand on est ainsi fait, le monde n'est pas sûr,
La seule solution est de survivre en marge.

Pourtant l'hippopotame est un bel animal,
Un peu mou, je sais bien, mais il est sympathique,
Il a peur des humains... et ça c'est bien normal.
Un jour, je m'en irai me noyer en Afrique.

Bernard Dimey ("Le milieu de la nuit"  - Christian Pirot Éditeur - petite collection).


2 avril 2007

poème à la demande: L'hippopotame - Bernard Dimey

Un poème de Bernard Dimey (voir la catégorie ICI) qu'on pourrait proposer aux grands élèves, à plusieurs niveaux de lecture.
Le sentiment de solitude, la certitude de ne pas être compris, et l'humour, sa politesse du désespoir.

Tiré du recueil "Le milieu de la nuit", dessin d' Yvette Cathiard, peintre, qui fut la compagne de l'auteur.

Dimey_silhouetteL'hippopotame

J'ai de l'hippopotame à peu près la rondeur,
Mais je ne vais dans l'eau que par inadvertance.
Je suis devenu sage et je crains les voyeurs,
Alors je m'engloutis sous les herbes et je pense.

L'hippopotame est doux mais son cuir est trop dur,
Son oeil est trop petit, sa narine est trop large.
Quand on est ainsi fait, le monde n'est pas sûr,
La seule solution est de survivre en marge.

Pourtant l'hippopotame est un bel animal,
Un peu mou, je sais bien, mais il est sympathique,
Il a peur des humains... et ça c'est bien normal.
Un jour, je m'en irai me noyer en Afrique.

Bernard Dimey ("Le milieu de la nuit"  - Christian Pirot Éditeur - petite collection).

Profitons de l'occasion pour vous conseiller d'aller faire un petit tour sur le site de l'éditeur,  ICI. Vous y trouverez, parmi les collections de CD et de livres, cette  Petite collection, qui regroupe des recueils de textes, poésies et chansons d'auteurs connus ou moins connus.
Bien sûr Bernard Dimey, intégral en 4 volumes (qu'est-ce que vous attendez ?)  et encore Pierre Louki, Georges Moustaki, Brigitte Fontaine, Christophe Miossec, Bernard Lavilliers, Boby Lapointe, Francis Lemarque, Gilles Vigneault, Mouloudji...
Chaque volume est vendu 15 €, à commander chez votre libraire préféré ou sur le site (nous on a un libraire préféré).


2 avril 2007

Syracuse

On parle aujourd'hui, mercredi 13 février 2008(1) de Bernard Dimey à la radio, malgré la grève, et son nom apparaîtra (peut-être) demain dans les journaux.
Si on mentionne ici ou là Bernard Dimey  c'est indirectement, bien entendu, avec la disparition d'Henri Salvador, interprète de Syracuse. Henri Salvador à qui on attribue parfois la paternité des paroles de la chanson, lui qui a seulement, mais joliment mis ce texte en musique, en 1962. (1)
(oui, ce message est antidaté, vous devriez le savoir)

Syracuse ouvre le recueil "Le milieu de la nuit" (éditions Christian Pirot, 1991), 15 €.
Qu'est-ce que vous attendez pour faire connaissance avec Bernard Dimey ,
avant qu'il ne reparte dans les archives ?

Syracuse

 

J'aimerais tant voir Syracuse
L'île de Pâques et Kairouan
Et les grands oiseaux qui s'amusent
A glisser l'aile sous le vent.

Voir les jardins de Babylone
Et le palais du Grand Lama
Rêver des amants de Vérone
Au sommet du Fuji-Yama.

Voir le pays du matin calme,
Aller pêcher au * cormoran
Et m'enivrer de vin de palme
En écoutant chanter le vent ...

Avant que ma jeunesse s'use
Et que mes printemps soient partis
J'aimerais tant voir Syracuse
Pour m'en souvenir à Paris.

Bernard Dimey ("Le milieu de la nuit" - éditions Christian Pirot, 1991) - * au : erreur rectifiée (voir commentaire)

La ponctuation du recueil, utilisée ici, est différente de celle du texte de la chanson
texte rangé également dans la catégorie
Poème du jour


2 avril 2007

Poésie urbaine - Rap et Slam - Abd Al Malik

Abd_Al_Malik_t_l_Vous avez raté le concert d'Abd Al Malik sur France 4 (Jeudi 29 mars 2007 de 20h40 à 21h35 (55') ?
C'est vrai qu'on vous avait conseillé, malgré les mauvaises critiques, le téléfilm sur Célestin Freinet (voir messages).

Mais rien n'est perdu, Concerts sauvages : Abd Al Malik, est rediffusé ce mercredi 4 avril à 3 h 20 du mat (quand même), et mieux sans doute, à 14 h 15 le même jour. A vos cassettes !

L'album «Gibraltar» a obtenu le prix Constantin et le prix de l'Académie Charles Cros (un poète qu'on retrouve sur ce blog). Il est sorti en 2006. Les Victoires de la Musique lui décernent le titre de meilleur album de musiques urbaines de l'année, en février 2007.
Abd Al Malik n'est pas un slameur, pas vraiment un rappeur non plus. Il trouve aussi ses références dans la chanson française des années passées. Par exemple, Ces gens-là, de Jacques Brel, qu' il interprète à sa manière. La qualité des textes justifierait déjà qu'on en parle, mais il s'agit de chansons, et CD_Abd_al_Malikdonc aussi de musique. Pas pour la déco, non, la musique n'est pas ici une parure de spectacle, elle est avec et dans le texte. « Il m'a fallu déconstruire pour reconstruire" dit-il. On parle de rap, de hip hop. On le dit inclassable ... Pendant que les spécialistes collent et décollent des étiquettes, nous, on ouvre nos oreilles.

Le "concert sauvage" d' Abd Al Malik a été enregistré sur la place de la Sorbonne, le 14 décembre dernier. Entre-autres titres, «Gibraltar», «Rentrer chez moi», «Les Autres»,«12 septembre 2001», «Le Grand Frère» ...

Gibraltar

Sur le détroit de Gibraltar, y a un jeune noir qui pleure un rêve qui prendra vie, une fois passé Gibraltar.
Sur le détroit de Gibraltar, y a un jeune noir qui se d'mande si l'histoire le retiendra comme celui qui portait le nom de cette montagne.
Sur le détroit de Gibraltar, y a un jeune noir qui meurt sa vie bête de "gangsta rappeur" mais ...
Sur le détroit de Gibraltar, y a un jeune homme qui va naître, qui va être celui qu'les tours empêchaient d'être.
Sur le détroit de Gibraltar, y a un jeune noir qui boit, dans ce bar où les espoirs se bousculent, une simple canette de Fanta.
Il cherche comme un chien sans collier le foyer qu'il n'a en fait jamais eu, et se dit que p't-être, bientôt, il ne cherchera plus.
Et ça rit autour de lui, et ça pleure au fond de lui.
Faut rien dire et tout est dit, et soudain ... soudain il s' fait derviche tourneur,
Il danse sur le bar, il danse, il n'a plus peur, enfin il hurle comme un fakir, de la vie devient disciple.
Sur le détroit de Gibraltar y'a un jeune noir qui prend vie, qui chante, dit enfin « je t'aime » à cette vie.
Puis les autres le sentent, le suivent, ils veulent être or puisqu'ils sont cuivre.
Comme ce soleil qui danse, ils veulent se gorger d'étoiles, et déchirer à leur tour cette peur qui les voile.
Sur le détroit de Gibraltar, y'a un jeune noir qui n'est plus esclave, qui crie comme les braves, même la mort n'est plus entrave.
Il appelle au courage celles et ceux qui n'ont plus confiance, il dit : "ramons tous à la même cadence ! ".
Dans le bar, y a un pianiste et le piano est sur les genoux, le jeune noir tape des mains, hurle comme un fou.
Fallait qu'elle sorte cette haine sourde qui le tenait en laisse, qui le démontait pièce par pièce.
Sur le détroit de Gibraltar, y a un jeune noir qui enfin voit la lune le pointer du doigt et le soleil le prendre dans ses bras.
Maintenant il pleure de joie, souffle et se rasseoit.
Désormais l'Amour seul, sur lui a des droits.
Sur le détroit de Gibraltar, un jeune noir prend ses valises, sort du piano bar et change ses quelques devises,
Encore gros d' émotion il regarde derrière lui et embarque sur le bateau.
Il n'est pas réellement tard, le soleil est encore haut.
Du détroit de Gibraltar, un jeune noir vogue, vogue vers le Maroc tout proche.
Vogue vers ce Maroc qui fera de lui un homme ...
Sur le détroit de Gibraltar …  sur le détroit de Gibraltar …
Vogue, vogue vers le merveilleux royaume du Maroc,
Sur le détroit de Gibraltar, vogue, vogue vers le merveilleux royaume du Maroc …

Abd Al Malik


Les autres

Moi, moi quand j' étais petit, j' avais mal
c' était l'état de mon esprit, je suis né malade
sur l'echelle de Richter de la misère, malade ça vaut bien 6
quelques degrés en dessous de là où c'est gradué fou

J' étais voleur et avant d' aller voler, je priais
je demandais à Dieu de ne pas me faire attraper
je lui demandais que la pêche soit bonne
qu' à la fin de la journée, le liquide déborde de mes poches
bien souvent, j' ai failli me noyer, j' ai été à sec aussi, souvent ...
quand je croisais papa, le matin, aller travailler avec sa 102 bleue
en rentrant, le matin, de soirée, j' me disais "c'est un bonhomme mon vieux"
ensuite, j' me faufilais dans mes couvertures et j' dormais toute la journée
le style vampire dormir la journée et rôder une fois le soleil couché
le genre de prédateur à l'envers, le genre qui à la vue d'un poulet meurt de peur
je ne me suis jamais fait prendre, et si j' avais été pris, aux keufs, j'aurais dit....

Les autres, les autres, c'est pas moi c'est les autres....

J'étais beau-parleur et je souriais aux filles en jean's avec de grosses ceintures
celles qui aiment bien l' odeur que degagent les gars
qui ont la réputation d'être des ordures
le genre à jurer sur la vie de sa mère dès qu'il ouvre la bouche
rêve de BMW pour asseoir à la place du mort celle qui couche
dans mon monde, un mec comme moi, c'est le top
j'aurais été une fille, on m'aurait traité de salope
quand je croisais ma soeur avec ses copines dans le quartier
moi, qui allait en soirée, j' lui disais "rentre à la baraque ! va faire à bouffer !"
ensuite, j'allais rejoindre mes copines, celles qui me faisaient bien délirer
celles qui, comme moi, avaient un pére, une mère
peut-être bien des frères et soeurs qui sait ...
mais moi, du genre beau parleur à l'endroit, sans foi ni loi
mais c'était pas moi le chien, mais ...

Les autres, les autres, c'est pas moi c'est les autres....

Et puis du jour au lendemain, j'ai viré prêcheur
promettant des flammes aux pêcheurs et des femmes aux bons adorateurs
comme si Dieu avait besoin de ça pour mériter qu'on l'aime
mais moi, moi pour que les autres m'aiment, moi
moi, j'en ai dit des choses pas belles et j'en ai accepté aussi
on m'a dit "t' es noir, tu veux te marier avec elle, mais t' es noir...."
les autres y disaient comme ça, qu'elle était trop bien pour moi *
donc moi, moi j'faisais de la peine à voir
moi, j'continuais ma parodie, mon escroquerie spirituelle
sauf que, j'me carottais moi-même, j'étais devenu un mensonge sur pattes
qui saoule grave et qui sait même pas ce qu'il dit
qui voit même pas que c'est un malade et qui dit comme ça
tout le temps y dit comme ça....

Les autres, les autres, c'est pas moi c'est les autres....

Et je vous dis monsieur, je vous dis monsieur *,
quand je pense à tout ça, je pleure

Abd Al Malik                 * références à la chanson de Brel : "Les bonbons"


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29 mars 2007

Philippe Geluck - "L'avenir du chat" - Casterman Édit

Geluck_r_fugi_s

29 mars 2007

Poésie urbaine - Rap et Slam - Grand Corps Malade

Un premier message pour une nouvelle catégorie : POÉSIE URBAINE - Rap et Slam arbre_avant_printemps_ombre_fa_ade
C'est quoi la Poésie urbaine, et le Slam ? et le Rap ? Et pourquoi tu mets des majuscules ?
J'ai pas toutes les réponses ...

Photo Lieucommun : Poésie naturellement urbaine.

le Slam, c'est un genre poétique, des textes souvent courts, mais pas toujours, sans accompagnement musical (une différence essentielle avec le rap), mais un phrasé ...
- la poésie "habituelle" n'en a-t-elle pas un aussi ?
Si, mais le slam (laissons de côté cette histoire de majuscules), est une poésie destinée à être dite en public. Donc, de la poésie, des textes, souvent personnels, engagés dans une vision contestataire de la société, des rapports humains. Les textes sont présentés par les slameurs sur des scènes improvisées ou pas (cafés, MJC, et en règle générale partout où on peut réunir des spectateurs). Poésie des villes, des quartiers, de la rue, poésie urbaine. C'est une compétition conviviale, sous forme de tournoi, qui rassemble plusieurs interprètes successifs, selon un règlement compliqué. Il existe même une Fédération Française de Slam, ICI.
Après, il y a différents genres de slam ...
Commençons par Grand Corps Malade qui annonce la couleur sur son site ICI :Grand_C_Malade
"Il y a évidemment autant de définitions du slam qu’il y a de slameurs et de spectateurs des scènes slam."  
Le texte qui suit a plus de force d'évocation quand on l'écoute, mais peut-être que la musique et le rythme des mots vous donneront un avant-goût de poésie urbaine, et l'envie d'aller plus loin : ci-contre, le CD en vente.

Enfant de la Ville

J’avoue que c’est bon de se barrer à la mer ou à la campagne
Quand tu ressens ce besoin, quand ton envie de verdure t’accompagne
Nouvelles couleurs, nouvelles odeurs, ça rend les sens euphoriques
Respirer un air meilleur ça change de mon bout de périphérique
Est-ce que t’as déjà bien écouté le bruit du vent dans la forêt
Est-ce que t’as déjà marché pieds nus dans l’herbe haute, je voudrais
Surtout pas représenter l’écolo relou à 4 centimes
Mais la nature nourrit l’homme et rien que pour ça faut qu’on l’estime
Donc la nature je la respecte, c’est peut-être pour ça que j’écris en vers
Mais c’est tout sauf mon ambiance, j’appartiens à un autre univers
Si la campagne est côté face, je suis un produit du côté pile
Là où les apparts s’empilent, je suis enfant de la ville
Je sens le cœur de la ville qui cogne dans ma poitrine
J’entends les sirènes qui résonnent mais est-ce vraiment un crime
D’aimer le murmure de la rue et l’odeur de l’essence
J’ai besoin de cette atmosphère pour développer mes sens

Je suis un enfant de la ville, je suis un enfant du bruit
J’aime la foule quand ça grouille, j’aime les rires et les cris
J’écris mon envie de croiser du mouvement et des visages
Je veux que ça claque et que ça sonne, je ne veux pas que des vies sages

Je trempe ma plume dans l’asphalte, il est peut-être pas trop tard
Pour voir un brin de poésie même sur nos bouts de trottoirs
Le bitume est un shaker où tous les passants se mélangent
Je ressens ça à chaque heure et jusqu’au bout de mes phalanges
Je dis pas que le béton c’est beau, je dis que le béton c’est brut
Ca sent le vrai, l’authentique, peut-être que c’est ça le truc
Quand on le regarde dans les yeux, on voit bien que s’y reflètent nos vies
Et on comprend que slam et hip-hop ne pouvaient naître qu’ici
Difficile de traduire ce caractère d’urgence
Qui se dégage et qu’on vit comme une accoutumance
Besoin de cette agitation qui nous est bien familière
Je t’offre une invitation pour cette grande fourmilière
J’suis allé à New York, je me suis senti dans mon bain
Ce carrefour des cultures est un dictionnaire urbain
J’ai l’amour de ce désordre et je ris quand les gens se ruent
Comme à l’angle de Broadway et de la 42ème rue

Je suis un enfant de la ville, je suis un enfant du bruit
J’aime la foule quand ça grouille, j’aime les rires et les cris
J’écris mon envie de croiser du mouvement et des visages
Je veux que ça claque et que ça sonne, je ne veux pas que des vies sages

Je me sens chez moi à Saint-Denis, quand y’a plein de monde sur les quais
Je me sens chez moi à Belleville ou dans le métro New-yorkais
Pourtant j’ai bien conscience qu’il faut être sacrément taré
Pour aimer dormir coincé dans 35 mètres carrés
Mais j’ai des explications, y’a tout mon passé dans ce bordel
Et face à cette folie, j’embarque mon futur à bord d’elle
A bord de cette pagaille qui m’égaye depuis toujours
C’est beau une ville la nuit, c’est chaud une ville le jour
Moi dans toute cette cohue je promène ma nonchalance
Je me ballade au ralenti et je souris à la chance
D’être ce que je suis, d’être serein, d’éviter les coups de surin
D’être sur un ou deux bons coups pour que demain sente pas le purin
Je suis un enfant de la ville donc un fruit de mon époque
Je vois des styles qui défilent, enfants du melting-pot
Je suis un enfant tranquille avec les poches pleines d’espoir
Je suis un enfant de la ville, ce n’est que le début de l’histoire

Grand Corps Malade - 2005 (autres textes sur son site (voir plus haut), et ICI (site non-officiel)


27 mars 2007

La différence en chansons

CD_bebelDeux CD des Chanteurs Livreurs : "Mr Gillou" et "Le monde est rond". Il  y en a d'autres.

La différence en chansons.
Pas des paroles en l'air, pas l'air du temps, mais l'air de rien, ils ne manquent pas d'airs, sans parler des instruments à corde et des percussions.
ICI le site des Chanteurs Livreurs. En reconstruction, car ces gens-là sont perfectionnistes, soyez patients, il faut y revenir souvent.
Et, dites donc quelle chance vous avez, ils offrent une tournée (dates sur le site) avec Michel Bühler contre la poignée d'euros qui vous reste de la brocante pluvieuse de dimanche dernier. Merci la météo.
La chanson des Chanteurs Livreurs que je préfère, c'est ce texte de Jean Aubel, chanteur du groupe : Bualénoc.
Et puis cette chanson de Michel Bühler (site officiel ICI) : Étranger, pour qu'on continue à en parler (voir messages ci-dessous).


Bualénoc

Une plage de l’ouest, à l’autre bout du monde
Un ciel plein de nuages où les orages grondent
Le vent portait la pluie tel un fardeau sournois
Glissait au long des rues comme glisse la soie

Perdue dans l’Océan et dans la houle noire,
L’île oubliait le monde et s’effaçait au soir
Quand au sombre horizon le soleil se mourait
Une petite fille doucement y pleurait.

« Bualénoc la grise » ancienne citadelle,
Légendaire bourreau régit de lois cruelles
Ne faisait que peu cas des rêves de jeunesse
Où l’enfance plaidait : « coupable de tendresse »

Le silence y régnait du haut de son pouvoir
Lâche sentence fière de faire son devoir
Rapace répugnant aux juvéniles proies
Que la petite fille…ne comprenait pas.

Des remparts élancés narguaient l’humilité
Piédestaux supportant sur leur front des gibets
Où les pendus semblaient mieux que de leur vivant
Clamer la liberté, balancés par le vent

La chaux vieillie brûlait les enceintes guerrières,
Les maisons s’y cachaient comme autant de tanières
L’homme plus que le loup était pour l’homme à craindre
Et la petite fille…le regardait s’éteindre.

Mais un jour le décor se chargea de couleurs
La roche s’embrasa fondant à la chaleur
Des tombereaux de feu roulèrent dans des failles
Jaillissant aussitôt de nouvelles entailles.

L’île fuma enfin sous la furie des flots
Rendant son dernier souffle en un ultime rot
Vomissant toute vie Bualénoc périt
Et la petite fille…avec fut engloutie.

Plus tard lorsqu’un marin viendra sur son bateau
Il y verra peut-être allant au fil de l’eau
Le souvenir lointain d’une fillette blonde
Et si en la voyant son esprit vagabonde

Il pensera sans doute, et vous feriez ainsi,
Bualénoc devait être le paradis,
Imaginant une île quel marin songerait
Qu’une petite fille… chaque soir y pleurait.

Jean Aubel


Étranger

Si la pluie en torrents
Tombe sur les genêts,
Si le brouillard descend
A l'orée des forêts,
Si ta route se perd,
Si tu es fatigué,
Si le vent de l'hiver
Souffle dans la vallée,

Étranger, étranger,
Viens frapper à notre porte,
Nous ne demanderons pas
Qui tu es, ni où tu vas,
Nous ne demanderons rien,
Viens.

Si tu n'as pas trouvé
De ruisseau en chemin,
Si l'eau n'a pas coulé
Dans le creux de tes mains,
Si la faim te poursuit
Comme une louve avide,
Dans le froid et la nuit,
Si ta besace est vide,

Étranger, étranger,
Viens t'asseoir à notre table,
Nous ne demanderons pas
Qui tu es, ni où tu vas,
Nous ne demanderons rien,
Viens.

Si tu veux raconter
La douceur de chez toi,
Si ton coeur veut chanter
Des refrains de là-bas,
Ou si, plus simplement,
Tu ne veux que te taire,
Et regarder longtemps
Le feu et sa lumière,

Étranger, étranger,
Reste encore pour la veillée,
Nous ne demanderons pas
Qui tu es, ni où tu vas,
Nous ne demanderons rien,
Mais viens.

Nous ne demanderons pas
Qui tu es, ni où tu vas,
Nous ne demanderons rien,
Viens.

Michel Bühler (Paroles et musique) 1971

27 mars 2007

Faut qu'on en parle encore

papillon_jaune




Premier papillon de printemps, hier dans le Vexin. Si l'image est floue c'est que le photographe était en train de courir.
(Photo : Lieucommun).

Mais que vient-il faire chez nous ?


Ton voisin est étranger

Ton Christ est juif
Tes chiffres sont arabes
Ton écriture est latine
Ta pizza est italienne
Ta démocratie est grecque
Ta voiture est japonaise
L'anis de ton pastis est égyptien
Ton essence est moyen-orientale
Ta télé est coréenne
Tes fringues sont chinoises
Ton hamburger est allemand
Ton whisky est écossais
Ton thé est indien
Ton café est brésilien
Ta choucroute est chinoise
Ton shit est marocain
Tes capotes sont anglaises
Ton chocolat est suisse
Ton coca est américain
Tes frites sont belges
Tes vacances sont espagnoles
Ton sucre est martiniquais

Et tu reproches à ton voisin d'être un étranger !

Julos Beaucarne et Marina Missier

Julos Beaucarne, né en 1936, est un chanteur-poète, humaniste, écologiste ...  (plus tard une présentation de cet auteur), créateur du FLAF, le Front de Libération des Arbres Fruitiers et ensuite du FLO, le Front de Libération de l’Oreille, une revue, en 1989, qui existe toujours. Son site est ICI.
Le site de Marina Missier est ICI.

Voir le message ci-dessous


26 mars 2007

Faut qu'on en parle

Il y a des choses qu'on ne peut pas mettre de côté, elles obstruent l'avenir, il faut rentrer dedans. Maintenant. Parlons-en, parlez-en.

Cette dépêche d'agence (extrait) :

Vendredi 23 mars 2007, 16h49 

PARIS (Reuters) - La directrice d'une école  maternelle du XIXe arrondissement de Paris a été placée en garde à vue  vendredi dans un commissariat avec deux autres personnes, avant d'être  libérée, apprend-on de source judiciaire. (...)
Les échauffourées, mardi, avaient opposé des  particuliers et des policiers qui venaient interpeller des parents d'élèves  sans papiers chinois dans cette école, rue Rampal.

Poésie, brocante et humour, nous restons bien dans la ligne définie pour ce blog Lieucommun.livre_Pr_vert__trangers

  • Poésie, avec Jacques Prévert, en bas de message (Photo ci-contre du recueil qui contient neuf poèmes de différents recueils de Prévert - Folio Junior - Gallimard - 2000)
  • Brocante, puisqu'il s'agit d'une braderie des Droits de l'Homme;
  • Humour ? On verra plus tard si on peut en rire ...

En attendant, la VIDÉO est ICI,
le site RESF, donne une information complète
ICI,
et propose la signature d'une  pétition ICI. Actuellement difficile d'accès : saturé, c'est bon signe ? Faites suivre ces liens ...

Tous les syndicats enseignants parisiens (SFU, SGEN, SUD, CGT), ainsi que la FCPE, la principale fédération de parents d'élèves et RESF, le Réseau éducation sans frontières, appellaient à un rassemblement lundi 27 mars à 18 h 30 devant le rectorat de Paris ... 

Sous ce texte de Prévert (maintenant corrigé)* , une autre info intéressante ...

Étranges étrangers

Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel
hommes des pays lointains
cobayes des colonies
Doux petits musiciens
soleils adolescents de la porte d'Italie
Boumians de la porte de Saint-Ouen
Apatrides d'Aubervilliers
brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris
ébouillanteurs des bêtes trouvées mortes sur pied
au beau milieu des rues
Tunisiens de Grenelle
embauchés débauchés
manoeuvres désoeuvrés
Polacks du Marais du Temple des Rosiers

Cordonniers de Cordoue soutiers de Barcelone
pêcheurs des Baléares ou bien du Finisterre
rescapés de Franco
et déportés de France et de Navarre
pour avoir défendu en souvenir de la vôtre
la liberté des autres
Esclaves noirs de Fréjus
tiraillés et parqués
au bord d'une petite mer
où peu vous vous baignez
Esclaves noirs de Fréjus
qui évoquez chaque soir
dans les locaux disciplinaires
avec une vieille boîte à cigares
et quelques bouts de fil de fer
tous les échos de vos villages
tous les oiseaux de vos forêts
et ne venez dans la capitale
que pour fêter au pas cadencé
la prise de la Bastille le quatorze juillet

Enfants du Sénégal
dépatriés expatriés et naturalisés

Enfants indochinois
jongleurs aux innocents couteaux
qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés
de jolis dragons d'or faits de papier plié

Enfants trop tôt grandis et si vite en allés
qui dormez aujourd'hui de retour au pays
le visage dans la terre
et des bombes incendiaires labourant vos rizières

On vous a renvoyé
la monnaie de vos papiers dorés
on vous a retourné
vos petits couteaux dans le dos

Étranges étrangers
Vous êtes de la ville
vous êtes de sa vie
même si mal en vivez
même si vous mourez.

Jacques Prévert  1951 ("Grand bal du printemps" ) 
* Corrections : renvois de paragraphe, majuscules respectées, unique point final, et dernier vers : "même si vous en mourez".


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