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4 mars 2007

Le printemps de Charles d'Orléans

Le Printemps (parfois titré Rondeau)

Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie                  
Et s'est vêtu de broderies,
De soleil luisant, clair et beau

Il n'y a bête, ni oiseau
Qu'en son langage ne chante ou crie
Le temps a laissé son manteau
De vent de froidure et de pluie

Rivières, fontaines et ruisseaux
Portent en livrée jolie
Gouttes d'argent, d'orfèvrerie
Chacun s'habille de nouveau

Charles d'Orléans (1391-1465) ("Rondeaux", poèmes écrits vers l'année 1450)

texte d'origine, en ancien français :

Le Printemps

Le temps a laissié son manteau
de vent, de froidure et  de pluye, 
Et s'est vestu de brouderie
De soleil luyant, cler et beau.
Il n'y a beste, ne oyseau,
Qu'en son jargon ne chante ou crie :
Le temps a laissié son manteau!

Rivière, fontaine et ruisseau 
Portent, en livrée jolie,
Gouttes d'argent, d'orfavrerie,
Chascun s'abille de nouveau:
Le temps a laissié son  manteau

Charles d'Orléans ("Rondeaux")


Autre poésie du même auteur sur le thème du retour du printemps :

Montrez bien, Printemps gracieux

Montrez bien, Printemps gracieux,
De quel métier vous savez vous servir,
Car Hiver se fait seul ennuyeux,
Et vous le faites réjouir.
Aussitôt qu'il vous voit venir,
Lui et sa méchante retenue
Sont contraints et prêt de fuir
À votre joyeuse venue.

Hiver rend champs et arbres vieux,
Leurs barbes de neige blanchir,
Et est si froid, sale et pluvieux
Qu'après le feu vient croupir ;
On ne peut hors des toits sortir
Comme un oiseau qui se mue.
Mais vous faites tout rajeunir
À votre joyeuse venue.

Hiver fuit le soleil dans les cieux
Du manteau des nues couvrir ;
Or maintenant, loué soit Dieux,
Vous êtes venu éclaircir
Toutes choses à embellir.
Hiver a sa peine perdue,
Car l'an nouveau l'a fait bannir
À votre joyeuse venue.

Charles d'Orléans ("Rondeaux")

texte original :

Bien moustrez, Printemps gracieux

Bien moustrez, Printemps gracieux,
De quel mestier savez servir,
Car Yver fait cueurs ennuieux,
Et vous les faictes resjouir.
Si tost comme il vous voit venir,
Lui et sa meschant retenue
Sont contrains et prestz de fuir
A vostre joyeuse venue.
Yver fait champs et arbres vieulx,
Leurs barbes de neige blanchir,
Et est si froit, ort et pluieux
Qu'emprés le feu couvient croupir ;
On ne peut hors des huis yssir
Comme un oisel qui est en mue.
Mais vous faittes tout rajeunir
A vostre joyeuse venue.
Yver fait le souleil es cieulx
Du mantel des nues couvrir :
Or maintenant, loué soit Dieux,
Vous estes venu esclersir
Toutes choses et embellir.
Yver a sa peine perdue,
Car l'an nouvel l'a fait bannir
A vostre joyeuse venue.

Charles d'Orléans


Et puis ce poème , pour un peu plus tard :

Ballade du premier jour de mai

Trop longtemps vous vois sommeillier,
Monsieur, en deuil et déplaisir.
Veuilliez vous ce jour éveiller !
Allons au bois le mai cueillir
Pour la coutume maintenir !
Nous orrons des oyseaux le glay 1                         
Dont ils font les bois retentir
Ce premier jour du mois de mai.

Le Dieu d'Amour est coutumier
À ce jour de fête tenir
Pour amoureux cœurs festoyer
Qui désirent le servir.
Pour ce fait les arbres couvrir
De fleurs et les champs de vert gai
Pour la fête plus embellir
Ce premier jour du mois de mai.

Bien sais, mon cœur, que faux danger
Vous fait maintes peines souffrir,
Car il vous fait trop éloigner
Celle qui est votre désir.
Mieux conseiller je ne vous sais
Pour votre douleur amoindrir
Ce premier jour du mois de mai.

Ma dame, mon seul souvenir
En cent jours je n’aurai loisir
De vous raconter tout au vrai
Le mal qui tient mon coeur martyr
Ce premier jour du mois de mai ...

Charles d'Orléans ("Rondeaux")

texte original :

Balade (orthographe de l'ancien français pour "ballade")

Trop longtemps vous voy sommeillier,
Mon cueur, en dueil et desplaisir;
Vueilliez vous ce jour esveillier,
Alons au bois le May cueillir,
Pour la coustume maintenir.
Nous orrons des oyseaulx le glay,
Dont ilz font les bois retentir,
Ce premier jour du mois de May,
Le Dieu d'amours est coustumier,
A ce jour, de feste tenir,
Pour amoureux cueurs festier
Qui desirent de le servir;
Pour ce, fait les arbres couvrir
De fleurs, et les champs de vert gay;
Pour la feste plus embellir,
Ce premier jour du mois de May.
Bien scay, mon cueur, que faulx Dangier
Vous fait mainte paine souffrir;
Car il vous fait trop eslongner
Celle qui est vostre desir;
Pourtant vous fault esbat querir;
Mieux conseiller, je ne vous scay,
Pour vostre doleur amendrir,
Ce premier jour du mois de May.

L'envoy

Ma Dame, mon seul souvenir,
En cent jours n'auroye loisir
De vous raconter, tout au vray,
Le mal qui tient mon cueur martir,
Ce premier jour du mois de May.

Charles d'Orléans



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