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lieu commun
1 mars 2008

Georges BRASSENS - le féminin en poésie

Georges BRASSENS, (1921-1981) est né à Sète, dans l'Hérault. C'est un poète, compositeur et interprète de ses textes, qui a aussi mis en musique de nombreux textes d'autres poètes (Victor Hugo, Verlaine, Aragon, Paul Fort ...)
On a volontairement ici ignoré une grande partie des textes du répertoire féminin de Brassens, trop "crus", pour ne garder que ceux qui peuvent (mais c'est vous qui voyez) être proposés à des élèves de Collège ou de Lycée.

Les textes présentés sont des paroles de chanson, ils respectent le format, les élisions et la ponctuation originaux, tels qu'on peut les trouver sur des partitions ou dans des ouvrages (référence, le livre "Georges Brassens" d'Alphonse Bonnafé - Seghers, 1963 et mises à jour successives). Il est possible et peut-être utile, pour utiliser ces textes en poésie, de leur donner une ponctuation et de rétablir les voyelles élidées. Brassens étant large d'esprit, il ne s'y opposerait certainement pas !

Pour un travail approfondi sur l'un des textes, la mine d'information est ici : http://www.analysebrassens.com/

Bonhomme

Malgré la bise qui mord
La pauvre vieille de somme
Va ramasser du bois mort
Pour chauffer Bonhomme

Bonhomme qui va mourir
De mort naturelle.

Mélancolique, elle va
A travers la forêt blême
Où jadis elle rêva
De celui qu'elle aime

Qu'elle aime et qui va mourir
De mort naturelle.

Rien n'arrêtera le cours
De la vieille qui moissonne
Le bois mort de ses doigts gourds
Ni rien ni personne

Car Bonhomme va mourir
De mort naturelle.

Non, rien ne l'arrêtera,
Ni cette voix de malheur(e)
Qui dit : "Quand tu rentreras
Chez toi, tout à l'heure

Bonhomm' sera déjà mort
De mort naturelle."

Ni cette autre et sombre voix,
Montant du plus profond d'elle,
Lui rappeler que, parfois
Il fut infidèle

Car Bonhomme, il va mourir
De mort naturelle.

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Jeanne
 
Chez Jeanne la Jeanne
Son auberge est ouverte aux gens sans feu ni lieu
Ou pourrait l'appeler l'auberge du bon Dieu
S'il n'en existait déjà une
La dernière où l'on peut entrer
Sans frapper sans montrer patte blanche.

Chez Jeanne la Jeanne
On est n'importe qui on vient n'importe quand
Et comme par miracle par enchantement
On fait partie de la famille
Dans son cœur en s' poussant un peu
Reste encore une petite place

La Jeanne la Jeanne
Elle est pauvre et sa table est souvent mal servie
Mais le peu qu'on y trouve assouvit pour la vie
Par la façon qu'elle le donne
Son pain ressemble à du gâteau
Et son eau à du vin comm' deux gouttes d'eau

La Jeanne la Jeanne
On la paie quand on peut des prix mirobolants
Un baiser sur son front ou sur ses cheveux blancs
Un semblant d'accord de guitare
L'adresse d'un chat échaudé
Ou d'un chien tout crotté comm' pourboir'

La Jeanne la Jeanne
Dans ses roses et ses choux n'a pas trouvé d'enfant
Qu'on aime et qu'on défend contre les quatre vents
Et qu'on accroche à son corsage
Et qu'on arrose avec son lait
D'autres qu'elle en seraient tout' chagrines

Mais Jeanne la Jeanne
Ne s'en soucie pas plus que de colin-tampon
Etre mère de trois poulpiquets à quoi bon
Quand elle est mère universelle
Quand tous les enfants de la terre
De la mer et du ciel sont à elle.
 

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Bécassine

Un champ de blé prenait racine
Sous la coiffe de Bécassine
Ceux qui cherchaient la toison d'or
Ailleurs avaient bigrement tort
Tous les seigneurs du voisinage
Les gros bonnets, grands personnages
Rêvaient de joindre à leur blason
Une boucle de sa toison
Un champ de blé prenait racine
Sous la coiffe de Bécassine
 
C'est une espèce de robin,
N'ayant pas l'ombre d'un lopin
Qu'elle laissa pendre, vainqueur
Au bout de ses accroche-cœurs
C'est une sorte de manant
Un amoureux du tout-venant
Qui pourra chanter la chanson
Des blés d'or en toute saison
Et jusqu'à l'heure du trépas
Si le diable s'en mêle pas
 
Au fond des yeux de Bécassine
Deux pervenches prenaient racine
Si belles que Sémiramis
Ne s'en est jamais bien remis'
Et les grands noms à majuscules
Les Cupidons à particules
Auraient cédé tous leurs acquêts
En échange de ce bouquet
Au fond des yeux de Bécassine
Deux pervenches prenaient racine
 
C'est une espèce de gredin
N'ayant pas l'ombre d'un jardin
Un soupirant de rien du tout
Qui lui fit faire les yeux doux
C'est une sorte de manant,
Un amoureux du tout-venant
Qui pourra chanter la chanson
Des fleurs bleues en toute saison
Et jusqu'à l'heure du trépas
Si le diable s'en mêle pas
 
A sa bouche, deux belles guignes
Deux cerises tout à fait dignes
Tout à fait dignes du panier
De Madame de Sévigné
Les hobereaux, les gentillâtres
Tombés tous fous d'elle, idolâtres
Auraient bien mis leur bourse à plat
Pour s'offrir ces deux guignes-là
Tout à fait dignes du panier
De Madame de Sévigné
 
C'est une espèce d'étranger
N'ayant pas l'ombre d'un verger
Qui fit s'ouvrir, qui étrenna
Ses joli's lèvres incarnat
C'est une sorte de manant
Un amoureux du tout-venant
Qui pourra chanter la chanson
Du temps des c'rises en tout' saison
Et jusqu'à l'heure du trépas
Si le diable s'en mêle pas.

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La cane de Jeanne
 
La cane
De Jeanne
Est morte au gui l'an neuf,
Elle avait fait, la veille,
Merveille !
Un œuf !
 
La cane
De Jeanne
Est morte d'avoir fait,
Du moins on le présume,
Un rhume,
Mauvais !
 
La cane
De Jeanne
Est morte sur son œuf
Et dans son beau costume
De plumes,
Tout neuf !
 
La cane
De Jeanne,
Ne laissant pas de veuf,
C'est nous autres qui eûmes
Les plumes,
Et l'œuf !
 
Tous, toutes,
Sans doute,
Garderons longtemps le
Souvenir de la cane
de Jeanne
Morbleu !

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Dans l'eau de la claire fontaine
 
Dans l'eau de la claire fontaine
Elle se baignait toute nue
Une saute de vent soudaine
Jeta ses habits dans les nues.
 
En détresse, elle me fit signe
Pour la vêtir, d'aller chercher
Des morceaux de feuilles de vigne
Fleurs de lis ou fleurs d'oranger.
 
Avec des pétales de roses
Un bout de corsage lui fis
Mais la belle n’était pas bien grosse
Une seule rose a suffi.
 
Avec le pampre de la vigne
Un bout de cotillon lui fis
Mais la belle était si petite
Qu’une seule feuille a suffi.
 
Elle me tendit ses bras, ses lèvres,
Comme pour me remercier
Je les pris avec tant de fièvre
Qu'ell' fut toute déshabillée.
 
Le jeu dut plaire à l'ingénue
Car, à la fontaine souvent
Ell' s'alla baigner toute nue
En priant qu'il fît du vent
Qu'il fît du vent.

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Pénélope
 
Toi l'épouse modèle le grillon du foyer
Toi qui n'a point d'accroc dans ta robe de mariée
Toi l'intraitable Pénélope
En suivant ton petit bonhomme de bonheur
Ne berces-tu jamais en tout bien tout honneur
De jolies pensées interlopes
 
Derrière tes rideaux dans ton juste milieu
En attendant l'retour d'un Ulysse de banlieue
Penchée sur tes travaux de toile
Les soirs de vague a l'âme et de mélancolie
N'as tu jamais en rêve
Au ciel d'un autre lit
Compté de nouvelles étoiles
 
N'as-tu jamais encore appelé de tes vœux
L'amourette qui passe, qui vous prend aux cheveux
Qui vous compte des bagatelles
Qui met la marguerite au jardin potager
La pomme défendue aux branches du verger
Et le désordre a vos dentelles
 
N'as-tu jamais souhaité de revoir en chemin
Cet ange ce démon qui, son arc a la main
Décoche des flèches malignes
Qui rend leur chair de femme aux plus froides statues
Les bascul' de leur socle bouscule leur vertu
Arrache leur feuille de vigne
 
N'aie crainte que le ciel ne t'en tienne rigueur,
Il n'y a vraiment pas là de quoi fouetter un cœur
Qui bat la campagne et galope
C'est la faute commune et le péché véniel,
C'est la face cachée de la lune de miel
Et la rançon de Pénélope

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Les sabots d'Hélène
 
Les sabots d'Hélène
Étaient tout crottés
Les trois capitaines l'auraient appelée vilaine
Et la pauvre Hélène
 Était comme une âme en peine
Ne cherche plus longtemps la fontaine
Toi qui as besoin d'eau
Ne cherche plus, aux larmes d'Hélène
Va-t'en remplir ton seau
 
Moi j'ai pris la peine
De les déchausser
Les sabots d'Hélèn' moi qui ne suis pas capitaine
Et j'ai vu ma peine
Bien récompensée
Dans les sabots de la pauvre Hélène
Dans ses sabots crottés
Moi j'ai trouvé les pieds d'une reine
Et je les ai gardés.
 
Son jupon de laine
 Était tout mité
Les trois capitaines l'auraient appelée vilaine
Et la pauvre Hélène
 Était comme une âme en peine
Ne cherche plus longtemps la fontaine
Toi qui as besoin d'eau
Ne cherche plus, aux larmes d'Hélène
Va-t'en remplir ton seau
 
Moi j'ai pris la peine
De le retrousser
Le jupon d'Hélèn' moi qui ne suis pas capitaine
Et j'ai vu ma peine
Bien récompensée.
Sous les jupons de la pauvre Hélène
Sous son jupon mité
Moi j'ai trouvé des jambes de reine
Et je les ai gardées.
 
Et le coeur d'Hélène
Savait pas chanter
Les trois capitaines l'auraient appelée vilaine
Et la pauvre Hélène
Était comme une âme en peine
Ne cherche plus longtemps la fontaine
Toi qui as besoin d'eau
Ne cherche plus, aux larmes d'Hélène
Va-t'en remplir ton seau
 
Moi j'ai pris la peine
De m'y arrêter
Dans le coeur d'Hélèn' moi qui ne suis pas capitaine
Et j'ai vu ma peine
Bien récompensée.
Dans le coeur de la pauvre Hélène
Qu'avait jamais chanté
Moi j'ai trouvé l'amour d'une reine
Et moi je l'ai gardé.

Georges Brassens (paroles et musiques)



 

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