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1 mars 2008

Pierre CORAN - le féminin en poésie

livre_Pierre_Coran_comptines_zozoter

Pierre Coran, auteur belge de langue française, est né en 1934. Instituteur, poète et romancier pour la jeunesse, la liste de ses écrits est  longue.
Quelques titres :
Comptines en Mots d'Ici et d'Ailleurs (éditions Casterman, collection Direlire, à paraître). Autour de 6 € le livre.
<< Comptines pour ne pas zozoter, avec Gabriel Lefebvre (éditions Casterman, collection Direlire, 1993).
Pierre Coran a publié de nombreux recueils de comptines et de jeux de langage aux éditions Casterman dans la même collection Direlire : Comptines pour jongler avec les rimes (2007), Comptines pour délier les langues à noeuds (2007), Comptines pour garder la cadence (1993), Comptines pour ne pas bredouiller (1993), Comptines pour nasiller comme un canard (1993),etc.
livre_Pierre_Coran_jouer_langueÀ parcourir aussi : Jaffabules ( Hachette Jeunesse, 1983) et Comptines et poèmes pour jouer avec la langue >> (avec Irène Coran, et Anne Letuffe, illustratrice - éditions Casterman, Les Grands livres, 2005). Ce beau livre est vendu 16 €.

Des textes sont présents sur ce blog : Paris blanc, Le chameau  (poésies cycle 2),  Le poisson rouge (poésies par thème : l'école, p 3), et dans l'humour des poètes (Printemps des Poètes 2009)

La grenouille

Une grenouille
Qui fait surface,
Ça crie, ça grouille
Et ça agace.

Ça se barbouille,
Ça se prélasse,
Ça tripatouille
Dans la mélasse.

Puis ça rêvasse
Et ça coasse
Comme une contrebasse
Qui a la corde lasse.

Mais pour un héron à échasses,
Une grenouille grêle ou grasse
Qui se brochette ou se picore,
Ce n'est qu'un sandwich à ressorts.

Pierre Coran ("Jaffabules", Livre de poche Jeunesse - Hachette)

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Les souris et le chat luthier

Sur le pont d'un chalutier,
Un chat chic jouait du luth.
Il avait mis des souliers,
Une cravate de jute.
Pendant que le chat luthier
Amusait les marins soûls,
Les souris du chalutier
Rongeaient le chalut à trous.

Personne ne devina
Que les souris et le chat
S'étaient mis de connivence
Pour que les poissons distraits,
Désormais, nagent en paix
Dans leur monde de silence.

Pierre Coran ("Jaffabules" - Collection Hachette Jeunesse, 1983)

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Un autre métier au féminin (après l'infirmière de Robert Clausard) : dactylo

Le o et la dactylo

Une dactylo
Tape, tape, tape.
Une dactylo
Tape, tape, trop.

Un de ses doigts dérape
Sur le mot oiseaux.
Il a tapé c
N’a pas tapé o.

Ciseaux s’envolent aussitôt,
S’envolent, s’affolent
Dans les mèches folles
De la dactylo

Qui sans hésiter,
En gommant le c,
A la tête sauve.

Si la dactylo
N’eût pu taper o,
Elle eût été chauve.

Pierre Coran ("Jaffabules" - Collection Hachette Jeunesse, 1983)

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Maman

(à dire par un jeune enfant à l'oreille de sa maman)

Maman, Maman,
Il pleut des roses.
C'est le printemps
Qui les dépose.

Moi je choisis
Celle qui tremble
Car aujourd'hui,
Tu lui ressembles.

Tu es Maman,
Comme une fleur
Dont on entend
Battre le coeur.

Pierre Coran (dans "Le livre des fêtes et des anniversaires" de J Charpentreau - éditions Ouvrières)



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1 mars 2008

Pierre CORNEILLE - le féminin en poésie

Pierre Corneille (1606-1684) est un auteur français de théâtre classique (Le Cid, Horace ...).

Stances à Marquise

Marquise, si mon visage
A quelques traits un peu vieux,
Souvenez-vous qu'à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux.

Le temps aux plus belles choses
Se plaît à faire un affront;
Il saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front.

Le même cours des planètes
Règle nos jours et nos nuits :
On m'a vu ce que vous êtes;
Vous serez ce que je suis.

Cependant j'ai quelques charmes
Qui sont assez éclatants
Pour n'avoir pas trop d'alarmes
De ces ravages du temps.

Vous en avez qu'on adore ;
Mais ceux que vous méprisez
Pourraient bien durer encore
Quand ceux-là seront usés.

Ils pourront sauver la gloire
Des yeux qui me semblent doux,
Et dans mille ans faire croire
Ce qu'il me plaira de vous.

Chez cette race nouvelle,
Où j'aurai quelque crédit,
Vous ne passerez pour belle
Qu'autant que je l'aurai dit.

Pensez-y, belle Marquise.
Quoiqu'un grison fasse effroi,
Il vaut bien qu'on le courtise,
Quand il est fait comme moi.
 

Pierre Corneille 1606-1684 ("Recueil de Sercy")
* Les strophes en italique sont souvent "oubliées".



1 mars 2008

Charles CROS - le féminin en poésie

Charles Cros (1842–1888) est un poète français ("Le Collier de griffes", "Le Coffret de santal") méconnu de ses contemporains et quelque peu oublié aujourd'hui. Il reste quand même son hareng saur, sec, sec, sec, qui se balance aux murs des écoles. Charles Cros est aussi un inventeur dépossédé : qui sait ce qu'il a apporté à la photographie ? Et le phonographe, qu'il avait théorisé, a été réalisé par Thomas Edison.

Malgré tout

Je sens la bonne odeur des vaches dans le pré ;
Bétail, moissons, vraiment la richesse étincelle
Dans la plaine sans fin, sans fin, où de son aile
La pie a des tracés noirs sur le ciel doré.

Et puis, voici venir, belle toute à mon gré,
La fille qui ne sait rien de ce qu'on veut d'elle
Mais qui est la plus belle en la saison nouvelle
Et dont le regard clair est le plus adoré.

Malgré tous les travaux, odeurs vagues, serviles,
Loin de la mer, et loin des champs, et loin des villes
Je veux l'avoir, je veux, parmi ses cheveux lourds,

Oublier le regard absurde, absurde, infâme,
Enfin, enfin je veux me noyer dans toi, femme,
Et mourir criminel pour toujours, pour toujours !

Charles Cros ("Le Collier de griffes", 1908 [recueil posthume] - Gallimard poésie 1972)

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À la plus belle

Nul ne l'a vue et, dans mon coeur,
Je garde sa beauté suprême ;
(Arrière tout rire moqueur !)
Et morte, je l'aime, je l'aime.

J'ai consulté tous les devins,
Ils m'ont tous dit : " C'est la plus belle ! "
Et depuis j'ai bu tous les vins
Contre la mémoire rebelle.

Oh ! ses cheveux livrés au vent !
Ses yeux, crépuscule d'automne !
Sa parole qu'encor souvent
J'entends dans la nuit monotone.

C'était la plus belle, à jamais,
Parmi les filles de la terre...
Et je l'aimais, oh ! je l'aimais
Tant, que ma bouche doit se taire.

J'ai honte de ce que je dis ;
Car nul ne saura ni la femme,
Ni l'amour, ni le paradis
Que je garde au fond de mon âme.

Que ces mots restent enfouis,
Oubliés, (l'oubliance est douce)
Comme un coffret plein de louis
Au pied du mur couvert de mousse.

Charles Cros ("Le Collier de griffes", 1908 [recueil posthume] - Gallimard poésie 1972)

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Conseil

Quand sur vos cheveux blonds, et fauves au soleil,
Vous mettez des rubans de velours noir, méchante,
Je pense au tigre dont le pelage est pareil :
Fond roux, rayé de noir, splendeur de l'épouvante.

Quand le rire fait luire, au calice vermeil
De vos lèvres, l'éclair de nacre inquiétante,
Quand s'émeut votre joue en feu, c'est un réveil
De tigre : miaulements, dents blanches, mort qui tente.

Et puis, regardez-vous. Même sans ce velours,
Quoique plus belle, enfin vous ressemblez toujours
A celui que parfois votre bouche dénigre.

D'ailleurs si vous tombiez sous sa griffe, une fois ?
On ne peut pas savoir qui l'on rencontre au bois :
Madame, il ne faut pas dire de mal du tigre.

Charles Cros ("Le Coffret de santal", 1873 - Gallimard poésie 1972)

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Déserteuses

Un temple ambré, le ciel bleu, des cariatides.
Des bois mystérieux; un peu plus loin, la mer ...
Une cariatide eut un regard amer
Et dit : C'est ennuyeux de vivre en ces temps vides.

La seconde tourna ses grands yeux froids, avides,
Vers Lui, le bien-aimé, l'homme vivant et fier
Qui, venu de Paris, peignait d'un pinceau clair
Ces pierres, et ce ciel, et ces lointains limpides.

Puis la troisième et la quatrième : "Comment
Retirer nos cheveux de cet entablement ?
Allons ! nous avons trop longtemps gardé nos poses !"

Et toutes, par les prés et les sentiers fleuris,
Elles coururent vers des amants, vers Paris ;
Et le temple croula parmi les lauriers roses.

Charles Cros ("Le Collier de griffes", 1908 [recueil posthume] - Gallimard poésie 1972)



1 mars 2008

Yvan DAUTIN - le féminin en poésie

Yvan Dautin, poète-chanteur, est né en 1945. Il se joue des mots, les mets en scène. L'humour, l'amour et le désamour sont ici et là dans ses textes poétiques. Un texte imagé, surprenant surréaliste, ci-dessous pour Le Printemps des Poètes 2010 avec cette méduse, animal féminin.

Voyez un autre texte dans la catégorie "L'humour des poètes" du Printemps 2009, et le blog http://yvandautin.canalblog.com/

La méduse

La méduse de la plage de Saint-Malo
Fait du vélo sur la plage à Saint-Malo
Les coquillages et les crustacés
En ont assez de se faire écraser

Sous les rayons d'un vélo majuscule
Et d'une méduse qui vous tentacule
Ouille, ouille, ouille !
C'est là qu'il faut pas s'en méli-mélo les pinceaux
Dans la chaîne de vélo...
Je continue

La méduse de la plage de Saint-Malo
Fait du vélo sur la plage à Saint-Malo
Elle en pince pour un crabe
Elle en pince pour un crabe
Fabricant de chateaux de sable
Mais qui recule dès qu'il la voit

Alors la méduse de Saint-Malo fait du mélo
Sur la plage de Saint-Malo
A pied, à ch'val, en voiture et à vélo
Les coquillages et les crustacés
En ont assez de se faire écraser

Sous les rayons d'un vélo majuscule
Et d'une méduse qui vous tentacule
Ouille, ouille, ouille !
C'est là qu'il faut pas s'en méli-mélo les pinceaux
Dans la chaîne de bicyclette...
Je continue

La méduse de la plage de Saint-Malo
Fait du mélo sur la plage à Saint-Malo
C'est alors qu'un vieux dromadaire
Qui passait par là en lisant son bréviaire
Et on ne sait trop ce qui se passa
Mais le dromadaire devint papa, ah !

Une méduse un peu volage à Saint-malo
Qui fait du vélo sur la plage à Saint-Malo
Les coquillages et les crustacés
En ont assez de se faire écraser

Sous les rayons d'un vélo majuscule
Et d'une méduse qui vous tentacule
Ouille, ouille, oh, oh, oh, trop tard !
C'est déjà fait, ouh, ouh, ouh, ah, ah !

 

Yvan Dautin (paroles et musique)



1 mars 2008

Luc DECAUNES - le féminin en poésie

Luc Decaunes (1913-2001), instituteur et journaliste français, était écrivain, biographe ("Les idées noires" , "Vie de Paul Éluard"...) et poète ("Le feu défendu", "Récréations", "Le cœur légendaire"...).
Sans appartenir lui-même réellement au Mouvement surréaliste, il était proche d'Éluard, Aragon, Tzara.

Silence

L’oiseau qui chantait dans l’ombre,
C’est ma lampe sur la table,
C’est son reflet impalpable
Sur le plafond enfumé.

Son duvet chauffe ma joue,
Sa patte est sur mon épaule,
Et je n’ose plus bouger
De crainte qu’il ne s’envole …

Mais attends encore un peu,
Que j’abaisse ma paupière :
Cet oiseau, c’est une fille
Qui me regarde dormir,

Jusqu’à ce que sa bouche rose,
La berceuse de ses bras nus,
La douceur de sa parole
Et mon cœur ne soient plus qu’un.

Luc Decaunes ("Paraphes - anthologie poétique", 1991)

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Sur le livre d'or d'une petite fille (dernier chapitre)

[...]

IV

Je vous vois deux grâces sûres.
Votre regard est blessure,
Votre sourire est chanson.
Mais gardez que d'aventure
L'esprit, dont la force est pure,
Ne manque à votre blason.
Pour que vivre ne désole,
Il faut savoir être folle
Avec un brin de raison.

Printemps 1945.

Luc Decaunes ("Récréations" - Éditions Rougerie, 1977)

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Voici de ce long poème en 8 chapitres (les 7 précédents sont en prose), l'intégralité de la dernière partie. L'ensemble est entièrement dédié à la femme. Les deux premières strophes peuvent sans doute être proposées aux grands élèves.

Les nouvelles prières (dernier chapitre)

[...]

VIII

Femme, fruit de la mer originelle
Femme, splendeur de la terre souveraine
Femme, l'éclat de la lumière fugitive
Qui flambe et ne revient pas
Accueille-moi

Femme, promesse de beauté
Femme, soleil d'injustice passionnée
Femme, miroir de mensonge et de vérité
Accueille-moi

Femme nombreuse
Femme tumultueuse
Femme, princesse des éveils
Femme, ange du charnel conseil
très puissante et très impatiente
Accueille-moi

Femme douce et vaste de cœur
confidente des convoitises
zélatrice des luxures
notre vie et notre voie
Accueille-moi

par le mystère de ton cri
Par tes travaux de fièvre et de rosée
Par ta vocation des caresses
Par ton agonie amoureuse et ta flambée perpétuelle
Par tes naufrages et tes résurrections
éclaire-moi enseigne-moi
délivre-moi.

1947

Luc Decaunes ("Récréations" - Éditions Rougerie, 1977)



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1 mars 2008

Robert DESNOS - le féminin en poésie

Robert Desnos (1900-1945) a fait partie avec Benjamin Péret et André Breton du mouvement Dada et du  surréalisme. Il rompra plus tard avec eux. Auteur de nombreux textes poétiques, ses poèmes pour les enfants sont très connus (" Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, 1995).
Engagé dans la Résistance, il est incarcéré à Compiègne, puis déporté. Il meurt au camp de concentration de Térézin (Theresienstadt, en Tchécoslovaquie).

Ce poème joue sur les échanges de lettres ou de syllabes,  à la manière (mais sans l'intention grivoise évidemment), de contrepèteries, et l'invention de mots :

Le canapé de Paméla

Le canapé de Paméla
Le Panapé de Caméla
Le Panala de Camépé

Est un beau canaquois
Est un nabeau est un naquois
Charmante Panapé
Charmante Paméla

Le charme de Paméla
Le charme du canapé
Il est passé par ici
Il repassera par là
C’est un nabeau c’est un naquois
Charmante Paméla
Délicieux canapé

Robert Desnos ("Youki 1930 Poésie" - publication posthume dans "Destinée arbitraire" - Gallimard, 1975)

 fille_verte_cr_ation__PP10Jouer avec les syllabes

Les élèves peuvent rechercher des mots connus dans le dictionnaire en suivant, comme dans le poème de Robert Desnos, certains critères : le même nombre de syllabes et des voyelles communes, ou pas. Ils s'exercent à la permutation simple de syllabes entre deux mots, et en vérifient le possible effet amusant. On construit ensuite autour des mots appariés un texte structuré, en enrichissant le thème développé, sur le mode humoristique.

L'exemple  ci-dessous, utilise des prénoms féminins et s'autorise quelques entorses à la règle  :

Mes trouvailles 

J'ai cueilli des radis pour Annie
des rideaux et des radeaux pour Anna ...
(texte complet au paragraphe Charpentreau de la catégorie PRINT POÈTES 2009 : L'HUMOUR des poètes)

On retrouvera avec d'autres auteurs [Boby Lapointe par exemple] d'autres procédés basés sur les jeux de mots.
Voir également "La Belle Lisse Poire du prince de Motordu" de Pef, ainsi que les autres livres de la série, et le "Dictionnaire des mots tordus ", du même auteur.

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Un poème pour la classe à plusieurs niveaux, si on en propose des passages :

Ma sirène

Ma sirène est bleue comme les veines où elle nage
Pour l'instant elle dort sur la nacre
Et sur l'océan que je crée pour elle
Elle peut visiter les grottes magiques des îles saugrenues
Là des oiseaux très bêtes
conversent avec des crocodiles qui n'en finissent plus
Et les oiseaux très bêtes volent au-dessus de la sirène bleue
Les crocodiles retournent à leur boire
Et l'île n'en revient pas ne revient pas d'où elle se trouve
où ma sirène et moi nous l'avons oubliée
Ma sirène a des étoiles très belles dans son ciel
Des étoiles blondes aux yeux noirs
Des étoiles rousses aux dents étincelantes
et des étoiles brunes aux beaux seins
Chaque nuit trois par trois
alternant la couleur de leurs cheveux
Ces étoiles visitent ma sirène
Cela fait beaucoup d'allées et venues dans le ciel
Mais le ciel de ma sirène n'est pas un ciel ordinaire ...
Ma sirène a des savons de toutes formes et de toutes couleurs
C'est pour laver sa jolie peau
Ma sirène a beaucoup de savons
L'un pour les mains
L'autre pour les pieds
Un pour hier
Un pour demain
Un pour chacun des yeux
Et celui-là pour sa queue d'écailles
Et cet autre pour les cheveux
Et encore un pour son ventre
Et encore un pour ses reins.
Ma sirène ne chante que pour moi
J'ai beau dire à mes amis de l'écouter
Personne ne l'entendit jamais
Excepté un, un seul
Mais bien qu'il ait l'air sincère
Je me méfie car il peut être menteur.

Robert Desnos ("Les nuits blanches" dans "Destinée arbitraire" - éditions Poésie/Gallimard, 1975 - publication posthume)

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Fourmi_au_feutre_ind_l_bile_JSE2<< ci-contre, fourmi au feutre indélébile sur fond  gouache et huile. Techniques d'illustration visibles sur le blog http://jourssemisentre2.canalblog.com/

La fourmi

Une fourmi de dix-huit mètres
Avec un chapeau sur la tête,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi traînant un char
Plein de pingouins et de canards,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi parlant français;
Parlant latin et javanais,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Eh ! Pourquoi pas ?

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

fille_verte_cr_ation__PP10À la manière de "une fourmi de dix-huit mètres ..."

voici une adresse où vous trouverez des textes imités de "La fourmi" : http://clicnet.swarthmore.edu/rire/textes/desnos.html

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La dame pavot nouvelle épousée

La dame pavot nouvelle épousée
a demandé à son mari
Quelle est l'année ?
Quel est le mois ?
Quelle est la semaine ?
Quel est le jour ?
Quelle est l'heure ?
Et son mari a répondu
- Nous sommes en l'an quarante
nous sommes au mois de Juillobre
semaine des quatre jeudis
jour de gloire
midi sonné.
Belle année, agréable mois,
charmante semaine,
jour merveilleux
Heure délicieuse.

Robert Desnos ("Le parterre d'Hyacinthe" publication posthume dans "Destinée arbitraire" - Gallimard, 1975)

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Sa publication posthume en justifie le titre : "Le dernier poème". En réalité, même authentique, il est sans doute le condensé, de mémoire, du texte "J'ai tant rêvé de toi",reproduit à sa suite, que Robert Desnos a publié en 1930. source, autres textes et intéressante histoire de ce poème ici : http://pagesperso-orange.fr/d-d.natanson/desnos.htm

Le dernier poème

J'ai rêvé tellement fort de toi,
J'ai tellement marché, tellement parlé,
Tellement aimé ton ombre,
Qu'il ne me reste plus rien de toi,
Il me reste d'être l'ombre parmi les ombres
D'être cent fois plus ombre que l'ombre
D'être l'ombre qui viendra et reviendra
dans ta vie ensoleillée.

Robert Desnos ("Domaine public" - Gallimard, 1953)

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J'ai tant rêvé de toi

J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.
Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant
Et de baiser sur cette bouche la naissance
De la voix qui m'est chère?

J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués
En étreignant ton ombre
A se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas
Au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante
Et me gouverne depuis des jours et des années,
Je deviendrais une ombre sans doute.
O balances sentimentales.

J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps
Sans doute que je m'éveille.
Je dors debout, le corps exposé
A toutes les apparences de la vie
Et de l'amour et toi, la seule
qui compte aujourd'hui pour moi,
Je pourrais moins toucher ton front
Et tes lèvres que les premières lèvres
et le premier front venu.

J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé,
Couché avec ton fantôme
Qu'il ne me reste plus peut-être,
Et pourtant, qu'à être fantôme
Parmi les fantômes et plus ombre
Cent fois que l'ombre qui se promène
Et se promènera allègrement
Sur le cadran solaire de ta vie.

Robert Desnos ("Corps et biens" - Gallimard, 1930)

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À la mystérieuse

J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.
Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant
Et de baiser sur cette bouche la naissance
De la voix qui m'est chère?

J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués
En étreignant ton ombre
A se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas
Au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante
Et me gouverne depuis des jours et des années,
Je deviendrais une ombre sans doute.
O balances sentimentales.

J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps
Sans doute que je m'éveille.
Je dors debout, le corps exposé
A toutes les apparences de la vie
Et de l'amour et toi, la seule
qui compte aujourd'hui pour moi,
Je pourrais moins toucher ton front
Et tes lèvres que les premières lèvres
et le premier front venu.

J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé,
Couché avec ton fantôme
Qu'il ne me reste plus peut-être,
Et pourtant, qu'à être fantôme
Parmi les fantômes et plus ombre
Cent fois que l'ombre qui se promène
Et se promènera allègrement
Sur le cadran solaire de ta vie.

Robert Desnos ("Corps et biens" - Gallimard, 1930)

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La furtive

La furtive s'assoit dans les hautes herbes pour se reposer d'une course épuisante à travers une campagne déserte.
Poursuivie, traquée, espionnée, dénoncée, vendue.
Hors de toute loi, hors de toute atteinte.
À la même heure s'abattent les cartes
Et un homme dit à un autre homme : "À demain."
Demain, il sera mort ou parti loin de là.
À l'heure où tremblent les rideaux blancs sur la nuit profonde,
Où le lit bouleversé des montagnes
béant vers son hôtesse disparue
Attend quelque géante d'au-delà de l'horizon,
S'assoit la furtive, s'endort la furtive
Dans un coin de cette page.
Craignez qu'elle ne s'éveille,
Plus affolée qu'un oiseau se heurtant aux meubles et aux murs.
Craignez qu'elle ne meure chez vous,
Craignez qu'elle s'en aille, toutes vitres brisées,
Craignez qu'elle ne se cache dans un angle obscur,
Craignez de réveiller la furtive endormie.

Robert Desnos ("Domaine public" - Gallimard, 1953)

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Des fleurs au féminin :

La marjolaine et la verveine

La marjolaine et la verveine
La marjoveine et la verlaine
La verjolaine et la marveine
Chez Catherine ma marraine
On fait son lit de marjolaine
Et de verveine.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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Le narcisse et la jonquille

Es-tu narcisse ou jonquille ?
Es-tu garçon, es-tu fille ?
Je suis lui et je suis elle,
Je suis narcisse et jonquille,
Je suis fleur et je suis belle
Fille.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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La lavande

Lavandière, lavandière !
As-tu vu le poisson bleu
Qui nageait dans la rivière ?
Il t’apportait la lavande,
La lavande en bouquet bleu,
Poisson bleu, fleurs de lavande,
Poisson bleu.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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La pervenche et la primevère

Doña Dolorès Primevère,
Lady Roxelane Pervenche
Un beau dimanche,
Montent en haut du belvédère.
Rêveuse pervenche,
Douce primevère,
Radieuse atmosphère.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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La pivoine

Marchande de pivoines
Au faubourg Saint-Antoine,
Chausse tes gros sabots,
Couleur d’orange et de pivoine,
Et viens sur mon bateau,
Pivoine, pivoine,
Pêcher dans l’eau
Joyeux matelots.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)



1 mars 2008

Michel DEVILLE - le féminin en poésie

Michel Deville est né en 1931. C'est un cinéaste connu : Un Monde presque paisible, La Maladie de Sachs, Benjamin ou les Mémoires d’un puceau, Péril en la demeure, le Dossier 51, La Lectrice
C'est aussi un poète, moins connu, auteur de huit recueils au Cherche-midi éditeur : Rien n'est sûr, Poézies, Mots en l'air, L'Air de rien ...

Un texte à la manière de Rudyard Kipling ("Tu seras un homme mon fils", voir plus bas ) , déjà présenté pour l'humour des poètes, et bien dans le thème 2010 du féminin ...

Lorsque et si ...

Lorsque l'on tremble encore à l'approche de l'autre,
Lorsque le doute encore est infiniment nôtre,
Lorsque les intuitions sont approximatives,
Lorsque devient l'humeur, pour un rien, agressive,
Lorsque la main est moite et le regard crétin,
Lorsque le tutoiement est encore incertain,
Lorsqu'on éclate en pleurs pour une peccadille,
C'est qu'on est amoureux, ma fille.

Si tu ne trembles plus, si tu n'as plus de doute,
Si ton humeur est droite ainsi qu'une autoroute,
Si galante est ta main
Et ton regard câlin,
Si tu en viens au tu sans tergiversation,
Si tu ne pleures plus avec obstination,
Si tu tires la langue à toute ta famille,
Tu seras un homme, ma fille.

Michel Deville ("Rien n'est sûr")

Voici le poème original, que Rudyard Kipling, a écrit "If ..." (Si ...), en 1910. C'est la version traduite de l'anglais par l'écrivain Pierre Maurois (en 1918), qui est généralement retenue :

Tu seras un Homme, mon Fils (autre titre : Si ...)

Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.

Rudyard Kipling   (Bernard Lavilliers l'a mis en musique et interprété (1988).

Pour les amateurs, il existe d'autres traductions de la poésie de Kipling, la dernière de 2006 !

Voyez plutôt ici : http://www.crescenzo.nom.fr/kipling.html

fille_verte_cr_ation__PP10Mise au féminin : Utiliser le poème de Kipling et le décliner selon les qualités (ou les défauts !) qu'on souhaite pour qu'une fille devienne un homme, (humour indispensable) ou bien encore rechercher des textes très étiquetés "masculins" (animaux, personnes) et les féminiser en en modifiant descriptions et situations. 



1 mars 2008

Charles DOBZYNSKI - le féminin en poésie

Charles Dobzynski est né en 1929. Il quitte sa Pologne natale pour la France avec sa famille, à l'âge d'un an.
Il côtoie Paul Éluard, Louis Aragon et Elsa Triolet, Pierre Gamarra, Tristan Tzara ... Il est le traducteur des textes du poète allemand Rainer Maria Rilke.

Un texte terrible, inconvenant presque ...

La mère

Je t'ai appris tout ce que j'avais. Tu as pris ma vie et tu n'as rien compris. Je t'ai nourri. Tu m'as tarie. Je t'ai guéri. Tu m'as meurtrie. Je t'ai habillé. Tu m'as dépouillée. Je t'ai nettoyé. Tu m'as noyée. Je t'ai lové. Tu m'as volée. Je t'ai adulé. Tu m'as annulée.
Je t'ai déployé, tu m'as repliée. Je t'ai blanchi. Tu m'as noircie. J'ai étét ton refuge, toi mon refus. Je t'ai inventé et vantéTu m'as évidée, évitée. Je t'ai changé et tu t'en es vengé. Je ne cesse de te chanter, toi qui me désenchantes.

Charles Dobzynski  ("Traduit en justice" - Le Verbe et l'empreinte (1980) - illustrations de Marc Pessin



1 mars 2008

Paul ÉLUARD - le féminin en poésie

Paul Éluard (1895-1952) est l'un des plus importants poètes du Surréalisme. Il a aussi participé au mouvement Dada.

L'amoureuse

Elle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens,
Elle a la forme de mes mains,
Elle a la couleur de mes yeux,
Elle s'engloutit dans mon ombre
Comme une pierre sur le ciel.

Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s'évaporer les soleils
Me font rire, pleurer et rire,
Parler sans avoir rien à dire.

Paul Éluard ("Capitale de la douleur" - Gallimard, 1926 - en Poésie/Gallimard depuis 1966) 

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La courbe de tes yeux

La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j’ai vécu
C’est que tes yeux ne m’ont pas toujours vu.

Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sources des couleurs,

Parfums éclos d’une couvée d’aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l’innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.

Paul Éluard ("Nouveaux poèmes" "Capitale de la douleur" - Poésie/Gallimard, depuis 1966)

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Portrait

Bouclier d’écume la joue
Air pur le nez marée le front
Filet de chaleur de la bouche
Balance du bruit le menton
Pour finir par un vol d’oiseaux

Voici que naissent les lumières
Des paroles sur les collines
De ses yeux verts

Et le beau temps
A la forme de sa tête.

Paul Éluard ("Une longue réflexion amoureuse" - Seghers, 1978 - repris dans "derniers poèmes d'amour" - Seghers Poésie d'abord, 2002)

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Air vif

J'ai regardé devant moi
Dans la foule je t'ai vue
Parmi les blés je t'ai vue
Sous un arbre je t'ai vue

Au bout de tous mes voyages
Au fond de tous mes tourments
Au tournant de tous les rires
Sortant de l'eau et du feu

L'été l'hiver je t'ai vue
Dans ma maison je t'ai vue
Entre mes bras je t'ai vue
Dans mes rêves je t'ai vue

Je ne te quitterai plus.

Paul Éluard ("Derniers poèmes d'amour")

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Les deux courts poèmes numérotés qui suivent sont prélevés dans le chapitre "Premièrement"  de "L'amour, la poésie", repris dans le recueil Poésie/Gallimard cité, "Capitale de la douleur". "L'amour, la poésie" est entièrement dédié à Gala, sa première épouse, qui sera plus tard la compagne et l'égérie de Salvador Dalí.

Premièrement (très courts extraits)

poème XXIII

 
De mes mains à tes yeux

Et dans tes cheveux
Où des filles d’osier
S’adossent au soleil
Remuent les lèvres
Et laissent l’ombre à quatre feuilles
Gagner leur coeur chaud de sommeil.
...
 
 poème XXIX
 
Il fallait bien qu'un visage
Réponde à tous les noms du monde.

Paul Éluard ("Capitale de la douleur" - Poésie/Gallimard depuis 1966) 



1 mars 2008

Maurice FOMBEURE - le féminin en poésie

Maurice Fombeure (1906-1981) est un romancier et poète français.
Son recueil de poèmes le plus connu est "À dos d'oiseau", édité en 1942 aux éditions Gallimard et disponible en Poésie-Gallimard.

Air de ronde

On dansa la ronde,
Mais le roi pleura.
Il pleurait sur une
Qui n’était pas là.

On chanta la messe,
Mais le roi pleura.
Il pleurait pour une
Qui n’était pas là

Au clair de la lune,
Le roi se tua,
Se tua pour une
Qui n’était pas là.

Oui, sous les fougères
J’ai vu tout cela,
Avec ma bergère
Qui n’était pas là.

Maurice Fombeure

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Les deux textes qui suivent ont été empruntés ici, où on en trouve d'autres sur des thèmes différents : http://www.amicalien.com/membres/LeForum/f801-t3988809-s1-maurice-fombeure-le-siauguain-1906-1981-.htm

On pourra proposer des passages de ce texte intime :  

Ma femme

Celle qui partage mon pain
Mon lit et mes joies et mes peines
Éloigne de mon front les haines
D’une caresse de sa main
Que je retrouve dans chaque aube
Et plus belle d’avoir vécu,
J’écoute au fond d’un jour vaincu
Le doux bruissement de sa robe.
Contre les pièges dont dispose
Le malheur, paré désormais
Elle apprête les vins, les mets
Et dans les vases bleus, les roses.
"Ma femme." Le beau possessif
Surtout si la compagne est belle
Blanche, élancée comme un if
Et qui chaque an se renouvelle.
Pour le pire et pour le meilleur

C’est, inlassable volontaire,
Pour l’ici-bas et pour l’ailleurs
Le plus beau don de cette terre
Que cet être aux mains de douceur
Épouse, amante, femme et sœur.

Maurice Fombeure ("C'était hier et c'est demain" - Seghers, 2004)

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Chanson de la belle

Sous un pêcher en fleur
La belle s'est assise,
La belle qui est triste
Qui n'a pas d'amoureux,

Qui n'a pas d'amoureux
Pour lacer sa chemise.

Sous un pêcher en fleur
La belle entend la neige
La belle entend la neige
Qui tombe dans son cœur.

Ne pleurez pas la belle
L'amour rend malheureux.

J'aimerais mieux souffrir
À cause des amours,
J'aimerais mieux souffrir
Que d'être là seulette

À voir tomber la neige
Dans un pêcher en fleur.
 

Maurice Fombeure

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Chanson du loup et de la bergère

(introduction - le texte du poème suit)

 Les guitares, les cithares
Les tambours et le printemps,
Les vielles, les violes...
Mais la reine d'un sourire
Brise ces vergers chantants :


« Та chèvre est dans le trèfle, Maria,
Та chèvre est dans le trèfle
Dans le trèfle du roi, Maria,
Dans le trèfle du roi. »

"Va la chercher, ma chèvre,
Mon beau chien de berger.
Tu auras du pain d'orge
Et des os à ronger."

Quand il fut à la chèvre
Les loups l'avaient mangée.
Ma bergère, bergeronnette,
Ma bergère en a pleuré.

Ma, bergère bergeronnette,
Ma bergère en a pleuré.
 

Maurice Fombeure ("À dos d'oiseau" - éditions Gallimard, 1942, disponible en Poésie/Gallimard, 1971)

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 C'est le joli printemps

C'est le joli printemps
Qui fait sortir les filles,
C'est le joli printemps
Qui fait briller le temps.

J'y vais à la fontaine,
C'est le joli printemps,
Trouver celle qui m'aime,
Celle que j'aime tant.

C'est dans le mois d'avril
Qu'on promet pour longtemps,
C'est le joli printemps,
Qui fait sortir les filles,

La fille et le galant,
Pour danser le quadrille.
C'est le joli printemps
Qui fait briller le temps.

Aussi, profitez-en,
Jeunes gens, jeunes filles;
C'est le joli printemps
Qui fait briller le temps.

Car le joli printemps,
C'est le temps d'une aiguille.
Car le joli printemps
Ne dure pas longtemps.

Maurice Fombeure ("À dos d'oiseau" - éditions Gallimard, 1942, disponible en Poésie/Gallimard, 1971)



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