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1 avril 2008

PP 09 : l'humour de ROLAND BACRI

livre_Bacri_Le_Petit_Po_te

- Roland Bacri -

Roland Bacri est un humoriste, écrivain et poète né en Algérie, à Bab-el-Oued, en 1926. Arrivé en France en 1956, il entre au Canard Enchaîné. Il publie ses poèmes dans l'hebdomadaire satirique sous son nom ou sous deux pseudonymes : Le Petit Poète et Roro de Bab-el-Oued. Des textes, fables ou historiettes où s'exprime l'amour du pays natal, l'amour de la vie et de ses plaisirs, la parodie d'auteurs, mais souvent la critique et la moquerie sociales et politiques.
Les jeux de mots sont sa gymnastique quotidienne (et la gymnastique hebdomadaire des lecteurs du Canard).
Quelques titres d'ouvrages : Le Petit Poète (La Canardothèque, 1957 et Éditions Syros 1998 en édition réduite - photo), Et alors ! Et oilà ! (Edmond Nalis, 1968 et Balland 1972), Poèmes colère du temps (Denoël, 1970), La légende des siestes (Balland, 1973), L'obsédé textuel (Julliard, 1974).

  • On trouvera dans cette même catégorie, des fables d'un autre auteur abonné au Canard : Gabriel Macé, sous le pseudonyme de Jean de la Futaille.

"Les hauts cris s'envolent,
les Bacri restent..."
Roland Bacri (devise familiale selon l'auteur)

disque_Bacri

Une charmante poésie pour rêver avec les mots. Ce texte avec d'autres de l'auteur, a été mis en musique par Jean Claudric et chanté par Denise Benoît dans un disque auquel Raymond Devos a participé (Fontana, 1960).

Le petit somnambule

Sa chemise de nuit
Flottant dans l'air du soir
Le petit somnambule
Déambule
Bras tendus devant lui
Dans le noir.

Il a laissé son lit,
Son drap tiède et ourlé,
sa femme en bigoudis
Pour mêler
Un songe à cette nuit
De l'été.

Le petit somnambule
Bavarde avec la nuit.
Les astres noctambules
Vont sans bruit
Et toutes les pendules
Font minuit.

Le monde naufragé
Dans un fond de décor
Est là, en bas, figé,
Qui dort
D'un sommeil allongé
Comme un mort.

N'est-il pas mieux luné
Mon poète un peu fou,
Rêveur du toit qui penche,
Ombre blanche
Qui près des cheminées
Dort debout ?

Il danse un pas léger
Sur un rayon de lune...
On entend tout là-haut
Les bravos
Des étoiles rangées
Une à une

Dans un ciel d'opéra.
Et la nuit tout entière
Le petit somnambule,
Funambule,
Fait de beaux entrechats
De gouttière.

Le Petit Poète (Roland Bacri - recueil Le Petit Poète - La Canardothèque, 1957)
Ce texte n'a hélas pas été repris dans le recueil paru aux Éditions Syros en 1998.

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Une belle rencontre :

Histoire salée

La douce rivière
Sortant de son lit
S'est jetée ma chère
Dans les bras mais oui
Du beau fleuve

L'eau coule sous les ponts
Et puis les flots s'émeuvent
- N' êtes-vous au courant ?
Il paraît que la rivière
Va devenir mer !...

Le Petit Poète (Roland Bacri - recueil Le Petit Poète - La Canardothèque, 1957 et Syros, 1998)

logo_cr_ation_po_tique Jeux de mots

On pouvait choisir d'autres poèmes pour cette activité de jeu sur les mots, mais celui-ci en présente une variété intéressante. Un thème unique y est développé, avec le lexique qui s'y rattache.

  • Observer, rechercher dans ce poème de Roland Bacri les jeux de langage, expressions détournées, sens figuré pris au sens propre, homonymies...
  • Choisir un autre domaine, lister le lexique (peut-être en travail collectif pour au moins cette première recherche), puis les expressions, des homonymes, avec l'aide du dictionnaire, qui contiennent des éléments de ce lexique, significatifs.
  • Construire de courtes phrases (un poème entier c'est difficile). Regrouper les productions, relier, améliorer l'ensemble.

Exemple : recherche autour du thème de la pluie, mais on sera amené à effectuer d'autres recherches (dans l'exemple du blog, sur les animaux)

lexique : soleil, orage, éclaircie, arc-en-ciel, ciel bleu, gris, pluie, neige, grêle, il pleut, il neige, pleuvoir à verse ... tomber des cordes, des seaux / être trempé / un parapluie, un paratonnerre...

expressions : passer entre les gouttes / être trempé jusqu'aux os... comme une soupe / ennuyeux comme la pluie / faire venir la pluie / ne pas être né, ou tombé, de la dernière pluie /parler de la pluie et du beau temps / faire la pluie et le beau temps / après la pluie vient... / laisser passer l'orage...

homonymies, doubles-sens : averse - à verse / plu (pp de pleuvoir) et plu (pp de plaire) / le temps (celui qui passe) et le temps (qu'il fait) / ...

exemple proposé par le blog, champ lexical de  la pluie entre-autres :

Le lézard et l'escargot

Le soleil, le lézard s'y dore
il adore
l'astre qui luit

L'escargot lui
ne prend son pied que sous la pluie,
il dit que le soleil c'est un désastre*

Or,
voici qu'il pleut, il pleut à verse.
Au début, ça lui a plu un peu beaucoup

à la folie
et comme il est un peu fêlé
l'eau est entrée
dans sa maison.

Il abandonne au courant
sa coquille de noix.

Devenu limace
il passe
maintenant son temps
à lézarder au soleil.

* jeu de mots un peu emprunté à Roland Bacri : "En France, le soleil c'est un des astres. À Alger, c'était l'astre du jour". (Roland Bacri dans "Et alors! et oilà!", ses chroniques de Bab-el-Oued publiées en 1968)

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Leçon d'Histoire rapide :

L'Odyssée

Ulysse ?
Que vouliez-vous qu'il fît
Contre Troie ?

Roland Bacri (Le Petit Lettré Illustré - éditions Balland, 1971)

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Science-fiction

La fusée vrombrissante
Troue
Le vide interstellaire.

L'homme de l'espace
Regarde défiler
Les astres galactiques.

Tout-à-coup
Il titube,
Se cramponne aux commandes

Comme
S'il avait reçu
Une gifle terrible...

Reprenant ses esprits :
"...Tiens,
Déjà
La calotte des cieux ? "

Le Petit Poète (Roland Bacri, dans Le Canard Enchaîné du 22 août 1956)

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La vie des bêtes et des hommes au temps de la vache folle et de la grippe aviaire, y a de quoi tourner en bourrique :

Intermède zoo

L'homme avait greffé
Une taille de guêpe
À la baleine
Il avait paré le geai
Avec les plumes du paon
Sorti le loup du boa
Le brochet de l'oie
Le dindon de la farce...

Un jour c'est la petite bête
Qui chercha l'homme

Le rat sortit de l'hôtel
Le loup du bois
Le dindon de la farce
La grenouille du bénitier
L'âne se chargea des reliques
Le requin de la finance
Le petit oiseau du photographe
Et
La vache de nous tous.

Et en moins de temps
Qu'il en faut à l'homme
Pour dire ouf
Grande bouffe
Des fourmis dans les jambes
La puce à l'oreille,
Un chat dans la gorge
Tout fut consommé

Et ce re-fut
- vraiment pas de refus -
l'âge bête
où les bêtes parlaient
et l'homme pouvait
appeler un chat un chat.

Roland Bacri (Le 25 février 2006 sur son site Internet dont il annonce la fermeture : http://www.rolandbacri.com

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Roro de Bab-el-Oued sur les chemins blancs et bleus de sa nostalgie :

Mon petit bonhomme de chemin (début du poème)

Mon petit bonhomme
De chemin
Ne menait pas à Rome
Comme
Tous ces chemins
Qui partent
Pour arriver
Et que l'on peut trouver
Sur les cartes.

Ce n'était pas
Un de ces sentiers battus
Comme il y en a
Tant
Un de ces sentiers battus
Et pas contents
Qui se font tout le temps
Marcher dessus.

C'était un sentier
De jeunesse,
Le chemin des écoliers,
De l'occasion, de l'herbe tendre
Des cailloux blancs

Et des feuilles mortes
Qui ne se ramassent pas à la pelle.

Il aimait échanger
Des propos en l'air
Avec le vent léger,
Faire
De charmants saluts
Aux primevères
Des talus.

Les écureuils
Lui faisaient de l'œil,
Les escargots en bavaient
Et les hirondeaux
Y jouaient
Au rondeau.
[...]

Roland Bacri (Le Petit Poète - La Canardothèque, 1957 et Syros, 1998)
Ce texte n'a hélas pas été repris dans le recueil paru aux Éditions Syros en 1998.

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de PIERRE BÉARN

- Pierre Béarn -

Pierre Béarn (1902-2004), poète et romancier français, a traversé le XXe siècle entier. Il est connu des écoliers pour ses recueils de fables, où même les objets mathématiques ne sont pas raisonnables.

Homme,
qui que tu sois
tu n’emporteras rien
avec toi.


Pierre Béarn

Ce rectangle personnalisé rappelle la géométrie de Guillevic, qu"on trouvera plus loin dans cette catégorie.

Un rectangle

Un rectangle se voulait carré
ce qui l'obligeait à maigrir
il se mit à réfléchir
pour découvrir un procédé
capable de réajuster
la démesure de ses flancs...
Et le voilà glissant glissant
se retournant de droite à gauche
tant et tant, tant et tant et tant
qu'il ne parvint qu'à s'arrondir!
En découvrant qu'il était rond
le rectangle voulut mourir.
C'est pourtant beau d'être un ballon
lorsqu'on s'envole vers le ciel
mais s'il faut être honoré
par de violents coups de pieds
il vaut mieux rester carré.

Pierre Béarn ("300 Fables d'aujourd'hui" - éditions EDITINTER, 1999)

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Balle arithmétique (titre et texte corrigés, maintenant conformes au texte du recueil)

À la une, on m'offre la Lune
À la deux, je la coupe en deux
À la trois, je la donne aux oies
À la quatre, on veut me combattre
À la cinq, je rencontre un prince
À la six, j'aime une écrevisse
À la sept, je deviens trompette
À la huit, on me déshérite
À la neuf, j'ai des souliers neufs
À la dix, j'ai du bénéfice !

Pierre Béarn ("300 Fables d'aujourd'hui" - éditions EDITINTER, 1999)

logo_cr_ation_po_tiqueComptines et actions de jeux

Voir ci-dessus les comptines numériques. Les jeux de balle au mur*, entre-autres, s'accompagnent souvent de comptines rythmées :
"Je joue à la balle / contre la muraille / un peu plus haut / je casse un carreau / un peu plus bas / je tue mon chat..." ("pour de faux" bien entendu).

 Sur le modèle du texte de Pierre Béarn, construire une comptine en liaison avec les lancers de balle contre le mur. * On peut y écrire, sur le mur ou y tracer des motifs à la craie, matérialisant les étapes à passer.

Autre exemple, les fils tendus :

Succession de 4 ou 5 actions à effectuer avec deux fils parallèles tendus, jeu pratiqué surtout par les filles dans les cours de récréation  (une occasion pour les garçons de le découvrir). Les deux fils limitent le cours de la rivière, rive gauche, rive droite, en amont, en aval, la source, la mer, bateau, nager, se noyer ... D'autres jeux peuvent se mettre en comptine rythmée : les jeux de corde à sauter, la marelle ...

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Une mouette et le printemps

Une mouette sans vergogne
s'imaginait une cigogne
Sur la cheminée d'un cargo.

- C'est moi le printemps ! criait-elle
mais elle avait bu trop de vent
car sur le baleinier dolent
Les matelots fêtaient Noël.

Pierre Béarn ("300 Fables d'aujourd'hui" - éditions EDITINTER, 1999)

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La lionne et la mouche

Une mouche en vagabondage
pique ici pique là
agaçait d'un dard innocent
le museau douillet d'une lionne
tant et tant qu'elle éternua
si bien que la mouche importune
fut projetée sur un lézard
pique ici pique là
qui la goba.

Pierre Béarn ("300 Fables d'aujourd'hui" - éditions EDITINTER, 1999)

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Les araignées et les dictons

Araignée du matin : chagrin
pensait un bébé coccinelle
cherchant à libérer ses ailes

Araignée du midi : souci
grognait un rat dans son chagrin
de voir un chat près de sa belle

Araignée du soir : espoir
disait au briquet l'étincelle
mourant dans le vent du jardin.

Mais l'araignée dans sa nacelle
Prisonnière à vie de sa faim
rêvait qu'elle était hirondelle.

Pierre Béarn ("Fables" - éditions Saint-Germain-des-Prés, 1999)

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1 avril 2008

PP 09 : l'humour de LUC BÉRIMONT

- Luc Bérimont -

De nouveaux textes de Luc Bérimont, en plus de ceux de cette page, et les poèmes des Printemps des Poètes, des saisons, etc, sont maintenant sur le nouveau site créé par le blog, à cette adresse :

http://www.planetelieucommun.fr/http___www.planetelieucommun.fr/auteurs_-_Luc_Berimont.html

Luc Bérimont (1915 -1983), poète et romancier, de son vrai nom André Leclercq, a été un poète engagé. Dans la Résistance pendant la deuxième guerre mondiale, dans ses écrits poétiques, et dans la défense et la promotion de la poésie et de la chanson nouvelles, à l'image du poète-éditeur Pierre Seghers, qu'il a côtoyé.
Il a animé des émissions de radio pour faire connaître chanteurs et poètes (La Fine Fleur).
Des textes de  Luc Bérimont ont été chantés par Léo Ferré, Marc Ogeret ("Madame à minuit, croyez-vous qu'on rêve ?...") ou Pierre Bertin. Ses poésies complètes sont en cours de parution (on attend le second tome) au Cherche midi Éditeur
.
Sa poésie est intense et passionnée ("Un feu vivant", à découvrir peut-être d'abord pour entrer dans son univers). Il a écrit des recueils de poésies pour les enfants, en particulier les Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages (Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974).
On peut  retrouver de magnifiques textes de Luc Bérimont, et un intéressant éclairage sur l'auteur ici : http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/berimont/berimont.html

Quel mic-mac !

Cric et crac
Des ours dans mon parc
Flic et flac
La pluie sur un lac
Tic et tac
L’horloge est patraque
Flic et flac
Trois tours dans mon sac
Mic et mac
Voyez quel micmac !

Luc Bérimont ("Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

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Les points sur les i

Je te promets qu' il n' y aura pas d' i verts
Il y aura des i bleus
Des i blancs
Des i rouges
Des i violets, des i marron
Des i guanes, des i guanodons
Des i grecs et des i mages
Des i cônes, des i nattentions
Mais il n' y aura pas d' i verts

Luc Bérimont ("La poésie comme elle s'écrit" - textes réunis par Jacques Charpentreau - Editions Ouvrières 1979)

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Bientôt je n'aurai plus de voix

Bientôt je n'aurai plus de voix
Disait le voiturier
Bientôt je n'aurai plus de chats
Disait le châtaignier
Bientôt je n'aurai plus de rats
Disait le râtelier
Bientôt je n'aurai plus de poux
Disait le poulailler
Bientôt je n'aurai plus de rampe
Disait le rempailleur
Mais tous ceux qui ne disaient rien
Tous ceux-là n'en pensaient pas moins.

Luc Bérimont ("L'esprit d'enfance" - Enfance heureuse, Éditions Ouvrières et éditions de l'Atelier, 1980)

logo_cr_ation_po_tique Les métiers (voir aussi le paragraphe Jacques Charpentreau)

Un peu à la manière de Luc Bérimont, choisir un nom commun concret et expérimenter la transformation du mot en animal ou en métier, existant ou imaginaire (le mot qui le désigne sera un mot réel) en "er","ier", plus difficilement en "iste" ou en "eur"... puis imaginer un lien entre les deux, amusant si possible pour une mise en phrase.
exemple :
pseudo-métier : C'est pas une hirondelle, non, c'est moi qui fais le printemps,  se vantait le printanier
pseudo-métier ou arbre : J'en ai assez de payer des amendes pour les autres, protestait l'amandier
animal : Tout le temps des fourmis dans les pattes, ça gratte, se plaignait le fourmilier   

Ici des productions d'élèves en CE2 et CM1 : http://classe-godard-paulbert.com/po%E8mes.htm

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Les pâtés

J’ai fait des pâtés
pour vous épater :

Dans mon château
un pâté d’veau

Dans mon étable
un pâté d’sable

Dans ma campagne
un pâté d’âne

Dans ma province
un pâté d’prince

Dans mon Paris
un pâté d’riz

Dans ma cambuse
un pâté d’buse

Dans ma fermette
un pâté d’tête

Dans ma chaumière
un pâté d’pierres

Dans mon grenier
un pâté d’clés

Et dans ma cave
un pâté d’raves.

Ah ! les beaux pâtés tout chauds
À cuire avec des grelots.

Luc Bérimont ("Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

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Que faire ?

Que faire ?
dit la mère
à son petit enfant
qui est un éléphant.

Mais l'éléphant d'enfance
a du poil à sa trompe
et rit quand il se trompe.

On se console comme on peut
De ne pas être un oiseau bleu.

Luc Bérimont ("Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

 

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Conjugaison de l’oiseauplume_blanche_blog

J’écris (à la pie)
J’écrivais (au geai)
J’écrivis (au courlis)
J’écrirai (au pluvier)
J’écrirais (au roitelet)
Écris ! (au sirli)
Que j’écrive (à la grive)
Que j’écrivisse (à l’ibis)
Écrivant (au bruant)
Écrit (au pipit)

Luc Bérimont ("La poésie comme elle s'écrit" - 
textes réunis par Jacques Charpentreau - Editions Ouvrières
1979)

logo_cr_ation_po_tique Conjugaison ludique

Exercice à expérimenter en utilisant les temps et les modes qui correspondent au niveau de la classe. Indicatif et impératif pour l'élémentaire sans doute.
Choisir une action,  la mettre en scène (amusante) dans une phrase simple, composée ou complexe (toujours suivant les compétences), au présent, avant de la décliner à d'autres temps en gardant la structure mais en modifiant certains des éléments qui la composent. Le sujet n'est pas forcément un pronom, ni la première personne du singulier, comme dans le texte de Luc Bérimont (trois des conjugaisons seulement, par nécessité, ne sont pas à la première personne).

Exemple, avec le verbe faire :

Je fais ce qu'il me plaît

Je fis des salsifis confits
Je faisais des salades décomposées
Je ferai des conserves de purée
Que je fasse une tarte à la mélasse
En faisant de la soupe d'éléphant
J'ai fait bouillir le café
Je fais ce qu'il me plaît 


Remarque : les verbes du 3e groupe et les verbes irréguliers sont plus intéressants
que ceux du premier groupe, pour la diversité des rimes en terminaisons.

Voir aussi le paragraphe consacré à Alphonse Allais plus haut, avec une conjugaison au subjonctif non réglementaire.

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Fête aux fous

Fête aux fous
Dis-moi tout

Fête aux sages
Dis ton âge

Fête aux chiens
Ne dis rien

La fête est chez les cigales
Ça prend feu sous les étoiles.

Luc Bérimont (publié initialement dans la revue Poésie 1, n° 28-29 de mai-juin 1973 :  "L'enfant et la poésie")

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Haut les mains

Haut les mains
Peau d'lapin

Haut les bras
Peau d'pacha

Haut les pieds
Peau d'soulier

Haut les têtes
Peau d'ancêtre

Haut les yeux
Peau d'heureux

Haut les cœurs
Peau d'menteur

Haut les dents
Peau d'serpent

Haut les cuisses
Peau d'iris

Haut les cous
Peau d'filou

Haut les nez
Peau d'osier

La peau du marchand de peaux
Je la vends contre un bon mot.

Luc Bérimont (publié initialement dans la revue Poésie 1, n° 28-29 de mai-juin 1973 :  "L'enfant et la poésie")

logo_cr_ation_po_tique Une fiche pédagogique pour jouer avec les rimes à l'image de ce poème, ici :
http://membres.lycos.fr/bareiv/tiens/peda/fiche111.htm

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Je donne pour Paris

Je donne pour Paris
Un peu tabac gris

Je donne pour Bruxelles
Un morceau de ficelle

Je donne pour London
Un paquet d'amidon

Je donne pour Genève
Une poignée de fèves

Je donne pour Tokyo
Un guidon de vélo

Je donne pour Moscou
Un petit sapajou

Je donne pour Madrid
Un envol de perdrix

Je donne à Copenhague
La mer et ses vagues

Je donne à Washington
Tontaine et puis tonton

Luc Bérimont ("Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

logo_cr_ation_po_tiqueUn texte créé par de jeunes élèves à partir de ce poème, à l'adresse du Réveil  de notre ami  Alain L, un site toujours aussi agréable à visiter,
qui se définit maintenant comme
"ancien journal électronique des élèves de l'Unité d'Enseignement de l'IME l'Eveil et de leur enseignant ... et aujourd'hui peut-être simplement un blog pas pareil ...)"
Alain nous donne le nouveau lien actif de ce texte :

http://www.lereveil.info/article-2113790.html

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Il va pleuvoir

Il va pleuvoir
Les marronniers sont noirs.

S'il tombe de l'eau, bernique
Je pars pour la Martinique.

S'il tombe du vin, c'est bien
J'en remplis un cruchon plein.

S'il arrive de la grêle
C'est tant pis pour nos ombrelles

Mais s'il tombe de la neige ?
S'il en tombe, alors, que fais-je ?…

Luc Bérimont ("Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

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Pomme et poire

Pomme et poire
Dans l'armoire

Fraise et noix
Dans les bois

Sucre et pain
Dans ma main

Plume et colle
Dans l'école

Et le faiseur de bêtises
Bien au chaud dans ma chemise.

Luc Bérimont (publié initialement dans la revue Poésie 1, n° 28-29 de mai-juin 1973 :  "L'enfant et la poésie" et dans "Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

logo_cr_ation_po_tique Des exemples de création poétique en CP à partir de ce poème ici :
http://ecl.ac-orleans-tours.fr/ec-emile-zola-mainvilliers/ecole/langue/poesie/divpoesie.htm

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J'ai geigné la pirafe

J'ai geigné la pirafelivre_B_rimont_enfance_couv
J'ai cattu la bampagne
J'ai pordu la moussière
J'ai tarcouru la perre
J'ai mourru les contagnes
J'ai esité l'Vispagne
Barcouru la Pretagne
J'ai lo mon vieux vépris
Je suis allit au lé
J'égué bien fatitais

Luc Bérimont ("L'esprit d'enfance" - Enfance heureuse, Éditions Ouvrières et éditions de l'Atelier, 1980)

logo_cr_ation_po_tique Deux idées pour la création poétique :

Il ne s'agit pas dans le texte ci-dessus de contrepéteries, puisque, sauf exception, les échanges de consonnes ou de voyelles ne créent pas de sens. Voyez ici deux exemples de création poétique  à partir de ce poème :
http://www.ac-nancy-metz.fr/petitspoetes/HTML/SALLESDEJEUX/JEUALAMANIERE/JEUALAMALETTR.html

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Emploi du temps

A onze heures
Chez l’Ambassadeur
A midi
Rue Garibaldi
A une heure
Aller voir ma sœur
A deux heures
Bloquer l’ascenseur
A trois heures
Chez mon directeur
A quatre heures
Je mange des p’tits-beurre
A cinq heures
Je change de secteur
A six heures
Envoyer des fleurs
A sept heures
Je file en douceur
A huit heures
Je consulte l’heure
Que faire à vingt et une heure* ?

Luc Bérimont ("Comptines pour les enfants d'ici et les canards sauvages" - Librairie Saint-Germain-des-Prés, 1974)

(* Note por les enfants : l'heure ne s'écrit au pluriel que quand il s'agit de l'heure exacte).
On trouve ce poème trans (dé)formé, les heures de l'après-midi sont transcrites "quatorze heures", ... "dix-neuf heures", et aussi par ex :
"À vingt heures :
Éviter les heurts."

logo_cr_ation_po_tiqueInventer un emploi du temps

L'emploi du temps de la journée, de la semaine, le calendrier des mois, celui des saisons, sont des grilles solides pour construire un poème en renforçant les connaissances lexicales et le repérage temporel, non ?

Exemple pour une petite classe, avec des repères supposés réels mais des situations fantaisistes :

À huit heures je déjeune de six tartines de beurre
À huit heures et demie, à l'école en bigoudis
À dix heures à la récré,  danse avec un chimpanzé
À  midi à la cantine, je n'avale que des sardines
À
quatre heures et demie,  flûte !  l'école est finie.

  • Variante : On pourrait imaginer avec un découpage similaire un itinéraire local, de la maison à l'école, ou plus généralement un trajet habituel, marqué de plusieurs étapes réelles ou imaginaires, associées à des actions.

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La clé des temps

La clé des temps
La clé des vents
La clé des champs
La clé des gens
La clé des songes
Et des éponges
La clé des clés
Le serrurier
En fait assez
Qui vont sur toutes les serrures

N'enfermez pas les confitures.

Luc Bérimont ("Le besoin d'exprimer" dans "L'esprit d'enfance" - Enfance heureuse, Éditions Ouvrières et éditions de l'Atelier, 1980)

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de MICHEL BESNIER

- Michel Besnier -

Michel Besnier (né en 1945) , enseignant, romancier et poète, écrit pour la jeunesse. Un de ses derniers recueils en date : " Mon KDI n’est pas un KDO ", est une succession d'images poétiques et loufoques dans un supermarché. Il est paru en 2008 aux éditions Motus (au prix de 9,50 €, mais on ne le trouve pas en supermarché).

C'est le titre proposé par le blog pour le premier poème de ce recueil (les poèmes n'ont pas de titre particulier) :

Mon KDI n’est pas un KDO

Ingouvernable
ça tangue
ça couine
ça coince
tire à droite
tire à gauche
bloque
et accélère
cogne un mollet
file un collant
pardon madame

Mon KDI
n’est pas un
KDO

Michel Besnier (" Mon KDI n’est pas un KDO " illustré par Henri Galeron, éditions Motus, Collection Pommes Pirates Papillons, 2008)

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Un autre recueil : "Le rap des rats" :

Le rap des rats (ces deux poèmes n'ont pas de titre particulier)
 
1

C’est le rap des ratslivre_Michel_Besnier_le_rap_des_rats
qui rasent les murs
qui dérapent
qui se cachent
qui apachent
C’est le rap des rats
des durs des rapaces
qui rapinent
qui ravinent
qui ratinent
C’est le rap des rats
les rois des parias
qui travaillent
qui creusaillent
boustifaillent
C’est le rap des rats
qui grignotent
qui papotent
avec leurs potes
C'est le rap des rats
des rongeurs
des râleurs
des rôdeurs
renifleurs
C'est le rap des rats
qu'on n'aime pas
connaît pas
attire a-
vec des appâts
C'est le rap des rats
pas méchants
ou pas plus
que les gens
qui les tuent


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2


On en a ras le bol nous les rats
On en a ras le bol
nous les rats
d’être symboles
du choléra
de la peste et du reste
Hiroshima
c’est pas nous
le Rwanda
c’est pas nous
la vache fada
c’est pas nous
la grippe poulaga
c’est pas nous
l’air cracra
c’est pas nous.

Michel Besnier (" Le rap des rats " illustré par Henri Galeron, éditions Motus, Collection Pommes Pirates Papillons, 1999)

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Trois poèmes pour un troisième recueil : "Le Verlan des oiseaux et autres jeux de plumes" :

Un oiseau

Un oiseau
qui mange
trop
de granulés
devient
gras
nul
et laid

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Mes résidences

Je n’habite pas du côté de l’océan
mais du côté de la goutte d’eau

Je n’habite pas du côté de la forêt
mais du côté du brin d’herbe

Je n’habite pas du côté de l’ouragan
mais du côté du courant d’air

Je n’habite pas du côté de l’aigle
mais du côté du pingouin

Dites-moi où vous habitez
si vous habitez mon quartier

Je viendrai un de ces jours
vous dire un petit bonjour

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Deux pigeons

Deux pigeons s’aimaient d’amour tendre,

Deux corbeaux s’aimaient d’amour noir,

Deux mésanges s’aimaient d’amour bleu,

Deux pies s’aimaient d’amour bavard,

Deux autruches s’aimaient d’amour lourd,

Deux pinsons s’aimaient d’amour gai,

Deux vautours s’aimaient eux aussi.
Michel Besnier ("Le verlan des oiseaux et autres jeux de plumes")

Michel Besnier ("Le Verlan des oiseaux et autres jeux de plumes" illustré par Henri Galeron, éditions Motus, Collection Pommes Pirates Papillons, 1995)

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour de GERARD BIALESTOWSKI

- Gérard Bialestowski  -

Gérard Bialestowski (1946-2007), enseignant et auteur pour la jeunesse, a quitté définitivement l'écriture en 2007.
Parmi les ouvrages qu'il a laissés : La Vélocomotive (1986),  Le Prince du château fou (1992), La taupe et la taupe (1996),  Ma langue au tigre (2002), et les recueils cités ci-dessous.

livre_Bialestowski_pieuvreL'oiseau rare

Sur un banc devant la gare
du Nord
j'ai trouvé un oiseau rare
pas un ara en or
un oiseau de parade
ou de paradis
mais un oiseau de Paris
un pi un pi
un pigeon pardi

Gérard Bialestowski ("La pieuvre bricole et autres poèmes" - Milan - Poche cadet, 2000)

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Les rennes

allons enfants de la toundra
voir passer le roi des rennes
il nous apprendra la polka
que l'on danse en Alaska
quand sept jours font une semaine

Gérard Bialestowski (dans le recueil de poèmes de divers auteurs, réunis par Jean-Hugues Malineau, illustrations de Sylvie Selig : "Il était une fois... les animaux" - éditions Messidor La Farandole, 1978)

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le mille-pattes

Même au singulier
je suis au pluriel,
ça épate,
ça épate !
et tandis qu'on s'étonne
je me pelotonne,
ou me carapate
dans le peuplier
ou sous l'arc en ciel,
même au singulier
je suis au pluriel !
 

Gérard Bialestowski ("Au bout de mon râteau" avec des illustrations de Frédéric Rébéna - éditions Albin Michel Jeunesse, 1978)

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La pomme de terre

Quand il fait très froid
à Noël
quand ça exagèle
la pomme de terre
met sa robe décembre
et la tête sous la cendre
alors je me décide
je la pique au bide
je la croque au sel
je lui fais la peau
sans dire un mot
la pomme de s'taire
se mange en silence
même chichécho

Gérard Bialestowski ("Au bout de mon râteau")

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Au chien !

À moi !
À toi !
Aboie !

Tais-toi
toutou têtu !
C'est la l'ouah !

Gérard Bialestowski ("Au bout de mon râteau")

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1 avril 2008

PP 09 - L'humour d'ALAIN BOSQUET

- Alain Bosquet -

Alain Bosquet  (1919-1998) est le pseudonyme d'Anatole Bisk. C'est un écrivain et poète français d'origine russe.

Le cheval chante

Le cheval chante.
Le hibou miaule.
L'âne gazouille.
Le ruisseau hennit.

- C'est bien, mon enfant : joue avec les mots.

- Le triangle est rond.
La neige est chaude.
Le soleil est bleu.
La maison voyage.

- Tu as de la chance :

les mots sont amicaux
et généreux.

- Le poisson plane.
La baleine court.
La fourchette a des oreilles.
Le train se gratte.

- Je t'avais prévenu :
maintenant les mots te mordent.


Alain Bosquet ("Le cheval applaudit" - Enfance heureuse, éditions Ouvrières, 1977)

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La trompe de l'éléphant

La trompe de l'éléphant,
c'est pour ramasser les pistaches :
pas besoin de se baisser.

Le cou de la girafe,
c'est pour brouter les astres :
pas besoin de voler.

La peau du caméléon,
verte, bleue, mauve, blanche,
selon sa volonté,
c'est pour se cacher des animaux voraces :
pas besoin de fuir.

La carapace de la tortue,
c'est pour dormir à l'intérieur,
même l'hiver :
pas besoin de maison.

Le poème du poète,
c'est pour dire tout cela
et mille et mille et mille autres choses :
pas besoin de comprendre.

Alain Bosquet ("Le cheval applaudit" - Enfance heureuse, éditions Ouvrières, 1977)

logo_cr_ation_po_tiqueLe... c'est ... (c'est pour) ...

En s'inspirant librement de la structure de ce joli poème réaliste d'Alain Bosquet,  jouons avec les particularités des animaux en glissant un peu vers le fabuleux, le facétieux, l'invraisemblable. On obtiendra certainement quelques sourires :
La trompe de l'éléphant, c'est pour que les singes fassent de la balançoire.
La poche du kangourou, c'est pour ranger son pyjama.

Les dents du requin  c'est ... / La langue du serpent ... / Les griffes du chat / La bosse du chameau /Les plumes du paon, etc.

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1 avril 2008

PP 09 : l'humour d'ANDRÉ BRETON - Surréalisme et Cadavre exquis

- André Breton et le Surréalisme -

po_sie_Andr__Breton_portrait

<< portrait du poète par Victor Brauner (1934) - André Breton (1896-1966) définit ainsi le mouvement surréaliste : "Automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée ". (Manifeste du surréalisme de 1924).

Même s'il n'est pas directement le créateur du cadavre exquis, Breton est l'un des inspirateurs et des pratiquants de cette forme de création surréaliste "classique", très représentative de l'esprit du mouvement et qu'il définit plus bas.

André Breton est l'inventeur d'une autre forme de création littéraire surréaliste : l'écriture automatique.
"Écrivez vite sans sujet préconçu, assez vite pour ne pas retenir et ne pas être tenté de vous relire. La première phrase viendra toute seule, tant il est vrai qu'à chaque seconde il est une phrase étrangère à notre pensée consciente qui ne demande qu'à s'extérioriser. ". (A. Breton - Manifeste du Surréalisme - 1924).

Il est l'auteur de l’Anthologie de l’Humour noir (écrit en 1940, édité en 1945, 1950 et 1966, avec des modifications de contenu, et réédité au Livre de Poche). D'autres oeuvres : Nadja (1928), Les Vases communicants (1932), L'Amour fou (1937).

po_me_Andr__Breton_Ile<< Île

André Breton

Île est un poème-titre, ou un titre-poème, constitué de ce seul mot qui apparaît pleine page en vertical, comme sur l'image, dans le recueil "Clair de terre" (1923, réédition 1978 en Poésie-Gallimard).

Dans  La poésie (Armand Colin éditeur, 1988), Jean-Louis Joubert explique : "Ce n'est pas tellement le mot en lui-même que sa situation dans un poème qui possède une valeur poétique. Rien n'empêche qu'un poème soit composé d'un seul mot. C'est le cas du poème "Île" [...] Mais le choix d'un corps de caractères géants, leur recherche typographique, la disposition du mot verticale et de bas en haut, arrache "Île" à la langue commune pour en faire un mot-objet mystérieux [...] "

logo_cr_ation_po_tique Poème objet :

Pour les élèves, le sens de ce poème objet d'André Breton n'apparaît pas évident.

On peut proposer à la classe un exercice dérivé plus abordable, parent du calligramme. L'élève choisit un mot objet qui lui plaît et le représente pour en exprimer sa perception personnelle (par graphisme, typo ordinateur, collage, peinture, modelage, sculpture...) en deux ou trois dimensions en jouant sur les formes, tailles, couleurs  des caractères, et leur disposition (les lettres ne seront pas forcément alignées et de même format).

  • Variantes :
  1. Même démarche avec une courte phrase, un haïku.  Illustrer éventuellement l'environnement de l'écrit. 
  2. Proposer aux élèves d'élémentaire le dessin du mot dans une forme qui le représente.

Exemples à venir avec d'autres auteurs, voir le sommaire de la création poétique en haut de page.

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Le Cadavre exquis

À l'initiative de Jacques Prévert, Marcel Duhamel et Yves Tanguy et avec André Breton, c'est l'un des exercices de création spontanée auquel se sont livrés les surréalistes. André Breton le définit ainsi dans son "Dictionnaire abrégé du surréalisme" :
"jeu de papier plié qui consiste à faire composer une phrase ou un dessin par plusieurs personnes, sans qu’aucune d’elles puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes".
L’exemple qui a donné son nom au jeu, tient dans la première phrase obtenue de cette manière : "Le cadavre/exquis/boira/le vin/nouveau".
L'exercice s'appliquera au texte, au dessin, et plus tard au cinéma, et connaît actuellement une nouvelle évolution  avec Internet.

logo_cr_ation_po_tique Le "Cadavre exquis" (sous sa forme écrite)
Principe : Le matériel : une feuille A4 pliée en autant de parties que d'intervenants, de manière à empêcher la lecture directe des éléments, mais à permettre une lecture (linéaire) de la production finale une fois dépliée.

Le jeu du Cadavre exquis suppose une maîtrise par les élèves de la structure de la phrase.
On décidera du type de phrase à créer, suivant le niveau de difficulté souhaité :
Phrase déclarative minimale
Sujet + Verbe ou phrase simple S+V+ Complément(s).

1.   Le groupe nominal sujet est singulier ou pluriel et le groupe verbal s'accordera en conséquence.

  • groupe sujet minimal, avec nom seul ou déterminant + nom  ex : Anna*,  l'oiseau - mon vélo
  • enrichi d'un qualificatif, ex : l'oiseau bleu - mon vieux vélo
  • d'un complément du nom, ex : un ballon de rugby - la table à repasser
  • ou d'un ensemble, ex : un vieux ballon de rugby en bois* (encourager déjà le décalage interne du groupe)

2.   Le groupe verbal sera conjugué au singulier ou au pluriel, selon le choix précédent.

  • Le verbe sera un verbe d'action, non pronominal, conjugué à la voix active, au passé ou au futur simple de préférence, plutôt qu'au présent.
  • Les verbes les plus intéressants sont les verbes transitifs (trouver - manger - regarder) qu'on peut ou qu'on doit faire suivre d'un groupe COD et d'un ou de plusieurs groupes Compléments Circonstanciels  (temps, lieu, manière...). Les verbes intransitifs (dormir,  seront bannis

3.   Le groupe complément

  • Le COD qui suit le verbe transitif direct est un groupe nominal qui peut être enrichi, comme le groupe nominal sujet, et par conséquent interchangeable :

ex : l'oiseau bleu / construira / la pluie de novembre ou la pluie de novembre / construira / l'oiseau bleu 

  • Les groupes Compléments Circonstanciels  (temps, lieu, manière, conséquence, cause, but...). Il peut y en avoir plusieurs, à se répartir dans le groupe de travail selon le nombre d'élèves.

ex : l'oiseau bleu / construira / la pluie de novembre /  à Noël / parce qu'il* (elle) a perdu ses clés

* l'accord en genre et en nombre et les corrections se feront collectivemant dans la phrase définitive retenue.

La forme poétique de la création apparaîtra avec le choix des productions (retenir les plus amusantes, les plus originales, les plus étonnantes ...)
On pourra proposer l'association des phrases créées, pour une mise en texte.

  • Variantes :
  1. Cadavre exquis minimum : Comme l'ont pratiqué les surréalistes, on peut scinder en unités minimum sur le schéma simple GS + V + COD, en séparant le nom de l'adjectif (le cadavre/exquis/ boira/le vin/nouveau)
  2. Le dialogue surréaliste : Pratiqué par les surréalistes, il consiste à construire séparément (deux  intervenants seulement ici) un dialogue question-réponse sur le modèle "Qu'est-ce que .../c'est..." exemple surréaliste : "Qu'est-ce que la volupté de vivre / C'est une bille dans la main d'un écolier"). Au niveau collège ou lycée, un troisième intervenant pourrait ajouter une formule commençant par "puisque ... ex : "Qu'est-ce qu'un arc-en-ciel après la pluie ?/c'est un parking de supermarché désert,/puisqu'on a fermé les fenêtres." (essai Lieucommun). Il faudra certainement intervenir à postériori pour produire des phrases grammaticalement correctes.
  3. On pourra inventer d'autres constructions : "Si les oiseaux ont des ailes/c'est parce qu'il n'y a plus de sable dans le désert". D'autres modèles sont possibles avec même si..., pourtant...etc.

"Cadavre exquis" en arts plastiques  

Cadavre_exquis_dessin_3Reprenons la définition d'André Breton : "jeu de papier plié qui consiste à faire composer [une phrase ou] un dessin par plusieurs personnes, sans qu’aucune d’elles puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes"...

<< Cadavre exquis vertical sur le thème de la maison bizarre. On repérera les pliures (expérience du groupe MSA).

 Principe : La feuille, format A2, A3 ou A4 suivant le projet, sera pliée en 3 ou en 4 parties égales. Le thème général est proposé, par exemple, pour rester dans le domaine qui nous intéresse : monstres,  véhicules bizarres, construction étonnantes... On précisera éventuellement s'il s'agit de créer un objet "unique" (exemple ci-contre) ou pluriel, au final. Le sujet pourra être libre. (l'exemple n°1  est une création récente empruntée au site ex-bones.com )

cadavre_exquis_dessin_exemple_1Le pliage sera horizontal si le thème  s'y prête, mais il est  en général vertical. Un personnage bizarre, par exemple, peut associer trois créations différentes : une pour la tête, une pour le "tronc" et les bras (ou ce qui en tient lieu s'il y en a) et une troisième pour les membres inférieurs.

Consignes de réalisation : produire, pour le premier intervenant, un dessin en prolongeant les tracés de manière qu'ils apparaissent un peu au-delà de la pliure, sans dévoiler la réalisation. Le deuxième élève devra utiliser cette arrivée de tracé comme départ pour sa propre production graphique, sans avoir pris connaissance de la précédente. Idem pour les intervenants suivants. Le dernier tient compte simplement du fait qu'il termine l'œuvre collective.

cadavre_exquis_collage_BretonOn obtiendra une fois la feuille dépliée une réalisation qui pourra faire l'objet d'un travail de mise en couleurs, surfaces, collages... Le passage d'une partie à l'autre, toujours difficile, pourra aussi  être repris pour la cohérence de l'ensemble, si c'est le but recherché.

NB : Les élèves travaillant sur un même projet seront séparés les uns des autres, pour ne pas avoir à se cacher des regards pendant la réalisation.

  • Variantes : Le collage de papiers déchirés ou découpés se prête parfaitement à l'exercice (le modèle n°2 est un collage créé par André Breton, Jacqueline Lamba  et Yves Tanguy en 1938) . 

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1 avril 2008

Joëlle Abed, Etel Adnan, Claudia Adrover, Corinne Albaut

page 1 : A - B - C



Joëlle Abed est née en 1949.

Le chat

Le chat ne tuait pas l'oiseau
Il en gobait le chant

Gisant sur l'herbe
la clé de la dernière portée

déformée innocemment
par le jeu des canines

Joëlle Abed (titré "L'ombre portée" dans la revue '"L'Atelier imaginaire" - recueil "Lieux du tremble", éditions "L'Age d'homme", 1990)



Claudia Adrover (qui publie aussi sous le nom de Claudia Adrover-Sendra) est née en 1950. Elle a écrit de nombreux ouvrages, dont des recueils de poésie, et en particulier celui dont nous présentons des fragments, mais qu'il faudrait lire et dire entièrement. Il est tout entier consacré à la Loire : "La Loire au plus près", aux éditions "Donner à Voir", en 1999. Ce recueil de 29 pages est vendu à un prix modique, autour de 6 €, comme la plupart des ouvrages de cette collection, mais il est peut-être maintenant épuisé.

On pourra certainement en proposer des passages à la classe :

La Loire au plus près (fragments)

La Loire est une aïeule
qui se souvient
de son éternité liquide

Elle est l'eau millénaire
où l'arbre couche son ombre

et tu bois ton rêve
à ses rives vertes
pour préserver l'imaginaire.

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L'eau immobile
nous raconte des fonds imaginaires
où les racines feuillues
atteignent au centre de la terre. Miroir magique
qui enfante des arbres bicéphales
douce folie du printemps
née d'un ciel voilé
percé de mille boutons du jeune soleil.

- - - - -  - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Loire reflet
tu témoignes du ciel
dans la liberté
d'une onde froissée, brisée
par un vent nomade.

- - - - -  - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Le ciel de Loire
est descendu vers nous
mais quel limon
a volé sa lumière
au désarroi de l'eau ?

Claudia Adrover ("La Loire au plus près" - éditions Donner à Voir, 1999) 



Etel Adnan est née au Liban en 1925. Après des études universitaires en France, elle a poursuivi son cursus et enseigné aux Etats-Unis, où elle vit aujourd'hui. Romancière, essayiste et poète, elle a écrit des ouvrages en anglais et en français.

"J'ai commencé à écrire en français, parce que je suis allé à l'école française au Liban." E. Adnan

Je suis femme

Je suis femme
suis-je la Mère-terre ?
Je suis la moitié de l'Univers
Serai-je jamais un être entier ?
Je suis le silence qui m'entoure
et le jardin vide
Plus éphémère que nuage
je suis un point.

Etel Adnan



Corinne Albaut écrit, publie, interprète des comptines pour les petits.
La catégorie
PRINT POÈTES 2010 : LE FÉMININ EN POÉSIE  rassemble d'autres comptines de Corinne Albaut.

Elle dirige également la collection "Les Romans Bleus" (Gulf Stream éditeur - 2006), pour les ados de 11 à 14 ans, dans laquelle elle a écrit Chicago Blues. D'autres romans sont parus chez Acte Sud junior.
Dans la jolie collection
"Les Petits Bonheurs", toujours chez Acte Sud junior, on trouvera plusieurs petits recueils intitulés "Comptines pour ...".

Les trois classes



Dans la classe
de Monsieur Leblond,


On cultive des potirons.

 

Dans la classe de Madame Levert,


On cultive des primevères.

Dans la classe
de Mademoiselle Legris,


On cultive des radis.


Dans son bureau la directrice,


Elle fait pousser des myosotis.

Corinne Albaut ("Comptines pour la rentrée des classes" - collection "Les Petits Bonheurs", Actes Sud Junior, 1997)

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Une autre comptine, trouvée dans le recueil "Comptines pour compter" :
 

Sept jours sur sept 

Sept jours, dans la semaine,
    Pour porter tout ce que j'aime.
Lundi, mon tee-shirt canari,
    Mardi, mon pull gris souris,
    Mercredi, mon short kaki,
    Jeudi, mon bermuda fleuri,
    Vendredi, ma chemise bleu nuit,
    Samedi, mon polo cramoisi,
    Dimanche, ma casquette blanche.

Chic, des pieds à la tête,
    Sept jours sur sept.

Corinne Albaut ("Comptines pour compter" - collection "Les Petits Bonheurs", Actes Sud Junior, 1997)

fille_verte_cr_ation__PP10À la manière de Corinne Albaut : " Dans la classe de ... "

On trouve dans le recueil cité deux autres variantes de cette comptine. Leur structure peut être reprise et adaptée au cours d'une séance de création poétique orale en maternelle. L'occasion de jouer avec les sons, les rimes. Voyez ICI un exemple de ce travail dans une classe de CP.

À la manière de " Sept jours sur sept ... "

Exemple proposé par le blog, avec des rimes  ou assonances diverses :

Une semaine de vacances

Sept jours, dans la semaine,
Pour faire tout ce que j'aime.
Lundi, gagner à la loterie
Mardi, acheter un hélicoptère
Mercredi, faire le tour de la Terre

Jeudi, acheter un paquebot
Vendredi, voyager jusqu'à Rio
Samedi, ouf la semaine s'achève,
Dimanche, me reposer de mes rêves.

(proposé par lieucommun)
(Voir la catégorie PRINT POÈTES 2010 : LE FÉMININ EN POÉSIE  >>  pour d'autres idées de création poétique)

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Et ce dernier texte, qu'on trouvera dans le recueil "Comptines pour jouer à avoir peur" :

Avoir un dragon chez soi 

Avoir un dragon chez soi
Ce n'est pas si mal que ça,
Surtout lorsqu'il fait très froid.

Quand on lui tire la queue
Ça le rend tellement furieux
Que sa gueule crache du feu.

Il réchauffe l'appartement,
Il sèche les vêtements,
Les parents sont tout contents.

Corinne Albaut ("Comptines pour jouer à avoir peur" - collection "Les Petits Bonheurs", Actes Sud Junior, 1996)

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Le jour et la nuit

Quand on dit "bonjour",
Que les enfants courent
Vers l'école pour
Jouer dans la cour,
C'est le jour.

Quand la lune luit
Que les chats sont gris,
Qu'on est dans son lit
Au calme et sans bruit,
C'est la nuit.

Corinne Albaut ("Comptines en pyjama" - collection "Les Petits Bonheurs", Actes Sud Junior, 1997)



1 avril 2008

Huguette Amundsen

Huguette Amundsen

J’ai vu …

J'ai appelé le terrassier
il marchait à cloche-pied
j'ai appelé le moissonneur
il jurait comme un voleur
j'ai appelé le cordonnier
il jetait tous ses souliers
alors je m'en suis allée
j'ai vu des hannetons
tâtonnant en rond
j'ai vu des limaces
faire la grimace
j'ai vu une libellule
très crédule
puis me penchant encore
j'ai vu un chou-fleur
chercher l'heure
j'ai vu un artichaut
qui rêvait d'être au chaud
chemin faisant
j'ai vu un lampadaire
le nez en l'air
j'ai vu un vélo
près de l'eau
j'ai vu un canard
en retard
j'ai vu un lapin
jouer au crincrin
puis j'ai vu des gens
mécontents
car ils ne voyaient rien.

Huguette Amundsen



1 avril 2008

PP 09 - L'humour de MAURICE CARÊME

- Maurice Carême -

Merci à la Fondation Maurice Carême

À la suite du message reçu signalant de nombreuses erreurs, les textes ont été corrigés dans cette page (*les corrections sont signalées)

Maurice Carême, instituteur belge (1899-1978) est présent dans chaque cahier de poésie des élèves de France et de Navarre (et de Belgique bien sûr), et ses textes se baladent un peu partout sur le blog. Explorez les catégories !

Avez-vous vu ?

Avez-vous vu le dromadaire
Dont les pieds ne touchent pas terre ?

Avez-vous vu le léopard
Qui aime loger dans les gares ?

Avez-vous vu le vieux lion
Qui joue si bien du violon ?

Avez-vous vu le kangourou
Qui chante et n'a jamais le sou ?

Avez-vous vu l'hippopotame
Qui minaude comme une femme ?

Avez-vous vu le perroquet
Lançant très haut son bilboquet ?

Avez-vous vu la poule au pot
Voler en rassemblant ses os?

Mais moi, m'avez-vous bien vu, moi,
Que personne jamais ne croit ?

Maurice Carême

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Fantaisie

L'homme habitait un quart de pomme ;
La femme, un huitième de poire.
Leur vieille cousine Opportune
Vaquait dans une demi-prune.
Il y avait monsieur Léon
Qui débordait d'un gros citron
Et sa soeur, madame Émérence,
Qui emplissait toute une orange.
Quant à moi, chétive fillette,
Je tenais dans une noisette
Et, comme je n'étais pas grosse,
Il arrivait, les jours de fête,
Que je m'y déplace en carrosse.

Maurice Carême

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Mon petit chat

J’ai un petit chat,
Petit comme ça.
Je l’appelle Orange.

Je ne sais pourquoi
Jamais il ne mange
Ni souris ni rat.

C’est un chat étrange
Aimant le nougat
Et le chocolat.

Mais c’est pour cela,
Dit tante Solange,
Qu’il ne grandit pas !

Maurice Carême ("La lanterne magique" - éditions Ouvrières, 1947)

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L’ogre

J’ai mangé un œuf
Deux langues de bœuf
Trois rôtis de mouton
Quatre gros jambons
Cinq rognons de veau
Six couples d’oiseaux
Sept immenses tartes
Huit filets de carpe
Neuf kilos de pain
Et j’ai encore faim
Peut-être ce soir
Vais-je encore devoir
Manger mes deux mains
Pour avoir enfin
Le ventre bien plein.

Maurice Carême ("L'Arlequin" -  éditions Fernand Nathan, 1970)
Voir aussi les comptines numériques plus bas.

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Trois escargots

J'ai rencontré trois escargots
Qui s'en allaient cartable au dos
Et dans le pré trois limaçons
Qui disaient par cœur leur leçon.
Puis dans un champ, quatre lézards
Qui écrivaient un long devoir.
Où peut se trouver leur école ?
Au milieu des avoines folles ?
Et leur maître est-il ce corbeau
Que je vois dessiner là-haut
De belles lettres au tableau ?

Maurice Carême

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Un poème pour mémoriser une règle d'orthographe en s'amusant :

Le hibou

Caillou, genou, chou, pou, joujou, bijou,
Répetait sans fin le petit hibou .

Joujou, bijou, pou, chou, caillou, genou
Non, se disait-il, non, ce n' est pas tout.

Il y en a sept pourtant, sept en tout :
Bijou, caillou, pou, genou, chou, joujou.

Ce n' est ni bambou, ni clou, ni filou
Quel est donc le septième ? Et le hibou,

La patte appuyée au creux de sa joue,
Se cachait de honte à l'ombre du houx.

Et il se désolait, si fatigué
Par tous ses
* devoirs de jeune écolier

Qu' il oubliait, en regardant le ciel
Entre les branches épaisses du houx
**

Que son nom, oui, son propre nom, hibou,
Prenait, lui aussi, un X au pluriel.

Maurice Carême / corrections :  "des devoirs" (faute de frappe) remplacé par "ses devoirs - ** dernière strophe détachée

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Ce qui est comique

Savez-vous ce qui est comique ?
Une oie qui joue de la musique,
Un pou qui parle du Mexique,
Un bœuf retournant l'as de pique,
Un clown qui n'est pas dans un cirque,
Un âne chantant
tout *  un cantique,
Un loir champion olympique.
Mais ce qui est le plus comique,
C'est d'entendre un petit moustique
Répéter son arithmétique.

Maurice Carême / correction :  *suppression de "tout"

logo_cr_ation_po_tique "Savez-vous ce qui est comique...?"

Imaginer encore (les rimes en ique sont nombreuses), ce qui peut être comique.

Construire d'autres poèmes avec ce qui est amusant (rimes simples encore plus nombreuses) ; ce qui est drôle, et puis toujours avec humour, ce qui est agaçant, énervant, insupportable, étonnant, possible ou impossible, incroyable, inadmissible, etc.

Ici encore on pourrait imaginer un genre de Cadavre exquis (voir André Breton plus haut) en deux étapes pour les vers du poème (dans l'exemple, la séparation est indiquée par / ), en respectant la  rime dans la seconde partie du vers  (avec les élèves plus grands on peut même décider du nombre de syllabes de chaque partie). On gardera le maximum de productions correctes en réorganisant peut-être le poème et on imaginera collectivement la chute, si chute il y a ("Mais ce qui est le plus agaçant... c'est ...")

ex : Ici, avec "Ce qui est agaçant", on a essayé d'imaginer, sans savoir quel serait le sujet, des situations en rapport avec le thème. Dans la consigne, si on ne décide pas du singulier ou du pluriel (ça laisse plus de champ), on accordera grammaticalement lors de la mise au point, dans chaque doublette de Cadavre exquis ou en grand groupe  :

Un kangourou / qui vous fait perdre votre temps
Une tortue  / qui ne se lave pas les dents
Une fleur fanée  / qui prend son bain en chantant ...

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Deux petits éléphants

C’était deux éléphants
Deux petits éléphants tout blancs.

Lorsqu’ils mangeaient de la tomate
Ils devenaient tout écarlates.

Dégustaient-ils un peu d’oseille,
On les retrouvait vert bouteille.

Suçaient-ils une mirabelle,
Ils passaient au jaune de miel.

On leur donnait alors du lait,
Ils redevenaient d’un blanc frais
*.

Mais on les gava, près d’Angkor,
Pour le mariage d’un raja,

D’un grand** sachet de poudre d’or.
Et ils brillèrent, ce jour-là,

D’un tel éclat que plus jamais,
Même en buvant des seaux de lait,
***

Ils ne redevinrent tout blancs,
Ces jolis petits éléphants.

Maurice Carême ("Pomme de reinette" - Fondation Maurice Carême, 1962) / corrections : * ce vers remplace le vers erroné :  "ils devenaient d'un blanc tout frais" ** le mot "grand" avait été oublié - *** il faut une virgule en fin de vers.

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L'heure du crime

Minuit. Voici l'heure du crime.
Sortant d'une chambre voisine,
Un homme surgit dans le noir.

Il ôte ses souliers,
S'approche de l'armoire
Sur la pointe des pieds
Et saisit un couteau
Dont l'acier luit, bien aiguisé.

Puis, masquant ses yeux de fouine
Avec un pan de son manteau,
Il pénètre dans la cuisine
Et, d'un seul coup, comme un bourreau
Avant que ne crie la victime,
Ouvre le cœur d'un artichaut.

Maurice Carême ("Au clair de la lune" - éditions Hachette, Le Livre de Poche jeunesse, 2003)

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