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lieu commun

1 mars 2008

Jean L'ANSELME - le féminin en poésie

Jean L'Anselme, nom d'auteur de Jean-Marc Minotte (1919- 30 décembre 2011) est un poète vivant, comme on l'écrivait ici. Maintenant qu'il a disparu physiquement de notre horizon, il reste un poète atypique, comme on le dit parfois des auteurs qui déconcertent, qui n'entrent pas dans les catégories normalisées.Comme on le dit parfois des auteurs qui déconcertent, qui n'entrent pas dans les catégories poétiques normalisées, c'est un poète atypique.

Quelques titres d'ouvrages de Jean L'Anselme, tous parus aux éditions Rougerie :
Ça ne casse pas trois pattes à un canard et après (2005) ; La chasse d'eau, les poèmes cons, manifeste suivi d'exemples, Le ris de veau (1995) ; Pensées et proverbes de Maxime Dicton, banalités, bêtises, paradoxes, balivernes, lieux communs et autres propos sérieux de l'auteur (1991).

Voici un passage à lire aux élèves :
"...On ne naît pas poète, on naît comme on est, c'est-à-dire comme tout le monde. N'importe qui peut être poète, je suis moi-même n'importe qui. Il n'y a d'ailleurs pas d'école où on enseigne la poésie pour en ressortir avec un CAP alors que, dans les autres domaines de l'art, il existe des conservatoires et des académies. C'est une réalité à laquelle on ne songe guère. Nous sommes donc des millions de poètes comme toi. Souvent sans le savoir ..."
et il termine presque par ceci : "À présent oublie tout ce que je viens de te dire et n'écoute pas les autres..."

Jean L'Anselme - Conseils à un jeune poète (éditorial du n° 13 de la revue Poésie Première, à lire intégralement ici : http://poesiepremiere.free.fr/Lanselme.html).

On trouve sur le blog d'autres textes de Jean L'Anselme ici : PRINT POÈTES 2009 : L'HUMOUR des poètes

Un poème atypique donc  :

La femme qui a un gros ventre

Il faisait froid
très froid même
qu'elle avait les cuisses roses
et tout tout sec
et tout frissonnant
comme un poulet qui n'a plus de plumes
et dessus son ventre tout rond
qu'on disait qu'il tenait de la vie en conserve
et les poètes eux parlaient du blé de demain

c'est son blé qui relevait sa robe à fleurs
sur ses cuisses roses
comme aussi font les abat-jour
sur les lampes

Jean L'Anselme (Vers dépolis, dans le recueil "La Foire à la ferraille" - Éditeurs Français Réunis, 1974)

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C'est le grand amour

Elle avait des lunettes
et lui aussi
si bien qu'ils se voyaient mieux
pour se regarder dans les yeux.

Elle avait un Sonotone
et lui aussi
si bien qu'ils s'entendaient bien
et restaient sourds à tout
ce qui les entourait.

Mais, il avait un grand nez
et elle était obligée
de se mettre très en biais
pour l'embrasser.
Et sa moustache
ça la chatouillait ...

Il n'y a pas de bonheur complet.

Jean L'Anselme ("Le Ris de veau" - Éditions Rougerie, 1995)- source : Poéthèque du Printemps des Poètes

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La mort de la machine à laver

                        à la princesse Diana

Pendant bien, bien des années
elle brassa le linge à grande eau
comme aurait fait la Mère DENIS
pour vous le rendre aussitôt
blancheur OMO garantie.

Puis, sous le harnois, elle vieillit
et de la mort suivit la pente ...
On appelait souvent DARTY
le meilleur médecin d'après-vente,
liés à cet homme de science
par un contrat de confiance.

Il lui prescrivit une jouvence
dont le traitement lui fut bon
puisque, malgré sa déchéance,
elle retourna au charbon.
Mais le calcaire fut son calvaire :
on n'utilisait pas de CALGON !

Elle est morte un jour sans trompette
dans un grand roulement de tambour,
recrachant slips et chemisettes,
lingerie de nuit et de jour.
Puis, après un sursaut, sa turbine
dans un hoquet à fendre l'âme
vomit sa flotte dans la cuisine
aux yeux affolés de ma femme.

Cela s'est passé un matin.
C'était une ARTHUR MARTIN.

NB - Par le plus grand des hasards, ce poème est né le jour même de l'anniversaire de la mort de la Princesse Diana. C'est pourquoi il lui a été dédié. (cette note est de l'auteur, comme la dédicace)

Jean L'Anselme - source : le site du poète Guy Allix : http://guyallix.art.officelive.com/jeanlanselme.aspx



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1 mars 2008

Boby LAPOINTE - le féminin en poésie

Boby_Lapointe_coffret_int_gr_33T

Boby Lapointe (1922-1972) est natif de Pézenas, dans l'Hérault. Poète, parolier-chanteur ? Les deux. C'est un humoriste, un joueur de mots hors pair, qu'il sait si bien mettre en musique, dont il faut réécouter plusieurs fois les interprétations  pour en saisir les astuces de langage. (photo coffret Intégrale 33 tours, présenté par son ami Georges Brassens - clic pour agrandir l'image)

On verra plus bas que Boby Lapointe est proche du mouvement Dada. Pas d'allusion ici au "Saucisson de cheval", titre d'une de ses chansons, mais plus précisément aux contraintes linguistiques qu'il s'est imposées avec le système "Bibi-binaire" de son invention.

On pourra s'amuser dans le texte qui suit, à repérer les jeux de mots et les doubles-sens :

La maman des poissons (extrait)

Si l'on ne voit pas pleurer les poissons
qui sont dans l'eau profonde
C'est que jamais quand il sont polissons
leur maman ne les gronde.

Quand ils s'oublient à fair' pipi au lit,
ou bien sur leurs chaussettes
Ou à cracher comme des pas polis,
elle reste muette

La maman des poissons
elle est bien gentille
Elle ne leur fait jamais la vie
Ne leur fait jamais de tartines
Ils mangent quand ils ont envie
Et quand ça a dîné ça r'dine
[...]
La maman des poissons
Elle a l'œil tout rond
On ne la voit jamais froncer les sourcils
Ses petits l'aiment bien, elle est bien gentille
Et moi je l'aime bien avec du citron
[...]
S'ils veulent être maquereaux
C'est pas elle qui les empêche
De s'faire des raies bleues sur le dos
Dans un banc à peinture fraîche
[...]
La maman des poissons
Elle a l'œil tout rond
On ne la voit jamais froncer les sourcils
Ses petits l'aiment bien, elle est bien gentille
Et moi je l'aime bien avec du citron

....

La maman des poissons
elle est bien gentille

Boby Lapointe - paroles et musique (éditions musicales Francis Dreyfus, 1971)

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Dans ce texte, Boby Lapointe joue avec les sonorités, les allitérations :

Ta Katie t'a quitté (extrait)

Ce soir au bar de la gare
Igor hagard est noir
Il n'arrête guère de boire
Car sa Katia, sa jolie Katia
Vient de le quitter
Sa Katie l'a quitté

Il a fait chou-blanc
Ce grand-duc avec ses trucs
Ses astuces, ses ruses de Russe blanc
Ma tactique était toc
Dit Igor qui s'endort
Ivre mort au comptoir du bar

Un Russe blanc qui est noir
Quel bizarre hasard se marrent
Les fêtards paillards du bar
Car encore Igor y dort
Mais près d'son oreille
Merveille un réveil vermeil
Lui prodigue des conseils
Pendant son sommeil

Tic-tac tic-tac
Ta Katie t'a quitté
Tic-tac tic-tac
Ta Katie t'a quitté
Tic-tac tic-tac
T'es cocu qu'attends-tu ?
Cuite-toi t'es cocu
T'as qu'à, t'as qu'à t'cuiter
Et quitter ton quartier
Ta Katie t'a quitté
Ta tactique était toc
Ta Katie t'a quitté
Ote ta toque et troque
Ton tricot tout crotté
Et ta croûte au couteau
Qu'on t'a tant attaqué
Contre un tacot coté
Quatre écus tout comptés
Et quitte ton quartier
Ta Katie t'a quitté
[...]

Boby Lapointe - paroles et musique (éditions musicales Intersong Tutti, 1975)

fille_verte_cr_ation__PP10Allitérations

Construire un poème privilégiant les allitérations, même si les vers ne rimant pas, la musique et le rythme seront donnés par la répétition du même ou de deux ou trois sons (consonnes) différents internes. Ci-dessous, les consonnes de l'alphabet international (source : http://membres.multimania.fr/clo7/grammaire/api.htm)

Consonnes



1 mars 2008

Jean de LA VILLE DE MIRMONT - le féminin en poésie

Jean de La Ville de Mirmont (1886-1914) était un poète et romancier français. Il a été enlevé à la poésie par la guerre de 1914, au Chemin des Dames. On a publié de lui un recueil de poèmes posthume (L'Horizon chimérique), quelques contes et un roman (Les Dimanches de Jean Dézert).
"Sur la rive où nous aborderons un jour, nous reconnaîtrons d'abord ce jeune homme éternel. Mais lui, il ne nous reconnaîtra peut-être pas." (François Mauriac, son ami d'enfance). source : article de Jérôme Garcin, Le Nouvel Observateur, 26/06/2008.

La mer (sans titre dans le recueil)
(passage de "Poèmes Marins", dans le recueil cité, 1911)

...

II

Par l'appel souriant de sa claire étendue
Et les feux agités de ses miroirs dansants,
la mer, magicienne  éblouissante et nue,
Eveille aux grands espoirs les coeurs adolescents.

pour tenter de la fuir leu effort est stérile ;
Les moins aventureux deviennent ses amants,
Et, dès lors, un regret éternel les exile,
Car l'on ne guérit point de ses embrasements.

C'est elle, la première, en ouvrant sa ceinture
D"écume, qui m'offrit son amour dangereux
Dont mon âme a gardé pour toujours la brûlure
Et dont j'ai conservé le reflet dans mes yeux.

...

Jean de la Ville de Mirmont, 1903 ("L'Horizon chimérique", Cahiers Rouges, Grasset, 2008 - Éditions De La Table Ronde,1998)

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Amie aux gestes éphémères ... (sans titre dans le recueil)

Amie aux gestes éphémères,
Cher petit être insoucieux,
Je ne veux plus d'autre chimère
Que l'azur calme de tes yeux.

Pa besoin d'y chercher une âme !
De tels objets sont superflus.
Le seul bonheur que je réclame,
C'est de m'y reposer, sans plus.

Que m'importe l'horreur du vide ?
Je vais plonger, à tout hasard,
Ainsi qu'un nageur intrépide,
Dans le néant de ton regard.

Jean de la Ville de Mirmont, 1903 ("L'Horizon chimérique", Cahiers Rouges, Grasset, 2008 - Éditions De La Table Ronde,1998)



1 mars 2008

Maurice MAETERLINCK - le féminin en poésie

Maurice Maeterlinck (1862-1949) est un écrivain et poète belge de langue française, prix Prix Nobel de littérature en 1911. Il est surtout connu pour deux oeuvres d'entomologie : "La vie des abeilles" et "La vie des fourmis".

les poèmes qui suivent sont extraits du livre cité plus bas, dans le chapitre "Quinze chansons". En voici quelques passages sur le thème féminin. Ils portent pour titre le numéro d'ordre dans le recueil.

II

Et s'il revenait un jour, que faut-il lui dire ?
- Dites-lui qu'on l'attendit jusqu'à s'en mourir.

Et s'il m'interroge encore sans me reconnaître ?
- Parlez-lui comme une soeur. Il souffre peut-être.

Et s'il demande où vous êtes, que faut-il répondre ?
- Donnez-lui mon anneau d'or, sans rien lui répondre.

Et s'il veut savoir pourquoi la salle est déserte ?
- Montrez-lui la lampe éteinte et la porte ouverte.

Et s'il m'interroge alors sur la dernière heure ?
- Dites-lui que j'ai souri de peur qu'il ne pleure !

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IV

Les filles aux yeux bandés
    (Ôtez les bandeaux d'or)
Les filles aux yeux bandés
Cherchent leurs destinées ...

Ont ouvert à midi,
     (Gardez les bandeaux d'or)
Ont ouvert à midi,
Le palais des prairies ...

Ont salué la vie,
    (Serrez les bandeaux d'or)
Ont salué la vie,
Et ne sont point sorties ...

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VII

Les sept filles d'Orlamonde,
    Quand la fée fut morte,
Les sept filles d'Orlamonde,
    Ont cherché les portes.

Ont allumé leurs sept lampes,
    Ont ouvert les tours,
Ont ouvert quatre cents salles,
    Sans trouver le jour...

Arrivent aux grottes sonores,
    Descendent alors ;
Et sur une porte close,
    Trouvent une clef d'or.

Voient l'océan par les fentes,
    Ont peur de mourir,
Et frappent à la porte close,
    Sans oser l'ouvrir ...

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VIII

Elle avait trois couronnes d'or,
À qui les donna-t-elle ?
Elle en donne une à ses parents :
Ont acheté trois réseaux d'or
Et l'ont gardée jusqu'au printemps.

Elle en donne une à ses amants :
Ont acheté trois rets d'argent
Et l'ont gardée jusqu'à l'automne.

Elle en donne une à ses enfants :
Ont acheté trois nœuds de fer,
Et l'ont enchaînée tout l'hiver.

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IX

Elle est venue vers le palais
Le soleil se levait à peine ;
Elle est venue vers le palais,
Les chevaliers se regardèrent
Toutes les femmes se taisaient.

Elle s'arrêta devant la porte,
Le soleil se levait à peine ;
Elle s'arrêta devant la porte
On entendit marcher la reine
Et son époux l'interrogeait.

Où allez-vous, où allez-vous ?
- Prenez garde, on y voit à peine ;
Où allez-vous, où allez-vous ?
Quelqu'un vous attend-il là-bas ?
Mais elle ne répondait pas.

Elle descendit vers l'inconnue,
- Prenez garde, on y voit à peine -
Elle descendit vers l'inconnue,
L'inconnue embrassa la reine,
Elles ne se dirent pas un mot
Et s'éloignèrent aussitôt.

Son époux pleurait sur le seuil
- Prenez garde, on y voit à peine ;
Son époux pleurait sur le seuil,
On entendait marcher la reine,
On entendait tomber les feuilles.

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XI

Ma mère, n'entendez-vous rien?
Ma mère, on vient avertir...
Ma fille, donnez-moi vos mains.
Ma fille, c'est un grand navire...

Ma mère, il faut prendre garde...
Ma fille, ce sont ceux qui partent...
Ma mère, est-ce un grand danger ?
Ma fille, il va s'éloigner...

Ma mère. Elle approche encore...
Ma fille, il est dans le port.
Ma mère, Elle ouvre la porte...
Ma fille, ce sont ceux qui sortent.

Ma mère, c'est quelqu'un qui entre...
Ma fille, il a levé l'ancré.
Ma mère, Elle parle à voix basse...
Ma fille, ce sont ceux qui passent.

Ma mère, Elle prend les étoiles!...
Ma fille, c'est l'ombre des voiles.
Ma mère. Elle frappe aux fenêtres...
Ma fille, elles s'ouvrent peut-être...

Ma mère, on n'y voit plus clair...
Ma fille, il va vers la mer.
Ma mère, je l'entends partout...
Ma fille, de qui parlez-vous ?

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XIII

J'ai cherché trente ans, mes sœurs,
    Où s'est-il caché ?
J'ai marché trente ans, mes sœurs,
    Sans m'en approcher...

J'ai marché trente ans, mes sœurs,
    Et mes pieds sont las,
II était partout, mes sœurs,
    Et n'existe pas...

L'heure est triste enfin, mes sœurs,
    Ôtez mes sandales,
Le soir meurt aussi, mes sœurs,
    Et mon âme a mal ...

Vous avez seize ans, mes sœurs,
    Allez loin d'ici,
Prenez mon bourdon, mes sœurs,
    Et cherchez aussi ...

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XIV

Les trois sœurs ont voulu mourir
Elles ont mis leurs couronnes d'or
Et sont allées chercher leur mort.

S'en sont allées vers la forêt :
"Forêt, donnez-nous notre mort,
Voici nos trois couronnes d'or."

La forêt se mit à sourire
Et leur donna douze baisers
Qui leur montrèrent l'avenir.

Les trois sœurs ont voulu mourir
S'en sont allées chercher la mer
Trois ans après la rencontrèrent:

"Ô mer donnez-nous notre mort,
Voici nos trois couronnes d'or."

Et la mer se mit à pleurer
Et leur donna trois cents baisers,
Qui leur montrèrent le passé.

Les trois sœurs ont voulu mourir
S'en sont allées chercher la ville
La trouvèrent au milieu d'une île :

"Ô ville, donnez-nous notre mort,
Voici nos trois couronnes d'or."

Et la ville, s'ouvrant à l'instant
Les couvrit de baisers ardents,
Qui leur montrèrent leur présent.
 

Maurice Maeterlinck ("Serres Chaudes, Quinze Chansons, Nouveaux Poèmes" - éditions "À L'enseigne Du Chat Qui Pêche", 1947)



1 mars 2008

Jean-Hugues MALINEAU - le féminin en poésie

Jean-Hugues Malineau (né en 1945), est un poète d'aujourd'hui, et l'un des acteurs essentiels pour la diffusion, la connaissance des auteurs et des textes en milieu scolaire, animateur d'ateliers de création poétique.
"Jean-Hugues Malineau propose des rencontres scolaires (de la maternelle à l'université) sur la poésie, ou des ateliers d'écriture durant lesquels il s'adresse à la sensibilité, à l'humour, à l'imagination, au sens rythmique, à la sensualité comme à la logique ou à la culture de l'enfant." Plus d'infos à son adresse Web (lien cliquable) :
http://jhmalineau.free.fr/

La chenille

Elle épouse le rail unique des nervures
Avec ses soufflets ses wagons
tous nos raves en voiture
jusqu’à la gare papillon

Omnibus et chenillard
voici donc la gare cocon
agitez vos blancs mouchoirs
mon terminus c’est papillon

Voici la fin de l’aventure
je m’envole c’est ma station
qu’on me pardonne les ratures
puisque voilà le papillon.

Jean-Hugues Malineau ("Pas si bêtes, les animaux" - Éditions de L'École des loisirs, 2003)

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Virelangue*

Josette sans souci
chaussa ses chaussures

sur son sofa soyeux

Jean-Hugues Malineau (dans "Dix Dodus Dindons - le trésor des virelangues françaises" - illustrations de Pef - Albin Michel Jeunesse, 1997)

fille_verte_cr_ation__PP10*Création de virelangues

Il s'agit de proposer des comptines ou de "simples" phrases contenant des difficultés de diction et aussi de compréhension, car le résultat est quand même souvent très tordu, afin de mettre en difficulté celui qui les prononce. La virelangue (ce mot est au féminin comme "langue") joue le plus souvent sur la répétition de consonnes phonétiquement proches.

Exemples, souvent connus :
"Les chaussettes de l'archiduchesse sont sèches et archi sèches."
"Un chasseur sachant chasser doit savoir chasser sans son chien."
"Si six scient scient cent cyprès, six cent six scies scient six cent six cyprès".
"
Ton thé t'a-t-il ôté ta toux ?"
"Le geai gélatineux geignait dans le jasmin" (cité par René de Obaldia, voir son paragraphe).

Voici une adresse intéressante avec une présentation, des exemples, une démarche et des productions de virelangues :
http://www.csdm.qc.ca/fseguin/classe/janine/virelangues/realisations/index.htm



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1 mars 2008

Stéphane MALLARMÉ - le féminin en poésie

Stéphane Mallarmé (1842-1898), est plus connu pour son oeuvre poétique difficile, ses pièces de théâtre ou ses traductions d'Edgar Poë que pour ses quatrains-poèmes, jugés mineurs.
Deux courts textes suffiront à saisir (?) le style de l'auteur. Ils concernent deux métiers féminins :

La marchande d'habits

Le vif oeil dont tu regardes
Jusques à leur contenu
Me sépare de mes hardes
Et comme un dieu je vais nu.

Stéphane Mallarmé ("Poésies complètes" - 1887)

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La marchande d'herbes aromatiques

Ta paille azur de lavandes,
Ne crois pas avec ce cil
Osé que tu me la vendes
Comme a l'hypocrite s'il
 
En tapisse la muraille
De lieux les absolus lieux
Pour le ventre qui se raille
Renaître aux sentiments bleus.
 
Mieux entre une envahissante
Chevelure ici mets-la
Que le brin salubre y sente
Zéphirine, Paméla
 
Ou conduise vers l'époux
Les prémices de tes poux.

Stéphane Mallarmé ("Poésies complètes" - 1887)

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Apparition

La lune s'attristait. Des séraphins en pleurs
Rêvant, l'archet aux doigts, dans le calme des fleurs
Vaporeuses, tiraient de mourantes violes
De blancs sanglots glissant sur l'azur des corolles.
C'était le jour béni de ton premier baiser.
Ma songerie aimant à me martyriser
S'enivrait savamment du parfum de tristesse
Que même sans regret et sans déboire laisse
La cueillaison d'un rêve au coeur qui l'a cueilli.
J'errais donc, l'oeil rivé sur le pavé vieilli
Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue
Et dans le soir, tu m'es en riant apparue
Et j'ai cru voir la fée au chapeau de clarté
Qui jadis sur mes beaux sommeils d'enfant gâté
Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées
Neiger de blancs bouquets d'étoiles parfumées.

Stéphane Mallarmé ("Poésies complètes" - 1887)



1 mars 2008

Pierre MENANTEAU - le féminin en poésie

Pierre Menanteau (1895-1992), enseignant et poète, est l'auteur d'anthologies poétiques ("Florilèges"), dans lesquelles il s'attache à faire connaître les auteurs anciens et contemporains pour la jeunesse.
Ses Oeuvres poétiques complètes en plusieurs tomes sont parues  aux Éditions Soc et Foc.

À l'école du buisson

Marinette est à l'école.
Elle vole, vole, vole,
Sur les ailes d'un bourdon.
Vite on ouvre une fenêtre:
Un pinson alors pénètre
Sur des ailes de chanson.
Vite on ferme la fenêtre.
Mais l’œil voit l'escarpolette
D'une araignée au plafond.
Ah! l’écolière parfaite
Que vous êtes, Marinette,
À l'école du buisson !

Pierre Menanteau ("Oeuvres poétiques complètes" - tome V - Éd Soc et Foc)

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Les sept filles du ciel

Les sept filles du ciel ont dans leurs mains la clef.
La lumière et la pluie échangent leurs mirages
Et le dieu qui circule au milieu des nuages

Frappe d'un bâton d'or son cheval pommelé.
Les sept filles du ciel ont ouvert les coffrets
Qui tenaient enfermées les sept couleurs du monde ;
Sous le bel arc-en-ciel, elles font une ronde
Et la Terre, à chacune, offre son frais bouquet.

Pierre Menanteau ("Oeuvres poétiques complètes")

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Le premier vol de l’hirondelle

Mes ciseaux à peine aiguisés
Coupent le ciel qui se déplace.

Une brasse. Encore une brasse.
Dans l’ouverture de la nasse

- Bon hirondeau chasse de race  -
Un moustique s’est enfourné.

Ce petit nid où je suis né
Comme il s’éloigne dans l’espace !

A tire-ligne d’hirondelle
C’est un nom nouveau que j’écris

Et je l’écris à tire-d’aile
Et je l’écris à tire-cri

Pierre Menanteau ("Oeuvres poétiques complètes")



 

1 mars 2008

Jean-Luc MOREAU - le féminin en poésie

Jean-Luc Moreau, né en 1927, est écrivain, poète et universitaire. Il est l’auteur de recueils de poèmes (comme Poèmes de la souris verte, Hachette Jeunesse, 2003) et d’anthologies (La Liberté racontée aux enfants, éditions ouvrières, 1988), et a également écrit des contes pour les enfants.
On trouvera sur ce blog d'autres textes de Jean-Luc Moreau, en particulier ici : PRINT POÈTES 2009 : L'HUMOUR des poètes

Devinette

Ma face lisse
Que rien ne plisse
Nul sauf Alice
Ne la franchit.

D'où que je vienne,
Venise ou Vienne,
Qu'on s'en souvienne :
Je réfléchis.

solution : (riorim el)

Jean-Luc Moreau ("Mon premier livre de devinettes" - Recueil d'auteurs sous la directon de Jacques Charpentreau - Collection Enfance heureuse, Éditions ouvrières et Le Temps apprivoisé, 1986)

fille_verte_cr_ation__PP10Devinettes

La devinette peut prendre la forme d'un petit poème.
Le mot à deviner, en général objet ou animal (mais on peut jouer par exemple avec les noms de métiers) peut se trouver caché dans le poème, en acrostiche, en anagramme ou sous la forme d'une rime incomplète qui termine le dernier vers. Pour plus de détails voir ici sur le blog (bas de page) : PRINT POÈTES 2009 : L'HUMOUR des poètes



1 mars 2008

Jean de MEUNG - le féminin en poésie

Jean de Meung (1240-1305, dates approximatives) est un poète français dont le nom d'auteur varie selon les sources et les mises en français moderne : Jean de Meun, Jehan de Meung, Jehan de Meun (il est né à Meung-sur-Loire, dans le Loiret). Son nom véritable serait Jean Chopinel ou Jean Clopinel.

Un texte de jadis repris par les mouvements féministes d'aujourd'hui :

Les femmes sont nées libres

Les femmes sont nées libres
car nature n'est pas si sotte
qu'elle fasse naître Marotte
seulement pour son Robichon
et non plus, si bien regardons
Robichon pour la Mariette
ni pour Agnès, ni pour Perrette,
mais nous a faits, mon fils, n'en doute
toutes pour tous et tous pour toutes.
Chacune pour chacun commune
et chacun commun à chacune.

Jean de Meung



1 mars 2008

Alfred de MUSSET - le féminin en poésie

Alfred de Musset (1810-1857) est un des plus importants poètes du XIXe siècle. Une biographie et une bibliographie sont visibles à cette adresse : http://www.etudes-litteraires.com/musset.php

Chanson de Barberine

Beau chevalier qui partez pour la guerre,
Qu'allez-vous faire
Si loin d'ici ?
Voyez-vous pas que la nuit est profonde,
Et que le monde
N'est que souci ?

Vous qui croyez qu'une amour délaissée
De la pensée
S'enfuit ainsi,
Hélas ! hélas ! chercheurs de renommée,
Votre fumée
S'envole aussi.

Beau chevalier qui partez pour la guerre,
Qu'allez-vous faire
Si loin de nous ?
J'en vais pleurer, moi qui me laissais dire
Que mon sourire
Était si doux.

Alfred de Musset ("Poésies nouvelles")

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La poésie suivante est souvent raccourcie pour la classe (sans les passages en italique). Encore une fois, c'est dommage, mais à vous de voir ...

À Ninon

Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
L'amour, vous le savez, cause une peine extrême ;
C'est un mal sans pitié que vous plaignez vous-même ;
Peut-être cependant que vous m'en puniriez.

Si je vous le disais, que six mois de silence
Cachent de longs tourments et des voeux insensés :
Ninon, vous êtes fine, et votre insouciance
Se plaît, comme une fée, à deviner d'avance ;
Vous me répondriez peut-être : Je le sais.

Si je vous le disais, qu'une douce folie
A fait de moi votre ombre, et m'attache à vos pas :
Un petit air de doute et de mélancolie,
Vous le savez, Ninon, vous rend bien plus jolie ;
Peut-être diriez-vous que vous n'y croyez pas.

Si je vous le disais, que j'emporte dans l'âme
Jusques aux moindres mots de nos propos du soir :
Un regard offensé, vous le savez, madame,
Change deux yeux d'azur en deux éclairs de flamme ;
Vous me défendriez peut-être de vous voir.

Si je vous le disais, que chaque nuit je veille,
Que chaque jour je pleure et je prie à genoux ;
Ninon, quand vous riez, vous savez qu'une abeille
Prendrait pour une fleur votre bouche vermeille ;
Si je vous le disais, peut-être en ririez-vous.

Mais vous ne saurez rien. Je viens, sans rien en dire,
M'asseoir sous votre lampe et causer avec vous ;
Votre voix, je l'entends ; votre air, je le respire ;
Et vous pouvez douter, deviner et sourire,
Vos yeux ne verront pas de quoi m'être moins doux.

Je récolte en secret des fleurs mystérieuses :
Le soir, derrière vous, j'écoute au piano
Chanter sur le clavier vos mains harmonieuses,
Et, dans les tourbillons de nos valses joyeuses,
Je vous sens, dans mes bras, plier comme un roseau.

La nuit, quand de si loin le monde nous sépare,
Quand je rentre chez moi pour tirer mes verrous,
De mille souvenirs en jaloux je m'empare ;
Et là, seul devant Dieu, plein d'une joie avare,
J'ouvre, comme un trésor, mon coeur tout plein de vous.

J'aime, et je sais répondre avec indifférence ;
J'aime, et rien ne le dit ; j'aime, et seul je le sais ;
Et mon secret m'est cher, et chère ma souffrance ;
Et j'ai fait le serment d'aimer sans espérance,
Mais non pas sans bonheur ;  je vous vois, c'est assez.

Non, je n'étais pas né pour ce bonheur suprême,
De mourir dans vos bras et de vivre à vos pieds.
Tout me le prouve, hélas ! jusqu'à ma douleur même ...
Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?

Alfred de Musset ("Poésies posthumes")

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Le rideau de ma voisine

Le rideau de ma voisine
Se soulève lentement.
Elle va, je l'imagine,
Prendre l'air un moment.

On entr'ouvre la fenêtre :
Je sens mon cœur palpiter.
Elle veut savoir peut-être
Si je suis à guetter.

Mais, hélas ! ce n'est qu'un rêve ;
Ma voisine aime un lourdaud,
Et c'est le vent qui soulève
Le coin de son rideau.

Alfred de Musset ("Poésies nouvelles")

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Pour les (très) grandes classes, cette superbe Andalouse :

L'Andalouse

Avez-vous vu, dans Barcelone,
Une Andalouse au sein bruni ?
Pâle comme un beau soir d'automne !
C'est ma maîtresse, ma lionne !
La marquesa d'Amaëgui !

J'ai fait bien des chansons pour elle,
Je me suis battu bien souvent.
Bien souvent j'ai fait sentinelle,
Pour voir le coin de sa prunelle,
Quand son rideau tremblait au vent.

Elle est à moi, moi seul au monde.
Ses grands sourcils noirs sont à moi,
Son corps souple et sa jambe ronde,
Sa chevelure qui l'inonde,
Plus longue qu'un manteau de roi !

C'est à moi son beau col qui penche
Quand elle dort dans son boudoir,
Et sa basquina sur sa hanche,
Son bras dans sa mitaine blanche,
Son pied dans son brodequin noir !

Vrai Dieu ! Lorsque son oeil pétille
Sous la frange de ses réseaux,
Rien que pour toucher sa mantille,
De par tous les saints de Castille,
On se ferait rompre les os.

Qu'elle est superbe en son désordre,
Quand elle tombe, les seins nus,
Qu'on la voit, béante, se tordre
Dans un baiser de rage, et mordre
En criant des mots inconnus !

Et qu'elle est folle dans sa joie,
Lorsqu'elle chante le matin,
Lorsqu'en tirant son bas de soie,
Elle fait, sur son flanc qui ploie,
Craquer son corset de satin !

Allons, mon page, en embuscades !
Allons ! la belle nuit d'été !
Je veux ce soir des sérénades
A faire damner les alcades
De Tolose au Guadalété
.

Alfred de Musset ("Premières poésies")

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Cantate de Bettine

Nina, ton sourire,
Ta voix qui soupire,
Tes yeux qui font dire
Qu'on croit au bonheur,

Ces belles années,
Ces douces journées,
Ces roses fanées,
Mortes sur ton cœur ...

Nina, ma charmante,
Pendant la tourmente,
La mer écumante
Grondait à nos yeux ;

Riante et fertile,
La plage tranquille
Nous montrait l'asile
Qu'appelaient nos v
œux !

Aimable Italie,
Sagesse ou folie,
Jamais ne t'oublie
Qui t'a vue un jour !

Toujours plus chérie,
Ta rive fleurie
Toujours sera la patrie
Que cherche l'amour
.

Alfred de Musset ("Poésies complémentaires")

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La nuit d'octobre (passage adressé par "Le Poète" à sa Muse)

Honte à toi qui la première
M'as appris la trahison,
Et d'horreur et de colère
M'as fait perdre la raison !
Honte à toi, femme à l'oeil sombre,
Dont les funestes amours
Ont enseveli dans l'ombre
Mon printemps et mes beaux jours !
C'est ta voix, c'est ton sourire,
C'est ton regard corrupteur,
Qui m'ont appris à maudire
Jusqu'au semblant du bonheur ;
C'est ta jeunesse et tes charmes
Qui m'ont fait désespérer,
Et si je doute des larmes,
C'est que je t'ai vu pleurer.
Honte à toi, j'étais encore
Aussi simple qu'un enfant ;
Comme une fleur à l'aurore,
Mon coeur s'ouvrait en t'aimant.
Certes, ce coeur sans défense
Put sans peine être abusé ;
Mais lui laisser l'innocence
Était encor plus aisé.
Honte à toi ! tu fus la mère
De mes premières douleurs,
Et tu fis de ma paupière
Jaillir la source des pleurs !
Elle coule, sois-en sûre,
Et rien ne la tarira ;
Elle sort d'une blessure
Qui jamais ne guérira ;
Mais dans cette source amère
Du moins je me laverai,
Et j'y laisserai, j'espère,
Ton souvenir abhorré !

Alfred de Musset ("Poésies nouvelles - Les Nuits")



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