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lieu commun

12 mars 2007

Le Printemps des poètes et René Char

affiche_Printemps_2007Poète français marqué par le surréalisme, René Char (1907-1988) fut aussi un héros de la Résistance et un humaniste.
C'est sous son parrainage qu'est placé le Printemps des Poètes 2007, pour (aussi) le centenaire de sa naissance.

En effet, le thème "Lettera amorosa" est le titre d'un long poème de René Char, un "chant d'amour", paru dans le recueil "La Parole en Archipel".

A qui est adressée cette Lettera amorosa ?
René Char le précise dans la préface du recueil :

« Amants qui n’êtes qu’à vous-mêmes, aux rues, aux bois et à la poésie ; couple aux prises avec tout le risque, dans l’absence, dans le retour, mais aussi dans le temps brutal ; dans ce poème il n’est question que de vous. »

Deux versions de "Lettera amorosa" , illustrées par Jean Arp (1952), puis par Georges Braque (1963) ont été publiées.

Vient de paraître ce mois-ci en Poésie / Gallimard (édition de poche) :
Lettera amorosa de René Char. Cette édition contient les deux versions illustrées, et c'est vraiment très beau (et pas cher). (voir image ci-dessous)

D'autre part, le numéro 931 de la revue Textes et Documents pour la classe (TDC), parue le 1er mars 2007, est consacré à René Char, à l'occasion de la célébration du centenaire de sa naissance.

 «Je ne puis être et ne veux vivre que dans l’espace et dans la liberté de mon amour. Nous ne sommes pas ensemble le produit d’une capitulation, ni le motif d’une servitude plus déprimante encore. Aussi menons-nous l’un contre l’autre une guérilla sans reproche».


"Je ris merveilleusement avec toi. Voilà la chance unique".


Un passage plus long :livre_char_lettera

Lettera amorosa (extrait en continu)

« (...) Je voudrais me glisser dans une forêt où les plantes se refermeraient et s’étreindraient derrière nous, forêt nombre de fois centenaire, mais elle reste à semer. C’est un chagrin d’avoir, dans sa courte vie, passé à côté du feu avec des mains de pêcheur d’éponges. « Deux étincelles, tes aïeules », raille l’alto du temps, sans compassion.
L’automne ! Le parc compte ses arbres bien distincts. Celui-ci est roux traditionnellement ; cet autre, fermant le chemin, est une bouillie d’épines. Le rouge-gorge est arrivé, le gentil luthier des campagnes. Les gouttes de son chant s’égrainent sur le carreau de la fenêtre. Dans l’herbe de la pelouse grelottent de magiques assassinats d’insectes. Ecoute, mais n’entends pas.
Mon éloge tournoie sur les boucles de ton front, comme un épervier à bec droit.
Parfois j’imagine qu’il serait bon de se noyer à la surface d’un étang où nulle barque ne s’aventurerait. Ensuite, ressusciter dans le courant d’un vrai torrent où tes couleurs bouillonneraient.
L’air que je sens toujours prêt à manquer à la plupart des êtres, s’il te traverse, a une profusion et des loisirs étincelants.
Il faut que craque ce qui enserre cette ville où tu te trouves retenue. Vent, vent, vent autour des troncs et sur les chaumes.
J’ai levé les yeux sur la fenêtre de ta chambre. As-tu tout emporté ? Ce n’est qu’un flocon qui fond sur ma paupière. Laide saison, où l’on croit regretter, où l’on projette, alors qu’on s’aveulit. (...)

René Char (Oeuvres complètes / René Char. - Gallimard, 1988 - recueil "La parole en archipel").
source officielle du texte de René Char: Bibliothèque départementale du Loiret / Conseil Général du Loiret. J'ai replacé les passages cités dans l'ordre original, d'après l'édition Poésie/Gallimard.

Le site du Printemps des Poètes est ici en un clic de souris.


On peut retrouver d'autres poèmes, rassemblés par Jacques Charpentreau, dans "Poèmes pour les jeunes du temps présent", une anthologie de poésie contemporaine. Editions ouvrières -  1974. J'ignore si ce livre est encore disponible.
René Char y est présenté ainsi (extrait) :
..." Sa poésie [garde] sa noblesse et sa grandeur mystérieuse...  C'est l'une des plus importantes de notre époque, en une forme dense et d'une étrange beauté ... elle vibre d'un lyrisme sans concession. Son hermétisme est celui de l'évidence fulgurante." J. Charpentreau.

Voici 3 poésies tirées de cette anthologie : Le martinet, jeu muet, le village vertical.
Pour mieux connaître la poésie de René Char, deux autres textes : Allégeance, une vraie lettera amorosa ;
et cette jolie poésie : La complainte du lézard amoureux.


Le martinet

Martinet aux ailes trop larges, qui vire et crie sa joie autour de la maison. Tel est le coeur.

Il dessèche le tonnerre. Il sème dans le ciel serein. S'il touche au sol, il se déchire.

Sa repartie* est l'hirondelle. Il déteste la familière. Que vaut dentelle de la tour ?

Sa pause est au creux le plus sombre. Nul n'est plus à l'étroit que lui.

L'été de la longue clarté, il filera dans les ténèbres, par les persiennes de minuit.

Il n'est pas d' yeux pour le tenir. Il crie, c'est toute sa présence. Un mince fusil va l'abattre. Tel est le coeur.

René Char  ("La fontaine narrative" - 1947 - "Fureur et mystère" - 1948 - Gallimard)
Non, pas d'accent sur "repartie". Cette troisième strophe est difficile, et pas seulement pour les élèves ...


Jeu muet

Avec mes dents
J'ai pris la vie
Sur le couteau de ma jeunesse.
Avec mes lèvres aujourd'hui,
Avec mes lèvres seulement...

Courte parvenue,
La fleur des talus,
Le dard d'Orion
Est réapparu.

René Char ("Le nu perdu" - 1971 - Gallimard)
On trouve parfois ce court poème avec seulement la première strophe.


Le village vertical

Tels des loups ennoblis
Par leur disparition,
Nous guettons l'an de crainte
Et de libération.

Les loups enneigés
Des lointaines battues
A la date effacée.

Sous l'avenir qui gronde,
Furtifs, nous attendons,
Pour nous affilier,
L'amplitude d'amont.

Nous savons que les Choses arrivent
Soudainement
Sombres ou trop ornées.

Le dard qui liait les deux draps
Vie contre vie, clameur et mont,
Fulgura.

René Char ("Le nu perdu" - 1971 - Gallimard)


Allégeance  

Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n’est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l’aima ?

Il cherche son pareil dans le vœu des regards. L’espace qu’il parcourt est ma fidélité. Il dessine l’espoir et léger l’éconduit. Il est prépondérant sans qu’il y prenne part.

Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s’inscrit son essor, ma liberté le creuse.

Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n’est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l’aima et l’éclaire de loin pour qu’il ne tombe pas ?

René Char ( "La fontaine narrative  - Fureur et Mystère" - 1962)


La complainte du lézard amoureux

N’égraine pas le tournesol,
Tes cyprès auraient de la peine,
Chardonneret, reprend ton vol
Et reviens à ton nid de laine.

Tu n’es pas un caillou du ciel
Pour que le vent te tienne quitte,
Oiseau rural ; l’arc-en ciel
S’unifie dans la marguerite.

L’homme fusille, cache-toi ;
Le tournesol est son complice.
Seules les herbes sont pour toi,
Les herbes des champs qui plissent.

Le serpent ne te connaît pas,
Et la sauterelle est bougonne ;
La taupe, elle, n’y voit pas ;
Le papillon ne hait personne.

Il est midi, chardonneret.
Le séneçon est là qui brille.
Attarde-toi, va sans danger :
L’homme est rentré dans sa famille !

L’écho de ce pays est sûr.
J’observe, je suis bon prophète ;
Je vois tout de mon petit mur,
Même tituber la chouette.

Qui, mieux qu’un lézard amoureux,
peut dire des secrets terrestres ?
Ô léger gentil roi des cieux,
Que n’as-tu ton nid dans ma pierre !

René Char (1947 - "Les matinaux")
Ce texte a été mis en musique par Julos Beaucarne.


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11 mars 2007

Roman poétique - Et si c'était vrai

livre_et_si_Oui, un roman poétique, pas nouveau (paru en 2000, et 2005 pour l'édition de poche), je l'admets, mais il n'est jamais trop tard pour bien lire, et, avantage considérable, j'ai raté le film tiré de cette histoire, film raté d'ailleurs, si on en croit la rumeur publique.

Résumé de la quatrième de couverture
 : L'histoire de Lauren et Arthur défie la raison. Cette jeune femme blottie dans le placard d'Arthur l'architecte n'est pas vraiment là. Ou plutôt elle est là, mais seul Arthur peut la voir ; pourtant elle n'est ni un esprit ni un fantôme, et si elle semble joliment réelle, parle, râle et sourit, son véritable corps est au cinquième étage de l'hôpital de San Francisco, en état de coma dépassé...

Il y a une suite à cette histoire : Vous revoir, de Marc Levy chez le même éditeur: Pocket. Pas encore lu.

Et n'oubliez pas que depuis la loi Lang de 1981, pour protéger la diversité de l'édition, le prix du livre est quasiment le même partout. Achetez en librairie, on vous conseille et le choix est plus important qu'en grande surface.


10 mars 2007

Michel Deville - Mots en l'air

Michel Deville, né en 1931 est un cinéaste connu (Un Monde presque paisible, La Maladie de Sachs, Benjamin ou les Mémoires d’un puceau, Péril en la demeure, le Dossier 51, La Lectrice…).
C'est aussi un poète, moins connu, auteur de huit recueils (au "cherche midi éditeur" : Rien n'est sûr, Poézies, Mots en l'air, L'Air de rien).

mots_en_l_air_blog

Exceptionnellement, ce message est aussi rangé dans
POÉSIE d'humour, dérision, parodie

Tristan et Yseut

- Parle-moi, dit Yseut à Tristan.
- Je t'aime, dit Tristan à Yseut.
- Je sais. Mais c'est tout ? demanda Yseut.
- Je t'aime beaucoup, répondit Tristan.
- Mais encore ? insista Yseut.
- Je t'adore, ajouta Tristan.
- C'est attristant, pensa Yseut.

Michel Deville ("Mots en l'air" 1993)

Un autre clin d'oeil :

Mots Croisés

Les grands seigneurs, les chevaliers,
Les grands prélats ou de moins grands
Et la cohorte des manants
En route vers Jérusalem
S'arrêtaient le soir, harassés.
Certains écrivaient des poèmes,
D'autres, toujours l'amour des mots,
Devant les grilles des châteaux
Jouaient à un jeu
Baptisé
En souvenir d'eux
Mots croisés.

Michel Deville ("les Croisades")


et à la manière de Rudyard Kipling ("Tu seras un homme mon fils", voir plus bas ) ...

Lorsque et si ...

Lorsque l'on tremble encore à l'approche de l'autre,
Lorsque le doute encore est infiniment nôtre,
Lorsque les intuitions sont approximatives,
Lorsque devient l'humeur, pour un rien, agressive,
Lorsque la main est moite et le regard crétin,
Lorsque le tutoiement est encore incertain,
Lorsqu'on éclate en pleurs pour une peccadille,
C'est qu'on est amoureux, ma fille.

Si tu ne trembles plus, si tu n'as plus de doute,
Si ton humeur est droite ainsi qu'une autoroute,
Si galante est ta main
Et ton regard câlin,
Si tu en viens au tu sans tergiversation,
Si tu ne pleures plus avec obstination,
Si tu tires la langue à toute ta famille,
Tu seras un homme, ma fille.

Michel Deville ("Rien n'est sûr")


Rudyard Kipling, a écrit "If ..." (Si ...), en 1910. C'est la version traduite de l'anglais par l'écrivain Pierre Maurois (en 1918), qui est généralement retenue :

Tu seras un Homme, mon Fils (autre titre : Si ...)

Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.

Rudyard Kipling    (Bernard Lavilliers l'a mis en musique et interprété (1988).

Pour les amateurs, il existe d'autres traductions de la poésie de Kipling, la dernière de 2006 !
Voyez plutôt ici : http://www.crescenzo.nom.fr/kipling.html

9 mars 2007

Jacques Brel - chanson "amorosa"

lichen_Seine_Mantes  
Lichen en bord de Seine - mars 2007 ( Photo Lieucommun)

Jacques Brel (1929, Bruxelles - 1978), a écrit et interprété environ 200 chansons. Il était également acteur de cinéma : Les Risques du métier, Mon oncle Benjamin, L'Aventure c'est l'aventure, l'Emmerdeur ... (et réalisateur de deux autres films).

Ci-dessous, trois textes de Jacques Brel, sur le même thème

"Pour la rosée qui tremble au calice des fleurs
De n'être pas aimée et ressemble à ton cœur" ...


La Quête  (extrait de "l'Homme de la Mancha", comédie musicale créée aux Etats-Unis en 1965).
Jacques Brel écrit le livret et les chansons en langue française, avec des textes originaux, en 1968.
Voici une des tirades de Don Quichotte, dont le personnage est créé par l'auteur.

Rêver un impossible rêve
Porter le chagrin des départs
Brûler, d'une possible fièvre
Partir, où personne ne part
Aimer jusqu'à la déchirure
Aimer, même trop, même mal
Tenter, sans force et sans armure
D'atteindre l'inaccessible étoile
Telle est ma quête
Suivre l'étoile

Peu m'importent mes chances
Peu m'importe le temps
Ou ma désespérance
Et puis lutter toujours
Sans questions ni repos
Se damner
Pour l'or d'un mot d'amour
Je ne sais si je serai ce héros
Mais mon coeur serait tranquille
Et les villes s'éclabousseraient de bleu

Parce qu'un malheureux
Brûle encore, bien qu'ayant tout brûlé
Brûle encore, même trop, même mal
Pour atteindre à s'en écarteler
Pour atteindre l'inaccessible étoile

Jacques Brel 1968 (paroles et musique)


Je t'aime

Pour la rosée qui tremble au calice des fleurs
De n'être pas aimée et ressemble à ton cœur
Je t'aime
Pour le noir de la pluie au clavecin de l'étang
Jouant page de lune et ressemble à ton chant
Je t'aime
Pour l'aube qui balance sur le fil d'horizon
Lumineuse et fragile et ressemble à ton front
Je t'aime

À l'aurore légère qu'un oiseau fait frémir
En la battant de l'aile et ressembles à ton rire
Je t'aime
Pour le jour qui se lève et dentelles de bois
Au point de la lumière et ressemble à ta joie
Je t'aime
Pour le jour qui revient d'une nuit sans amour
Et ressemble déjà, ressemble à ton retour
Je t'aime
Pour la porte qui s'ouvre pour le cri qui jaillit
Ensemble de deux cœurs et ressemble à ce cri
Je t'aime... Je t'aime...  Je t'aime...

Jacques Brel - 1959 (musique de François Rauber)


Ne me quitte pas               

Ne me quitte pas
Il faut oublier
Tout peut s'oublier
Qui s'enfuit déjà
Oublier le temps
Des malentendus
Et le temps perdu
A savoir comment
Oublier ces heures
Qui tuaient parfois
A coups de pourquoi
Le cœur du bonheur
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas

Moi je t'offrirai
Des perles de pluie
Venues de pays
Où il ne pleut pas
Je creuserai la terre
Jusqu'après ma mort
Pour couvrir ton corps
D'or et de lumière
Je ferai un domaine
Où l'amour sera roi
Où l'amour sera loi
Où tu seras reine
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas

Ne me quitte pas
Je t'inventerai
Des mots insensés
Que tu comprendras
Je te parlerai
De ces amants-là
Qui ont vu deux fois
Leurs cœurs s'embraser
Je te raconterai
L'histoire de ce roi
Mort de n'avoir pas
Pu te rencontrer
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas

On a vu souvent
Rejaillir le feu
D'un ancien volcan
Qu'on croyait trop vieux
Il est paraît-il
Des terres brûlées
Donnant plus de blé
Qu'un meilleur avril
Et quand vient le soir
Pour qu'un ciel flamboie
Le rouge et le noir
Ne s'épousent-ils pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas

Ne me quitte pas
Je ne vais plus pleurer
Je ne vais plus parler
Je me cacherai là
A te regarder
Danser et sourire
Et à t'écouter
Chanter et puis rire
Laisse-moi devenir
L'ombre de ton ombre
L'ombre de ta main
L'ombre de ton chien
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas.

Jacques Brel  1959 (paroles et musique)


7 mars 2007

Jean-Pierre Siméon

Jean-Pierre Siméon est né en 1950.                     Paysage du Vexin - mars 07 - (Photo labo Lieucommun)

Trois poésies déjà rangées
dans POÉSIES pour la CLASSE - CYCLE 3 et COLLÈGE

L'orange des rêvesVexin_groupe_d_arbres_pinc

Tu peux perdre le nord
comme on dit
tu peux perdre patience
tu peux perdre ton temps

perdre la mémoire
et ses chemins aveugles

Le sommeil peut glisser
comme une truite
dans tes mains

Tu peux perdre ton sourire

Mais ne perds pas
ne perds jamais
l'orange de tes rêves

Jean-Pierre Siméon

("A l'aube du buisson" - Collection poèmes pour grandir - édit Cheyne)


Devinettes

Qui décoiffe la mer
Avec des mains qu'on ne voit pas ?
Qui roule sa chanson
Dans la gorge des torrents ?
Qui n'est jamais si lourd
Que quand un oiseau meurt ?

Le vent la pierre et le silence

Qui est ronde comme une joue
Et plus lourde que la peine ?
Qui habille le monde
Quand il se fait tard ?
Qui souffle chaque soir
La bougie du soleil ?

La pierre le silence et le vent

Jean-Pierre Siméon


Comme il est bon d'aimer

Comme il est bon d'aimer
Il suffit d'un mot
Pour prendre le monde
Au piège de nos rêves

Il suffit d'un geste
Pour relever la branche
Pour apaiser le vent

Il suffit d'un sourire
Pour endormir la nuit
Délivrer nos visages
De leur masque d'ombre

Mais cent milliards de poèmes
Ne suffiraient pas
Pour dire
Comme il est bon d'aimer

Jean-Pierre Siméon
Cette poésie sera déplacée vers  POÉSIES pour la CLASSE - LETTERA AMOROSA


D'autres poésies à ranger (C3 - Collège ?)

Promesses

Je cueillerai l'orange
et le bleu des saisons
Et devant la fenêtre
ouverte comme un livre
je lirai au matin
la phrase du torrent

Je donnerai ma soif
aux raisins de la pluie
Et devant le silence
des bûches étonnées
je vanterai le feu
Je vanterai l'orange
et le bleu des saisons

Jean-Pierre Siméon  ("A l'aube du buisson" - Collection poèmes pour grandir - édit Cheyne) 


Saisons

Si je dis
Les corbeaux font la ronde
Aux dessus du silence
Tu me dis c'est l'hiver.

Si je dis
Les rivières se font blanches
En descendant chez nous
Tu me dis le printemps.

Si je dis
Les arbres ont poussé
leurs millions de soleils
Tu me dis c'est l'été.

Si je dis
Les fontaines sont rousses
Et les chemins profonds
Tu me diras l'automne.

Mais si je dis
Le bonheur est à tous
Et tous sont heureux
Quelle saison diras-tu ?
Quelle saison des hommes ?

Jean-Pierre Siméon


Ce qu’il faudrait

Le soir
il faudrait tirer le ciel
comme une nappe
le laver le laver
le serrer dans l’armoire
avec son soleil ses oiseaux
ses feuilles de lumière
le garder bien à soi
comme un lac de silence
et quand viendrait le jour
s’en faire un vêtement
pour grandir

Jean-Pierre Siméon  ("Premiers poèmes pour tous les jours" - édit Milan)


Mauvais rêve

- Qu’ont-ils fait, papa
Qu’ont-ils fait de leurs mains
De plumes ?
- Envolées, mon garçon
Envolées dans le vent !

- Qu’ont-ils fait, papa
Qu’ont-ils fait de leurs yeux si doux ?
- Perdus, mon garçon,
perdus dans la nuit !

- Qu’ont-ils, papa
Qu’ont-ils fait du ruisseau de leur joie ?
- oublié, mon garçon, jeté dans le fossé !

- qu’ont-ils fait, papa
qu’ont-ils fait des mots
de leurs poèmes ?
- J’ai bien peur, mon garçon,
qu’ils ne les aiment plus.

Jean-Pierre Siméon
("A l'aube du buisson" - Collection poèmes pour grandir - édit Cheyne)


Nous ne vieillirons pas

Nous ne vieillirons pas
mon ami
je le jure
si nous faisons du temps
le jardin de nos rives
si nous suivons les pas de l'été
dans les fleurs
si nous marions nos mains
aux fontaines prodigues
si chaque jour nouveau
est un nouveau voyage
et le beau partage du fruit
pour nos lèvres

Nous ne vieillirons pas
l'eau est née pour la source
nous sommes nés pour vivre

Jean-Pierre Siméon ("La nuit respire" - Collection poèmes pour grandir - édit Cheyne)


 

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6 mars 2007

Un peu d'humour

                                 
Ci-dessous, un dessin de Philippe Geluck tiré de " L'excellent du chat" - Casterman 1996. Un album à consommer sans modération, et il y en a plein, des albums du chat.
Cliquez sur la toute petite image pour visiter le site de Ph. Geluck, et sur le dessin pour l'agrandir.

dessin_Geluck_60_mille_lions
  

6 mars 2007

Letteras amorosas à travers les temps ...

... de la conjugaison aussi.

On fera prochainement ici plus de place
à Robert Desnos (1900-1945).                                                            Photo DR et labo Lieucommun
On retrouve des textes de ce poète dans
toutes leschats_NB_enlac_s_pinc catégories pour la classe.
Voici une lettera amorosa de plus, à l'imparfait.

Conte de fées

Il était un grand nombre de fois
Un homme qui aimait une femme
Il était un grand nombre de fois
Une femme qui aimait un homme
Il était un grand nombre de fois
Une femme et un homme
Qui n'aimaient pas celui et
celle qui les aimaient

Il était une fois
Une seule fois peut-être
Une femme et un homme
qui s'aimaient


Et puis d' Amadis Jamyn (1538-1592), contemporain de Pierre de Ronsard, une autre lettera amorosa, au futur simple, que la force du sentiment amoureux a portée jusqu' à nous.
On en donne généralement la première ou les deux premières strophes.

Stances de l'impossible

L'été sera l'hiver et le printemps l'automne,
L'air deviendra pesant, le plomb sera léger :
On verra les poissons dedans l'air voyager
Et de muets qu'ils sont avoir la voix fort bonne.
L'eau deviendra le feu, le feu deviendra l'eau
Plutôt que je sois pris d'un autre amour nouveau.

Le mal donnera joie, et l'aise des tristesses !
La neige sera noire, et le lièvre hardi,
Le lion deviendra du sang acouardi,
La terre n'aura point d'herbes ni de richesses ;
Les rochers de soi-même auront un mouvement
Plutôt qu'en mon amour il y ait changement.

Le loup et la brebis seront en même étable
Enfermés sans soupçon d'aucune inimitié ;
L'aigle avec la colombe aura de l'amitié
Et le caméléon ne sera point muable :
Nul oiseau ne fera son nid au renouveau
Plutôt que je sois pris d'un autre amour nouveau.

La lune qui parfait en un mois sa carrière
La fera en trente ans au lieu de trente jours ;
Saturne qui achève avec trente ans son cours
Se verra plus léger que la lune légère :
Le jour sera la nuit, la nuit sera le jour
Plutôt que je m'enflamme au feu d'un autre amour.

Les ans ne changeront le poil ni la coutume,
Les sens et la raison demeureront en paix,
Et plus plaisants seront les malheureux succès
Que les plaisirs du monde au coeur qui s'en allume.
On haïra la vie, aimant mieux le mourir
Plutôt que l'on me voie à autre amour courir.

On ne verra loger au monde l'espérance ;
Le faux d'avec le vrai ne se discernera,
La fortune en ses dons changeante ne sera,
Tous les effets de mars seront sans violence,
Le soleil sera noir, visible sera Dieu
Plutôt que je sois vu captif en autre lieu.

Amadis Jamyn

Ces deux textes seront rangés dans POÉSIES pour la CLASSE - LETTERA AMOROSA


5 mars 2007

Lettres de chine

brocante_Champagne_livre_po_sie_carteMatin de chine pour voyageur de poésie, dimanche 4 mars à Champagne-sur-Oise (95).
Des
Letteras à un euro seulement les billets d'amour.


Villanelle (extrait)
cliquer sur l'image du livre ouvert pour le texte en français moderne

J'ay perdu ma tourterelle.
Est-ce point elle que j'oy?
Je veux aller après elle.

Tu regrettes ta femelle;
Hélas aussy fay-je moy :
J'ay perdu ma tourterelle.                                              
livre de chine (Photos Lieucommun)

Si ton amour est fidèle,
Aussy est ferme ma foy;
broc_Champagne_livre_po_sie_ouvert
Je veux aller après elle.

Ta plainte se renouvelle;
Toujours plaindre je me doy :
J'ay perdu ma tourterelle.

En ne voyant plus la belle,
Plus rien de beau je ne voy :
Je veux aller après elle.

Mort, que tant de fois j'appelle,
Prends ce qui se donne à toy :
J'ay perdu ma tourterelle.       
 
Je veux aller après elle.

Jean Passerat 1534-1602
La villanelle est un poème composé d'un nombre impair de tercets, avec des reprises de vers (refrains). Un quatrain termine le poème en reprenant les deux vers du refrain :
J'ay perdu ma tourterelle.
Je veux aller après elle
.


Philippe Fabre d'Eglantine est né en 1750.  Il écrit une chanson, L'Hyménée, en 1780, sur une musique de Victor Simon.
On la connaît sous le titre "Il pleut, il pleut bergère".
Fabre d'Eglantine a élaboré (avec d'autres) le calendrier républicain. Condamné par le tribunal révolutionnaire de Robespierre pour trahison, il meurt sur la guillotine en 1794.

Le texte de cette chanson pourrait être qualifié de lettera amorosa, si on ne s'arrête pas aux premiers couplets, comme on le fait souvent pour le rendre accessible aux enfants.

Il pleut, il pleut bergère

Il pleut, il pleut bergère, *
Presse tes blancs moutons,
Allons sous ma chaumière
Bergère, vite, allons.
J'entends sous le feuillage
L'eau qui tombe à grand bruit,
Voici, voici l'orage
Voici l'éclair qui luit.

Entends-tu le tonnerre ?
Il roule en approchant,
Prends un abri bergère
A ma droite en marchant.
Je vois notre cabane,
Et tiens, voici venir
Ma mère et ma sœur Anne
Qui vont l'étable ouvrir.

Bonsoir, bonsoir ma mère,
Ma sœur Anne bonsoir,
J'amène ma bergère
Près de nous ce soir.
Va te sécher ma mie,
Auprès de nos tisons.
Sœur, fais-lui compagnie,
Entrez, petits moutons.

Soignons bien, ô ma mère
Son tant joli troupeau;
Donnez plus de litière
A son petit agneau.
C'est fait, allons près d'elle
Eh bien, donc, te voilà !
En corset qu'elle est belle
Ma mère voyez-la.

Soupons! Prends cette chaise,
Tu seras près de moi;
Ce flambeau de mélèze
Brûlera devant toi.
Goûte de ce laitage
Mais tu ne manges pas !
Tu te sens de l'orage ?
Il a lassé tes pas.

Eh bien! voilà ta couche :
Dors-y bien jusqu'au jour;
Laisse-moi sur ta bouche
Prendre un baiser d'amour.
Ne rougis pas, bergère,
Ma mère et moi demain
Nous irons chez ton père
Lui demander ta main.

Philippe Fabre d'Eglantine (1780 - musique de Victor Simon)

* Version "moderne" du premier couplet :
Il pleut, il pleut, bergère !
Rentre tes blancs moutons,
Allons à ma chaumière
Bergère, vite allons !
J'entends sur le feuillage
L'eau qui tombe à grand bruit;
Voici venir l'orage;
Voici l'éclair qui luit.


4 mars 2007

Poésies et chansons de printemps ........................

arbre_printemps_champ_Droc
Premier sourire du printemps dans le Vexin en fin d'après-midi. Photo Lieucommun.

Voici le printemps, pour les poètes, c'est-à-dire pour tout le monde.
On peut déjà commencer avec un Premier sourire, de Théophile Gautier :

... " Mars qui rit malgré les averses
Prépare en secret le printemps " ...

---------------  SOMMAIRE PRINTEMPS (cliquer sur le n° de page) -----------------
les textes figurent sous le SOMMAIRE,  en plusieurs pages

page 1 (vous y êtes, déroulez la page)

  • Marc Alyn : Un printemps tout neuf
  • Auguste Angellier : Le printemps
  • Albert Arzenwiler : Petit printemps
  • Jean-Antoine de Baïf : Du printemps
  • Théodore de Banville : Le Printemps
  • Rémy Belleau : Avril
  • Paul Bergèse : À l’aube du printemps
  • Luc Bérimont : La nuit d'aube

page 2 (cliquer pour accès direct)

  • Aloysius Bertrand : Encore un printemps
  • Jacques Brenner : Chanson
  • Jean-Claude Brinette : La noce des oiseaux
  • René-Guy Cadou : Avant-printemps
  • Robert Calmels : Avril - Le papillon
  • Francis Carco : Printemps
  • Maurice Carême : Mars - Avril - Le printemps reviendra - À la rencontre du printemps - Le muguet
  • Anne-Marie Chapouton : Printemps
  • François-René de Chateaubriand : Nuit de printemps
  • Anne-Marie Chapouton : Printemps
  • André Chénier : Épigramme

page 3 (cliquer)

  • Charles Cros : Les quatre saisons, le printemps
  • Lucie Delarue-Mardrus : Joie du printemps
  • Philippe Desportes : Le printemps gracieux
  • Mohammed Dib : Printemps
  • Paul Éluard : Printemps
  • Maurice Fombeure : C'est le joli printemps
  • Théophile Gautier : Premier sourire du printemps - Au printemps
  • Paul Géraldy : Bonjour
  • Émile Goudeau : Pour hâter le retour du Printemps
  • Victor Hugo : Printemps - Puisque mai tout en fleurs dans les prés nous réclame - Spectacle rassurant - L'hirondelle au printemps 

page 4 (cliquer)

  • Alphonse de Lamartine : Le moulin au printemps
  • Philéas Lebesgue : Pâquerette
  • Pierre Menanteau : Renouveau
  • Gérard de Nerval : Avril
  • Charles d'Orléans : Le Printemps - Montrez bien, Printemps gracieux - Ballade du premier jour de mai
  • Henri Pourrat : Au royaume du vert
  • Jacques Prévert : Grand bal du printemps
  • Pierre Reverdy  : Sur un petit air
  • Raymond Richard  : Printemps -  Giboulées
  • Pierre de Ronsard  : Le printemps

page 5 (cliquer)

  • Jean-Antoine Roucher : Mars
  • Claude Roy : Le Printemps
  • Albert Samain : La dame de printemps
  • Georges Schehadé : Le jardin se chausse de persil
  • René-François Sully Prudhomme : Printemps oublié
  • Émile Verhaeren : Charmant printemps - Le printemps jeune et bénévole
  • Paul Verlaine : Green - Impression de printemps

chansons

  • Jacques Brel : Au printemps
  • Jean Ferrat  : Au printemps de quoi rêvais-tu ?
  • Léo Ferré : C'est l'printemps

page 6 (cliquer)

  • IAM : Revoir un printemps
  • Félix Leclerc : L'hymne au printemps

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4 mars 2007

Le printemps de Marc Alyn

Marc Alyn est né en 1937. Il est romancier (Le Déplacement, 1964) et poète (une vingtaine de recueils, dont Le Temps des autres, prix Max Jacob 1957 ; Les Alphabets de Feu, Grand Prix de Poésie de l'Académie Française, 1994) ...
... Voir catégorie PRINT POÈTES 2008 : L'AUTRE (France)

Un printemps tout neuf

Un arbre sourit de toutes ses fleurs.
Des ramiers s'en vont, à deux, vers le fleuve.
Le coucou vivant au bois donne l'heure :
Voici le printemps dans sa robe neuve !

Quel joli printemps aux yeux de pervenche,
Aux lèvres de rose, aux doigts de lilas !
La vie sur l'hiver a pris sa revanche
Et danse en chantant un alléluia.

Marc Alyn


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